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« L’art contemporain français est vu comme un peu en retard »

Le commissaire priseur Marc-Arthur Kohn* revient sur la typologie du marché de l'art contemporain. Son suivisme et sa méfiance de l'art français...

Depuis la fin du XIXe siècle, les marchands constituent la clé de voûte du système commercial artistique. Les français Durand-Ruel, Vollard, Kahnweiler ou Wildenstein au XIXe et durant la première moitié du XXe siècle, et plus récemment l’Américain Léo Castelli - qui a incarné la figure du grand marchand leader après la seconde guerre mondiale - ont su imposer leurs artistes sur la scène artistique internationale. Léo Castelli est né en 1907 en Italie et émigre aux États-Unis en 1941. Il y décédera en 1999. Il a promu successivement des artistes tels que Rauschenberg, Jasper Johns ou Frank Stella mais aussi de grands mouvements tels que le Pop Art, le Minimal Art ou l’Art Conceptuel.

Il a su se servir de la publicité mais il est également l’inventeur d’un réseau de « galeries amies » à l’échelle internationale. C’est ainsi que l’influence de Castelli a pu dans les années 1970 se répandre aussi bien aux États-Unis qu’ en Europe. Il est, à ce moment là, difficile pour un artiste d’être reconnu comme créateur de premier plan sans être soutenu par l’une de ces grandes galeries. La reconnaissance des artistes par ces grandes galeries amène la confiance des collectionneurs rassurés en quelque sorte sur leur placement qui leur semble moins incertain. Le marché de l’art contemporain s’établit depuis les années 60 sur le temps court et profitant des mouvements artistiques en perpétuelle innovation. Ce phénomène économique a très sérieusement rajeuni la nouvelle clientèle de collectionneurs. c’est un fait extrêmement important qui par contre-coups a sérieusement handicapé les marchés plus classiques des arts antérieurs tels que la peinture ou le mobilier anciens.

Quelles-ont été les conséquences de ce phénomène nouveau ?

Il a donné naissance à des « mégacollectionneurs » qui ont joué un rôle très important sur le marché. Ils sont même rentrés dans les conseils d’administration des grands musées où ils assurent la présence de leurs artistes. Ces stratégies visant a aller dans le sens du vent en soutenant les artistes déjà sous les feux de la rampe et qui appartiennent aux pays les plus légitimes sont utilisés par les collectionneurs, les marchands mais aussi par les musées et cela renforce la stratégie du temps court et des phénomènes spéculatifs. Cela amène une compétition entre les institutions les plus importantes qui se joue au niveau de l’anticipation de la nouveauté. Dès lors qu’un mouvement apparaît au niveau international ou qu’un artiste émerge, les grandes institutions sont condamnées ainsi que les marchands à ne pas laisser le phénomène se développer sans y être associé. C’est le succès qui va au succès. Comme exemples frappants Jeff Koons et Julian Schnabel.

Quels sont les temps forts des du marché de l'art ?

Les foires et les grandes ventes aux enchères internationales constituent les deux temps forts du marché de l’art. Le rôle de ces événements est essentiel dans la fixation des prix. Ces grandes foires d’art contemporain sont nées à la fin des années 1960. Les plus anciennes sont celles de Cologne et de Bâle. Ce sont des lieux incontournables pour y découvrir les tendances du marché et tester ses propres orientations. Le segment marchand semble prendre un poids toujours plus croissant par rapport au segment institutionnel de l’art contemporain.

De récentes analyses ont montré l’opposition qu’il existe entre le cœur du monde de l’art qui est occidental et qui regroupe les pays les plus riches et les pays périphériques, ceux qui n’appartiennent pas au double noyau géographique que constituent les pays d’Europe occidentale, d’une part et ceux d’Amérique du Nord, d’autre part. Cependant, ce phénomène a tendance à s’amenuiser, les artistes des pays périphériques font leurs apparitions remarquées dans les milieux collectionneurs, amateurs ou institutionnels. L’une des clefs pour ces artistes est le fait de travailler et de vivre à New York.

Comment expliquez la faiblesse du marché français de l’art contemporain ?

La faiblesse du marché français de l’art contemporain serait explicable par le fait que les œuvres des artistes français se vendent difficilement dans leur propre pays qui est la France. Ainsi les exportations de l’art français pâtissent de la mollesse du marché privé auquel doivent parfois se substituer les achats publics. Ce soutien fait promouvoir un art officiel toujours soupçonné de médiocrité en particulier dans un pays comme les États-Unis attachés au libre jeu du marché. La France et ses artistes font bien souvent l’objet d’un certain discrédit, d’autant qu’elle dispose de galeries importantes qui jouent un rôle sur le marché mais qu’elle manque de galeries leaders capables d’imposer leurs choix à l’échelle internationale.

La stagnation de la France dans le domaine de l’art contemporain est accentuée par le fait que les entreprises n’investissent peu ou pas dans ce domaine. Dans d’autres pays, les entreprises associent leur image à l’art contemporain.

