Jenny Holzer au Whitney Museum
La nouvelle exposition de Jenny Holzer, artiste contemporaine américaine, exposée depuis le 12 Mars au Whitney Museum, est un véritable délice, à la fois esthétique et intellectuel.

Lorsqu’on entre un Dimanche Matin au Whitney Museum, musée privée du Upper East Side de Manhattan, on est accueilli par un brouhaha moyen, qui provient de la salle à manger souterraine, où une foule de new-yorkais (et quelques touristes) profite tranquillement du brunch, entre mimosas, pancakes et omelettes. Pas d’empesé dans ce musée : les serveurs valsent, les clients s’esclaffent avant de rejoindre le musée, et, aux étages, les publics varient du couple de vieilles amies aux touristes japonais, et du jeune couple trentenaire à la famille endimanchée.
De la salle de restaurant, on aperçoit plusieurs grands tableaux monochromes : la carte militaire de l’Irak est accrochée plusieurs fois au mur, présage de l’exposition de Jenny Holzer.
L’arrivée dans l’exposition vous coupe le souffle. Des slogans courts défilent en orange fluorescent sur le sol. A priori des messages anodins, ils suggèrent au lecteur attentif, au visiteur de musée patient, de bien regarder le contenu de l’exposition qui suit ! L’exposition utilise de nombreux documents déclassifiés de l’armée américaine pour tenter de fixer quelques formes dans le vaste brouillard qu’est l’Irak pour la plupart des visiteurs. Les fantomes prennent vie. Des extraits d’interrogatoire, des techniques de torture, des extraits de morgues, des os humains, s’entrechoquent avec des slogans de la vie quotidienne, diffusés sur les murs et des panneaux. L’esthétique est captivante, et Jenny Holzer traite le sujet irakien sans jugement apparent, en essayant de replacer l’horreur de la guerre et de l’occupation dans le quotidien. Offrir une vision non spectaculaire de la guerre, mais non moins macabre.
Cette exposition m’a beaucoup marquée. Cette exposition créé l’étonnement, propose une vision esthétique originale, et utilise la lumière de manière innovante. Elle invite à regarder en face les horreurs perpétrées par les soldats américains en Irak, tout en rappelant les meurtres de milliers d’innocents lors du 11 septembre. C’est une belle exposition, qui sort du politiquement correct sans pour autant tomber dans le militantisme.
Cette exposition n’est pas la seule à aborder le sujet de l’Irak. Le sujet est présent dans de nombreuses œuvres d’art contemporaines exposées à New York. Le New Museum, situé dans SoHo à Manhattan, expose l’œuvre d’un artiste qui a ramené une voiture irakienne carbonisée suite à un attentat suicide, où un intervenant (un Irakien, un historien, ou un journaliste américain), est présent pour répondre à vos questions. De nombreuses autres expositions dans ce musée et dans l’annexe PS 1 du Moma à Brooklyn, abordent ce sujet de manière tangente, en exposant la colonisation et la violence de forces armées. Ces expositions montrent la réflexion et l’incompréhension qu’a suscitée cette invasion, alors que l’on peut voir, un peu partout dans New York, en marchant devant une caserne de pompiers par exemple, un message comme celui-ci : « Tommy Rogers will leave for 16 months next May to fight in Irak and Afghanistan. May God be with him. »
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