Le grand vainqueur des grèves : Johnny Hallyday !
Le Figaro le clame ce jour à qui veut l’entendre : « avec 108 000 albums vendus en une semaine malgré la grève, la star a réussi son pari ». Ça m’aurait étonné qu’il ne le vende pas, notre Johnny national, chacun de ses albums dépassant le chiffre, ou tout comme. Mais il y a mieux : « C’était un pari risqué », continue sur sa lancée le journaliste, tout émoustillé d’écrire une page de la gloire de celui qui a touché notre président. Il arrive « devant Jenifer (Star Ac’) et Christophe Maé (le frère de Louis XIV, pas moins !) »
C’est toujours mieux que devant... Non on ne va pas être méchant avec le bataillon de hurleuses qu’est devenu le hit-parade français. Ce n’est plus un hit-parade, c’est le couinement de toutes les portes du château de Versailles en même temps. Car les devins, les vrais devins, ceux qui nous disent comme Pascal Nègre que les DRM c’est bien pour finir par constater que plus rien ne se vend malgré ça, que "c’est un vrai succès populaire alors que l’industrie du disque lui prévoyait un succès d’estime". "Un succès d’estime" attendu car le gars a changé de maison de disque (aïe encore une porte qui claque) et qu’il a enfin décidé de ne pas sombrer dans la daube dans laquelle s’est vautrée 90 % de sa carrrière ? C’est ça la rupture musicale hallydayienne ? Et pour étayer la thèse du tsunami de vinyle (morice il ne fait plus de vinyle depuis plus de 15 ans !), on balance méchamment les concurrents au Figaro, à l’esprit révolutionnaire depuis le 6 mai : "À titre de comparaison, Céline Dion n’a vendu que 28 000 exemplaires de son dernier album en France. Étienne Daho a démarré à 20 000 avant de chuter en deuxième semaine à 10 000". La première ça n’étonne que de peu, étant donné l’absence totale de promo qu’a eu cet album, Mme Dion étant tellement persuadée de son talent "n’est-ce pas mon René"... que ce n’est même pas la peine d’en faire. Le problème, c’est d’essayer de la voir derrière son pied de micro sur ses clips, au rythme où elle mincit. Daho, lui, et bien, c’est son rythme habituel disons. Il vend comme il chante... c’est-à-dire que le tiroir -aisse vivote, sans plus, on entend à peine le bruit des billets qui tombent dans le tiroir. Bon, ça c’est le côté critique du disque, au Figaro. Ah bon y a rien ? Ben oui, on est pas chez Rock and Folk (salut Philippe Manoeuvre !), on veut bien causer variété au Figaro, mais de là à décortiquer du Johnny, ne rêvons pas. Non, le mieux, c’est pour la fin :
"S’il est content, Thierry Chassagne regrette néanmoins l’effet de la grève sans laquelle il aurait pu vendre 30 % d’albums en plus. Dès le premier jour de la grève, nos statistiques démontraient que les gens n’allaient plus dans les magasins. Quand vous passez la semaine à moins dormir car vous rentrez plus tard et partez plus tôt pour aller travailler, vous restez chez vous le week-end. Du coup, samedi, les magasins étaient vides."
Et là, on pouffe de rire, en s’apercevant que tout ce qui a été dit avant ne servait qu’à enfoncer ce clou (de traverse, je suppose !). L’homme qui mange dans la main du président a lui aussi vaincu les hordes de méchants syndicalistes qui avaient bloqué les trains de fret remplis à ras bord de CD de Johnny. Bloqués avec quoi au fait ? L’intégralité des albums de Jean-Philippe Smet ? Ils avaient accrochés des 45 tours de Retiens la nuit aux caténaires ? Mis des costumes de scène des année 70 de l’idole en lamé pour se positionner au milieu des voies, un fumigène dans chaque main ? C’est à mourir de rire la lecture du Figaro. Enfin c’était, car Beytout le drôlatique s’en va, et la ça ne va plus rigoler du tout, au Figaro, sous Serge (le retour).
Bon à part ça y vaut quoi cet album ? Ben rien, je ne l’ai même pas écouté. Quand j’ai su qu’il allait faire un disque de Blues, j’ai foncé à la Fnac, je vous l’avoue, acheter le tout dernier Benoît Blue Boy. Le meilleur, c’est évident. Benoît, ça fait 28 ans qu’il fait du blues. Alors Hallyday, à côté, il ne pèse pas lourd. Si vous voulez apprendre à conjuguer le verbe tortiller, c’est dans l’album, et y a que Benoît pour faire ça aussi bien. Ça, Johnny ne saura jamais le faire. Ni écrire des textes hilarants tels que Jusque là, à chanter à votre compagne si vous voulez accélérer le divorce (ou vivre dangereusement le reste de votre vie). Ou reprendre du Clifton Chenier, ce que personne n’ose plus faire. Benoît est l’anti-Hallyday par excellence. Lui, quand il parle, on comprend ce qu’il dit. Mieux encore : avec sa petite moustache à la Dario Moreno (qu’il n’a plus, mince !) et ses costards de vieux marlou de canebière, Blue Boy a de la classe à revendre. Tout ce que n’aura jamais Hallyday. Et enfin, quand il va en concert, Benoît Blue Boy vient... en train. Première classe !
Allez, je me remets Descendre au café, le tout premier titre de Blue Boy entendu à la Radio, à l’époque, à l’émission de Claude Villers et Patrice Blanc Francart. A l’époque, Hallyday était déguisé en une espèce de sous-Presley blond à costards à franges, avec son nom écrit en lettres de néon. Il était déjà moche, et ça s’est pas arrangé... avec les grèves ! Et puis une chose encore : quand B. Boy va aux Etats-Unis, c’est pas pour nous ramener une pochette faite en studio comme pour vendre du Coca. Chez lui, les bagnoles sont déglinguées, les bistrots pourris, le bord de la route n’a même pas de macadam. Le blues, c’est comme ça, et pas autrement.
PS : n’oubliez pas de tortiller pour ouvrir !
Contacter Denis Leblond pour un concert :
Denis / Europe Tempo Spectacle tél. : 01 42 26 03 03 / fax : 01 42 26 03 13
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