La sensualité de Gustave Courbet
Trente ans après la dernière rétrospective qui lui fut consacrée, l’oeuvre de Gustave Courbet vient à nouveau nous éclabousser de toute sa diversité, sa vitalité et sa sensualité. En s’articulant autour de huit thématiques, l’exposition qui se tient au Grand Palais à Paris jusqu’au 28 janvier 2008 lève le voile sur l’oeuvre de ce peintre volontairement scandaleux.
Tout juste âgé de 20 ans, Gustave Courbet, jeune homme à la beauté époustouflante, débarque fraîchement de son Doubs natal et s’installe à Paris en 1839 avec la volonté affichée de devenir le plus grand peintre du siècle. Porté par un ego surdimensionné, le jeune provincial devient rapidement un personnage controversé. Objet de toutes les polémiques, il est admiré, célébré, porté aux nues par les uns ; abhorré, méprisé, raillé par les autres.
Présentée sur 1 500 m² et rassemblant quelque 120 peintures, une soixantaine de photographies et environ 30 oeuvres graphiques, cette rétrospective aspire à offrir une nouvelle lecture de l’oeuvre de Courbet. C’est donc dans une volonté de faire découvrir une oeuvre protéiforme, de replacer l’artiste dans son époque et de mettre en lumière les liens entre sa production et un art émergent au XIXe siècle - la photographie - que l’exposition s’organise autour de différents thèmes, clés de compréhension d’une oeuvre aussi diversifiée que complexe.
La rétrospective s’ouvre sur une série d’autoportraits réalisés entre 1840 et 1855 et témoignant de la volonté de l’artiste de suivre les traces d’un maître du genre, Rembrandt. Le Désespéré (1843), toile appartenant à une collection privée, est sans conteste l’oeuvre phare de cette section. Le tourment qui se dégage de ce visage aux traits tirés, son regard saisissant et énigmatique surprend et assiège le visiteur qui, dès lors, ne peut s’empêcher de chercher à percer le mystère de cet artiste. Ce n’est pourtant pas cette toile qui fait connaître Courbet de la scène artistique parisienne, mais un autoportrait bien plus sage dit Courbet au chien noir, admis au Salon en 1844. L’artiste, bohème et dandy à la fois, s’y représente au coeur d’un paysage de sa région natale. Très attachée à cette dernière, Courbet n’a de cesse d’en peindre les paysages et la vie qu’on y mène. Mais ce désir de représenter des scènes populaires n’est pas apprécié par tous. Ainsi, L’Enterrement à Ornans fut l’objet d’une virulente polémique lors de sa présentation au Salon de 1850-1851. On reproche d’abord à l’artiste le format du tableau (6,68 m x 3,15 m) habituellement réservé aux scènes religieuses et historiques. Ce tableau valu à Courbet la réputation d’un artiste privilégiant le laid, l’ordinaire, le populaire.
Au fil des salles, on découvre des facettes bien moins connues de l’oeuvre de Courbet telles que les oeuvres liées à la chasse. Ces dernières occupent une place importante au sein de l’exposition bien qu’elles aient longtemps été moins bien considérées que le reste de l’oeuvre de Courbet. Mais l’oeuvre la plus attendue est bien sûr L’Origine du monde (1866). Rassemblant autour d’elle les tableaux consacrés aux nus féminins, elle est certainement l’oeuvre la plus scandaleuse de l’artiste. Dans notre société où la nudité ne semble plus être un tabou, elle parvient pourtant aujourd’hui encore à provoquer un sentiment de malaise chez le spectateur, placé bien malgré lui en position de voyeur. Partagé entre curiosité et gêne, le spectateur ne sait trop comment appréhender cette oeuvre puissante, troublante et dérangeante.
C’est sur la présentation rare des trois tableaux Les Truites de La Loue, métaphores de Gustave Courbet et de son douloureux destin que cette impressionnante rétrospective se clôture comme pour rappeler que le génie n’est pas gage de bonheur...
Courbet, Galeries nationales du Grand Palais, 75008 Paris, du 13 octobre 2007 au 28 janvier 2008. Prix d’entrée : 10 euros.
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