La critique d’art et le cas Louis Dimier
La critique d’art, si prolifique et exemplaire au XVIII°Siècle sous les plumes célèbres de Diderot ou de Jean Baptiste Dubos, ne semble aujourd’hui rendue qu’à une exécrable insignifiance, ne se contentant que de consensus maladroits et d’inepties sans fondements. Même s’il faut remarquer quelques initiatives heureuses comme celle de Giovanni Lista en 1988 et sa revue Ligea, la critique d’art n’a plus, aux yeux de beaucoup de français, cette « rigueur morale du critique » qui avait fait sa renommée et sa pertinence.
Pourtant, l’Histoire française regorge d’exemples de critiques d’art célèbres, comme par exemple celle, atypique, de Louis Dimier (1865-1943), qui passa notamment à la postérité par la publication de quelques ouvrages de référence comme l’Histoire de la peinture française au XIX°Siècle (1914), Le Primatice, peintre, sculpteur et architecte des rois de France (1900) ou l’Eglise et l’Art (1935).
Atypique dans l’Histoire de la critique d’art, Louis Dimier l’est par son engagement sans réserve dans la cause royaliste et nationaliste de l’Action Française, qu’il parvint à faire coexister avec une certaine objectivité historique, une pondération remarquable qui lui faisait critiquer cette fâcheuse manie moderne du XIX°Siècle de « rabaisser l’Italie », véritable origine géographique de la Renaissance.
Si les deux engagements peuvent paraître opposés par certains points, l’art étant profondément antinationaliste, ils ne l’étaient pas pour Dimier pour qui l’environnement politique était profondément consubstantiel à la réussite culturelle. Ainsi pour Dimier, sous la Monarchie Française, l’Académie Royale de Peinture et de Scultpure avait permis à la France d’atteindre le « sommet de sa gloire artistique », l’art étant intrinsèquement lié à la tradition que maintient « la colonne vertébrale de la France » : la Royauté. Cette tradition royale était également garante de la pérennité de l’art par l’innovation, le progressisme qu’elle lui apportait : « le progrès régulier et l’enrichissement de l’art, c’est d’un changement paisible qu’il s’agit, opéré du consentement général, comme un pas en avant dans les ressources de l’art »[1].
Mais la Révolution française, profondément anarchique et philosophiquement impertinente, a détruit cette tradition, coupé l’art de sa source : « Quinze siècles de politique illustre, de guerres glorieuses, d’art florissant, d’essor intellectuel unique et admirable auraient attendu le verdict d’une secte ignare et fanatique jugeant selon des maximes honnies de la raison civilisée ! »[2].
Ses divergences d’opinions avec Maurras le font quitter l’Action Française en 1920 et l’Institut d’Action Française (et de sa fameuse chaire Rivarol) qu’il avait mis en place dès 1906. Ne se consacrant plus qu’à la critique d’art et la publication d’ouvrages littéraires, il s’attachera à l’écrivain Georges Valois qui publiera ses Souvenirs.
« Le grand mal du temps est de laisser perdre.
L’expérience des générations est le trésor de celles qui les suivent »[3]
[1] Louis Dimier, « Histoire de la peinture française »
[2] Louis Dimier, Les préjugés ennemis de l’histoire de France
[3] Louis Dimier, Veuillot
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