Dès 1999, le philosophe Yves Michaud écrivait sur « la particularité de la crise française » de l’art contemporain : « Lappareil administratif s’est alors trouvé à lutter maladroitement contre les goûts du public. Même si la création artistique connaît aujourd’hui une vitalité réelle, elle ne peut plus être crédible quand elle est récupérée et transformée en un art officiel. Il n’est pas certain du tout que l’art contemporain soit en crise, mais, en revanche, les institutions qui s’en occupent sont sans doute bien malades...  »

La tendance de l’art contemporain français à l’étranger est plutôt vue comme trop intellectualisée, difficilement accessible et un peu en retard. Une autre spécificité française qui a du mal à s’exporter, c’est la prolifération des créations sous formes d’installations, de vidéos ou de multi-médias. Certaines œuvres nécessitent parfois tout un discours d’accompagnement qui s’exporte difficilement et qui agace un public étranger. Les grands projets de Bernard Arnault et de François Pinault en créant leur fondation contribuent à donner une meilleure visibilité à l’art contemporain français.

*Marc-Arthur Kohn est le fondateur et directeur de la maison de ventes Kohn Paris, sise 24 avenue Matignon depuis 1989.


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12 réactions à cet article    


  • Jonas Jonas 11 mai 2019 15:48

    L’art contemporain participe à la destruction de la civilisation européenne, faire table rase de l’héritage culturel et technique millénaire occidental, du travail minutieux et le travail d’orfèvre qu’il faut à un véritable artiste pour produire une oeuvre d’art, la recherche des matériaux nobles pour une sculpture, les tons des peintures pour une aquarelle, pour une seule cause, la quête de la Beauté de la création Divine.

    C’est l’élite oligarchique (financiers, banquiers, industriels, dirigeants de grandes startup informatiques, directeurs de journaux, etc...) qui dicte au peuple ce qui est art et ce qui ne l’est pas, débilisant les esprits afin d’affirmer une soi-disant suprématie intellectuelle et artistique. L’homme nouveau doit oublier son passé, son héritage culturel et religieux, pour se plier uniquement au consumérisme de la société moderne, effacer en lui la notion de Bien et de Mal, de Beau et de laid.
    Toute représentation humaine dans laquelle il pourrait s’identifier, retrouver ses racines, son patrimoine culturel, doit être bannie. Les statues, sculptures de l’art contemporain ne sont que de grotesques formes où l’on à peine à reconnaître quoi que ce soit.

    Comme il n’y a plus d’héritage, plus d’Histoire, plus de transmission par les maîtres du passé, l’art contemporain repose essentiellement sur l’attirance perverse afin d’assouvir les instincts les plus puérils : chiens fabriqués avec des ballons gonflables de foire, l’exposition de Jeff Koons au chateau de Versailles est une insulte aux magnifiques pièces de collection qui s’y trouvent, ou les plus vils : pornographie, scènes morbides, mise en oeuvre du caca et du pipi, du sexe, comme le « vagin de la reine », de l’« artiste » Anish Kapoor à Versailles, basés sur la perversion et la provocation, seul moyen d’attirer la curiosité des mécènes.

    La grande « oeuvre » de Jeff Koons, la série « Made in Heaven », a été vendue plusieurs millions de dollars. À vous de juger sur pièces.

    Milo Moiré créée ses toiles en se promenant nue dessus, glisse des oeufs de poule dans son vagin, qu’elle « libère » lorsqu’elle passe sur la toile.

    Joep van Lieshout met en avant dans ses « oeuvres » le sexe, les scènes de tortures macabres et morbides.
    http://www.bestinteriordesigners.eu/ateliervan-lieshout/
    http://zueccaprojects.com/slavecity-by/

    Marcel Duchamp propose un urinoir renversé, qu’il expose comme oeuvre d’art.



    • quid damned quid damned 11 mai 2019 16:02

      @Jonas

      Bref ... SGUECANEL.


    • Christian Labrune Christian Labrune 13 mai 2019 03:28

      @Jonas
      Votre dernier exemple : la « Fontaine » de Marcel Duchamp, m’apparaît comme le sommet indépassable de l’art occidental. La preuve, c’est que depuis 1917, cette oeuvre sublime, d’une beauté céleste et renversante, constamment imitée, n’a jamais pu être dépassée. Les « merdes d’artistes » de Manzoni m’apparaissent comme une fâcheuse régression, et Cloaca, la machine à faire du caca inventée par Wim Delvoye, malgré le talent exceptionnel de cet immense artiste, il faut bien le reconnaître, ne vaut guère mieux. Ils auront essayé, c’est l’essentiel, mais il faudra nécessairement, toujours, revenir à Marcel.
      Pourquoi ?
      Parce que Marcel Duchamp -et c’est en cela qu’il est divin s’est seulement contenté du geste de retourner, de subvertir l’urinoir. Quelle sublime économie de moyens ! Il me suffit d’y penser pour que j’aie tout de suite envie de pleurer.
      Pas de boîtes en fer blanc à sertir, qui fuiraient nécessairement après quelques années. Pas de plan compliqué, de recours à des mises en oeuvre techniques et quasi industrielles : l’idée pure, le ciel platonicien des essence révélé par le geste d’un démiurge, créateur d’un monde nouveau.
      Au terme de l’histoire de l’art, tout en haut d’une somme d’efforts collectifs pour toucher enfin la beauté idéale, il ne pouvait y avoir rien d’autre qu’un urinoir. Les Vinci, les Donatello, les Poussin, les Watteau, les Chardin et les Boucher, misérables tâcherons, n’avaient pas même été capables de l’entrevoir.


