Le cinéma français est-il mort ?
Le cinéma français est-il mort ?
Pouvez-vous me citer dix chefs d’œuvres français sortis sur les écrans ces dix dernières années ?
— Euh… oui. Pas de problème. Le dîner de cons, euh…non c’est 1998. Bernie ! Non, c’est 1996. Stalingrad, de Jean Jacques Anneau…Non, c’est 2001 et d’ailleurs c’est une co production franco americano germano anglaise donc ça ne compte pas. Attendez ! Je vais trouver… OSS 117 ? Rio ne répond plus.

Non, celui-ci je peux pas le mettre dans ma liste. C’est sympa, mais bon. The Artist ? Un Joli tour de prestidigitation cinématographique, mais non… Euh… attend ! Ce sont des films francophones mais, euh. D’ailleurs l’un a reçu de très mauvaises critiques de la part de la critique française qui ne se contente apparemment pas de dire du bien des mauvais films, mais éprouve aussi le besoin d’en dire du mal des bons… je veux parler de Dikkenek ! Oui, le mal noté, Dikkenek. Et tant que j’y suis : C’est arrivé près de chez vous, Les convoyeurs attendent ? N’est ce pas des films substantiels pour ne pas dire essentiels ? Ouais. Mais ils ont plus de dix ans, et d’ailleurs ce sont des films belges. Poelvoorde ! Voilà un acteur qui a fait des bons films français. Podium, justement : un film français qui a moins de 10 ans, non ? Oui, tout juste. Il aura dix ans l’année prochaine. Podium tiens. Je le mets dans ma liste. Ça fait 1. Voilà pour les comédies. Laisse-moi chercher dans le rayon thrillers, aventure, guerre, policiers, drames… Les choristes ? C’est mignon Les choristes. Allez 2. Non, mais je suis alzheimer ou quoi ? Reprenons depuis le début. Si on remonte aux frères Lumière. L’arrivée en gare de La Ciotat, Renoir évidemment, La règle du jeu, Une partie de campagne, Carné, Le jour se lève… Mon préféré de l’époque avant guerre : Pépé le moko de Duvivier. Et puis, après la guerre, Tati. Tati bien sûr. Chaplin version française. Le 7ème dans tout ses états.
Dans les années 50-60 il y a les films de La Nouvelle vague. Truffaut, Godard, tout le monde les connaît. Ils n’ont pas volé leur succès. Sous le signe du Lion de Rohmer n’est pas très connu mais particulièrement émouvant dans le genre néo réaliste. A cette époque il y a aussi un cinéma classique. Et du solide ; Les tontons flingueurs, La cave se rebiffe. En matière de thriller ce qui se fait de mieux ? Plein Soleil.
Dans la décennie 70-80 il y a tellement de bons films qu’il est impossible de tous les nommer. Au rayon policier on ne peut pas oublier Jean Pierre Melville. Et d’ailleurs ses films sont beaucoup plus que des films de genre. Dans le rayon comédies Francis Weber en a fait quelques unes à lui tout seul. La Chèvre. Les compères. Les fugitifs. Le grand blond avec une chaussure noire, Le Jouet… Et il en fabriquait encore il y a peu, puisque Le dîner de cons c’est lui. En moins fin, Zidi avec L’aile ou la cuisse. Dans le genre humour noir et film d’auteur, Blier bien sûr avec Les valseuses, Tenue de soirée, Buffet froid…La comédie grand public : Leconte avec Les Bronzés. Le drame, Leconte encore avec l’excellent Monsieur Hire. Remarquons au passage que c’est déjà pas mal de laisser un seul bon film. Les meilleurs réalisateurs laissent rarement derrière eux plus de 3 ou 4 bon films. La plupart n’en laissent aucun. On peut citer des exceptions comme Kubrick mais y en a pas beaucoup.
Mais revenons au cinéma français de ces dix dernières années. Bon, j’avoue ! Je suis incapable de citer dix bons films. A la fin des années 80 et au début des années 90 on parle beaucoup de Luc Besson, ex prof de plongée qui occupe la surface en essayant de faire des films américains avec plus ou moins de succès. Il a le sens de l’image et de la bande son, mais n’est pas Ridley Scott qui veut et son 5ème élément demeurera perdu dans le temps à des années lumières de Blade Runner. Il aura laissé Le Grand Bleu, 1988. Un film. C’est tout. Et puis le grand vide commence à se faire. Quelques films encore dans les années 90 tels Ridicule de Leconte qui fait encore parler de lui. Et puis arriveront les films grand public à moitié drôles de Hazanavicius où l’on rira Ah ah ah parce qu’on a compris la référence. Et oui, on est des cinéphiles initiés. C’est l’esprit Canal +. Cinéma bien fait mais vraiment pas inoubliable. Je crois que tout c’est mis à mal tourner avec l’arrivée des Nuls au cinéma et de la consécration par la critique et le public du très mauvais La cité de la peur.
Le cinéma français décline à partir de la prise de pouvoir des types de la télé. On peut même dire sans exagérer que ce sont eux qui ont tué le cinéma français. Je le conceptualise en le disant : c’est le petit écran qui a tué le grand. Les Chtis on remplacé La grande Vadrouille, Quai des orfèvres, Le deuxième souffle. La comédie populaire érudite tourne au téléfilm beauf, et le polar se résume au film d’action. Sans compter les films du réel nullissime qui ont succédé à la Nouvelle Vague, et qu’on récompense régulièrement à Cannes pour se donner bonne conscience. Ouais, mais sans Tavernier, personne ne serait ce que c’est que de s’emmerder réellement au cinéma disent les mauvaise langues dans le milieu. Bien sûr, il y a les frères Dardenne, mais il sont Belges. Bon, résumons : De 1895 à la fin des années 1980, le cinéma français, qui s’invente en France rappelons-le, produit pendant 100 ans une quantité de ce qu’il est convenu d’appeler des « classiques ». C’est à dire les films dont on se souviendra et qui peuvent être considérés comme des œuvres d’art qui existent comme des entitées, par opposition au reste qui est en quelque sorte du flux et qui s’écrase au fur et à mesure comme des cartons de yaourt périmés dans une benne à ordure. C’est incontestablement pendant cette période, le meilleur cinéma du monde, avec pour seuls rivaux importants Hollywood bien sûr et les réalisateurs est européens qui y officient, ainsi que le cinéma italien avec des maîtres comme Visconti, Fellini, Antonioni pour ne citer qu’eux. Après, les chose se gâtent.
La décennie 90 est une décennie charnière. On trouve encore quelques bons films qui affleurent mais ils se laissent désirer. À partir de 2000 le bon film français se fait aussi rare qu’une truffe dans la jardinière de votre T3 à Montreuil. Certains citerons Audiard fils, qui a d’ailleurs reçu pléthores de récompenses à la place de tous ceux à qui il était impossible d’en distribuer sans déshonorer définitivement le 7ème art. Mais il est largement survendu. C’est un bon fabricant de films comme Hazanavicius mais Sur mes lèvres et Le prophète ne sont plus que des rides laissées à la surface calme plate du grand écran bleu après le naufrage du Titanic, dans un océan cinématographique français d’une vacuité quasiment absolue.
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