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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > « La Ronde » vertueuse ou non d’après Schnitzler au Vieux-Colombier

« La Ronde » vertueuse ou non d’après Schnitzler au Vieux-Colombier

Comment entrer dans le cercle du désir à partir de l’installation du plasticien Ludwig Höeshdorf qui, s’emparant des dix propositions amoureuses d’Arthur Schnitzler, en intitule le processus maïeutique « Les chromosomes énigmatiques » ?

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LA RONDE
© Brigitte Enguérand, collection Comédie-Française

De nombreux commentateurs dramatiques ont peu apprécié cet encadrement ontologique ajouté par Guy Zilberstein dans son adaptation de La Ronde.

En effet la quête orpheline, cherchant à travers dix reconstitutions de coït les origines parentales du plasticien, parait quelque peu hors sujet de la pièce de théâtre initiale, de facto mystérieuse et aspirant à le rester.

Et pourtant, quel régal que le carrousel mis au service du couple se reconstituant, à chaque tour de manège sous une autre forme psychosociale, à partir de l’un des deux partenaires faisant une nouvelle rencontre érotique avec l’objectif inconscient de reproduire la parité constituée par la pulsion libidinale sans cesse renouvelée et sa satisfaction réitérée !

Tournant en rond sur le disque labyrinthique installé sur la scène du Vieux Colombier, les archétypes défilent sans jamais chercher à sortir de l’abstraction du jeu de rôles duels qui les réunit de façon quasi boulevardière, la Comédienne, la Femme mariée, le Comte, la Grisette, l’Auteur, le Mari, le Jeune Homme, le Soldat, la Jeune Fille au pair & la Prostituée.   

A eux dix, ils vont refaire le monde sans que le passé et le futur aient la moindre chance d’apporter une quelconque explication à la récurrence de leurs ébats desquels se succèdent les générations de l’humanité à travers les siècles… du pareil au même. 

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LA RONDE
© Brigitte Enguérand, collection Comédie-Française.

Très drôle, délibérément sensuelle, particulièrement évocatrice, la ronde de l’amour contente les spectateurs qu’ils soient simples témoins ou voyeurs, qu’ils approuvent ou non le parti pris de Zilberstein, car la mise en scène d’Anne Kessler permet aux comédiens du Français de laisser libre cours onirique aux brèves rencontres triviales ou romantiques du sexe aux abois.

Alors pourquoi s’interdire plus longtemps de concilier et de fédérer au mieux le texte original et cette présente grille de lecture, certes subjective mais pas nécessairement aussi fonctionnelle que le voudraient ses détracteurs ?

Ainsi, ne serait-ce pas la propre identité du public qui, confronté à cette ronde infinie apparemment dénuée de sens, serait mise en question au travers de cette enquête sémiologique lui permettant de déléguer son inquiétude dans la distanciation théâtrale ?   

Guy Zilberstein conçoit, en effet, que dix comédiens doivent être en charge de reconstituer les saynètes d’approche sexuelle imaginées par Schnitzler tout en forçant le trait jusqu’à la caricature de manière à laisser émerger une thématique universelle de l’acte d’amour.

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LA RONDE
© Brigitte Enguérand, collection Comédie-Française

Aussi davantage que Ludwig, trouvant par élimination et synthèse, la vérité de sa filiation, c’est surtout le spectateur qui, ici, devrait découvrir la voie symbolique pour inscrire sa propre destinée au sein de ce qui pourrait être perçue comme une immense chaîne de solidarité humaine.

Cette explication en valant bien une autre et même celle du non sens absolu, la contribution de Zilberstein pourrait alors avoir des potentialités métaphoriques et si ce n’est « en creux » pédagogiques.

Dans cette perspective, la réalisation d’Anne Kessler serait d’autant plus remarquable qu’elle maintiendrait intégralement l’étrangeté lubrique de Schniztler tout en extrayant la substantifique mœlle de ce cercle vertueux ou pas… selon sensibilité.

photos 1, 2 & 3 © Brigitte Enguérand, collection Comédie-Française

photo 4 © Theothea.com

LA RONDE - *** Theothea.com - d'après Arthur Schnitzler - adaptation Guy Zilberstein - mise en scène Anne Kessler - avec Sylvia Bergé, Françoise Gillard, Laurent Stocker, Julie Sicard, Hervé Pierre, Nâzim Boudjenah, Benjamin Lavernhe, Noam Morgensztern, Anna Cervinka, Pauline Clément & Louis Arene - Théâtre du Vieux-Colombier / Comédie Française

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LA RONDE
© Theothea.com

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3 réactions à cet article    


  • Fergus Fergus 12 décembre 2016 13:04

    Bonjour, Theothea

    Déconcertante, cette adaptation de La ronde par Guy Zilberstein ne semble pourtant pas exempte d’un certain charme.

    Très différente en tous les cas de la superbe version mise en scène par Marion Bierry au Petit Montparnasse il y a quelques années. 


    • Ben Schott 12 décembre 2016 13:47

       
      « Et pourtant, quel régal que le carrousel mis au service du couple se reconstituant, à chaque tour de manège sous une autre forme psychosociale, à partir de l’un des deux partenaires faisant une nouvelle rencontre érotique avec l’objectif inconscient de reproduire la parité constituée par la pulsion libidinale sans cesse renouvelée et sa satisfaction réitérée ! »
       

      Moi je dis que le gars qui est capable d’écrire ce genre de galimatias est un bon client pour ce genre de théâtre...
       

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