    • L'Astronome L’Astronome 13 mai 2019 08:14

       
      @Jonas
       
      Je suis même étonné que des « artistes » ne soient pas cotés en Bourse (de N-Y ou ailleurs), étant donné la charge spéculative et vénale qui entoure les œuvres des nouveaux « artistes ».
       
      L’art véritable est mort. Place à l’art nouveau, qui tient plus de l’escroquerie que du culte du Beau.
       



      • sls0 sls0 12 mai 2019 01:19

        @quid damned
        Eh oui l’art contemporain n’est qu’un art de spéculation pour que des Bernard Arnaut puissent défiscaliser le fric qu’ils nous ont piqué.


      • Jonas Jonas 11 mai 2019 16:01

        L’art contemporain est une mascarade reprise de ce que l’on appelait au XIXème siècle les « arts incohérents », un courant artistique humoristique qui s’amusait à peindre n’importe quoi et à déclamer que c’était une oeuvre d’art.
        Bien entendu, tout était pris au second degré, le monochrome noir de 1882 de Paul Bilhaud faisait rire tout le monde avec des titres comme : « combat de nègres pendant la nuit », le blanc : « Première communion de jeunes filles chlorotiques par un temps de neige ».
        En 1884 Alphonse Allais présentera un morceau d’étoffe rouge : « Récolte de la tomate sur le bord de la mer rouge par des cardinaux apoplectiques. »
        Eugène Bataille fera une Mona Lisa fumant une pipe en 1887, bien avant que Marcel Duchamp n’exploite le tableau en « ready-made », son fameux LHOOQ (un calembour digne des arts incohérents).

        Aujourd’hui cette farce monumentale est reprise et exploitée très sérieusement par les oligarques mondialistes en tant que véritables « oeuvres », effacer, détruire le monde ancien, sa culture, son identité et son patrimoine afin de créer un monde nouveau, du consumérisme, du multiculturalisme et cosmopolitisme. Les monochromes de Malévitch sont estimés à plusieurs millions de dollars.

        Ces débilités vendues à coup de millions de dollars, servent en partie à blanchir de l’argent, et à financer des milliardaires avec l’argent du contribuable.


        • Sylvain 11 mai 2019 17:07

          Discours de marchand d’art. Bien sûr, marché de l’art et évolution des modes en art contemporain sont intimement liés, mais juger de la qualité des oeuvres, de leur « avance » ou de leur « retard » selon les seuls critères du marché est quelque peu simpliste. Les artistes des années 80 et les néofiguratifs ont de nouveau la côte sur le marché, ce n’est pas pour autant que l’on peut qualifier par exemple Koons ou Schnabel de grands artistes dans une perspective historique. Les centres d’art contemporain en France permettent l’expérimentation artistique par-delà les seuls critères marchands. Des artistes comme Xavier Veihlan ou Claude Rutault produisent par exemple des oeuvres intelligentes et subtiles qui surpassent largement en qualité les oeuvres de la figuration libre des années 80, pour ne mentionner que ce mouvement.

          L’art contemporain français se porte bien, qu’il ne remporte pas le succès commercial des anglo-saxons à la mode n’est un problème que pour les marchands d’art ne faisant de l’art qu’un objet de luxe ou de placement, pas pour les amateurs de création artistique. Il ne s’agit pas là d’une conception naïve de l’art, mais d’une conception de l’art animant la créativité des artistes. 


          • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 11 mai 2019 18:34

            J’aime bien l’expression « art antérieur » ...ça en dit long .


            • Gloubi 11 mai 2019 21:50

              L’art « comptant pour rien » doit souvent sa notoriété au professionnalisme des marchands d’art qui montent en épingle n’importe quelle absurdité bâclée pour faire de l’argent aux dépens des gogos.

              A ce propos, merci aux contribuables qui paieront l’installation des tulipes « offertes » par Jeff Koons.


              • banban 12 mai 2019 09:51

                Si on veux que la France retrouve sont rayonnement et sa splendeur d’antan, faut bien faire quelques p’tit sacrifice.

                Moi Je soutiens a 100% les artistes, d’ailleurs j’ai hypothéquée ma maison et fais un p’tit crédits sur 20 ans pour orner ma courette d’un sublime plug anal rose de 4m. par contre il fait un peu d’ombre a mes fleurs et les chats font leur griffes dessus.


                • paulau 13 mai 2019 11:27

                  L ’ art contemporain c ’est souvent de la laideur ostentatoire.

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