Lire et lire
La lecture est à l’esprit ce que le pain, le fromage et le vin sont au corps. Une nourriture. Soyons attentifs à sa qualité car nous sommes ce que nous mangeons…
Illustrons cette forte pensée par deux exemples. D’abord un best-seller à la mode, incontournable, succès mondial. Millenium, une trilogie policière, depuis 50 semaines dans les meilleures ventes en France.
Le premier tome se lit facilement ; bavard mais efficace, avec une critique des journalistes de la presse économique inhabituelle. Sa virulence est même réjouissante. Cet aspect du polar n’a jamais été repris, dans les critiques nombreuses et toujours sur le mode du dithyrambe. J’ai peiné à finir le tome 2. Il est fait de paragraphes de ce genre :
« Michaël regarda l’heure et s’offrit une autre cigarette clandestine. Il s’assit à la fenêtre et regarda Götgatan en bas. Du bous de la langue, il toucha doucement la plaie à l’intérieur de sa lèvre. C’était en train de cicatriser. Pour la millième fois il se demanda ce qui s’était réellement passé devant l’immeuble de Lisbeth Salander dans Lundagatan. »
Des descriptions, des dialogues, du remplissage, du suspense, des gentils, des méchants très méchants, des héros standards avec la hacker de service, une femme quasi extraterrestre, pas d’humour mais l’humeur suédoise.
Quant au troisième, j’en suis à la page 57 et n’irai pas plus loin.
A côté, Lin Yutang, un coup de cœur pour son livre « L’importance de vivre ». Il voyage dans la pensée chinoise et occidentale. Le message est profond, le style simple, l’humour au rendez-vous. Voici le 2ème paragraphe de la 1ère page :
« Le philosophe chinois rêve avec un œil ouvert, regarde tout avec amour et une douce ironie, mêle son cynisme à une aimable tolérance, parfois s’éveille du songe de la vie, puis se rendort. Le rêve plus que l’état de veille lui donne l’impression d’exister, il revêt dès lors ses états de conscience des caractères d’un songe. Un œil fermé, l’autre ouvert, il voit la futilité de tout ce qui l’entoure et de son propre comportement ; mais il conserve tout juste assez le sentiment de la réalité pour s’en accommoder. Rarement désillusionné parce que sans illusions, il n’est pas non plus désappointé parce qu’il n’a pas d’espoirs extravagants. Dans ce sens son esprit est émancipé. »
Le premier livre énerve, irrite, on a l’impression de perdre son temps mais la perversion joue son rôle et on peut être pressé de finir pour savoir comment les méchants vont être punis. On n’est pas content d’avoir été pris au jeu et on le referme avec l’envie de l’oublier très vite.
Le 2ème réconforte, amuse, instruit. Il met de l’ordre, élargit l’horizon, apprend à regarder, à jauger. Il se déguste. Un grand cru, un livre de garde.
3 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON