Le « Rutabaga Swing » à La Comédie des Champs-Elysées

Avec deux nominations aux XXIèmes Molières, il s’avère désormais que le Swing et le Rutabaga sont associés, d’une part pour espérer le trophée du Théâtre public avec un spectacle ayant trouvé sa plénitude au théâtre privé en deux reprises successives au Petit Montparnasse et à La Comédie des Champs-Elysées, d’autre part pour une célébration de Didier Schwartz cité en tant que meilleur auteur de cette saison théâtrale 06-07.
Aussi, à quelques jours de cette cérémonie qui va exalter les spectacles les plus prisés, force est de constater que cette pièce a réussi à fédérer la réflexion des critiques et des spectateurs sur le thème de la collaboration grâce à un chassé-croisé vaudevillesque jalonné de chansons de cette période interprétées par les comédiens eux-mêmes.
En effet en 1942, au café de Madame Barray à Chambier, les échos de la guerre se révèlent dans le comportement que les habitués affichent devant l’occupant, alors que les masques se dissimulent au gré des actes de résistance et selon les mesures de rétorsion ennemie.
Et pourtant la vie y continue avec son désir de divertissement symbolisé en l’occurrence dans la répétition d’un tour de chant amateur qu’un officier allemand (François Feroleto) peut apprécier tout en ayant réquisitionné une des trois chambres.
Un facteur (Jacques Haurogné), un bibliothécaire (Bruno Abraham-Kremer), une coiffeuse (Marion Posta), une serveuse (Amala Landré) et le patron du bar (Emmanuel Curtil) s’emploient à ce projet artistique alors qu’un otage (Jacques Herlin), condamné à mort par la Kommandantur locale, se réfugie dans l’établissement en suscitant d’emblée une cohabitation de cache-cache tout à fait grand-guignolesque.
L’auteur ne prend pas parti sur les tenants et aboutissants moraux que cette situation tragi-comique va engendrer, mais il laisse tout au contraire l’observateur en prise directe avec la confusion, le doute et le trouble que ne cesse de compenser le charme désuet de cette époque.
Cette volonté relayée par une mise en scène à l’atmosphère bon enfant, digne d’un jour de fête cher à Jacques Tati, se manifeste grâce à un accompagnement au piano-bar (Ezequiel Spucches) que la vie au quotidien se charge de rythmer dans la convivialité villageoise des années quarante, quelque part entre de Gaulle et Pétain.
C’est la Libération qui marquera le coup fatal à tant de postures contenues dans le quant-à-soi, en révélant au grand jour, courage et lâcheté dans toute leur splendeur respective.
Un véritable spectacle de divertissement au service d’une cause citoyenne où chacun y trouvera du grain éthique à moudre dans une joyeuse mélancolie.
Photo © Lot
RUTABAGA SWING - *** Theothea.com - de Didier Schwartz - mise en scène : Philippe Ogouz - avec Bruno Abraham-Kremer, Emmanuel Curtil, François Feroleto, Jacques Haurogné, Jacques Herlin, Amala Landré, Marion Posta et Ezequiel Spucches au piano - Comédie des Champs-Elysées -
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