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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > Maudits homonymes

Maudits homonymes

Tourments du cancre.

Pourquoi diantre se sont-ils ainsi parés d'habits dissemblables alors qu'il se laissaient entendre de manière identique ? La question restera à jamais sans réponse pour le cancre que je fus et que je demeure parfois pour certains d'entre eux. Ainsi entre la canne et la cane, je marche toujours sur une jambe en me prenant de bec avec moi-même et qu'elle soit cannette ou bien canette, je ne bois jamais leurs paroles sans en baver quand je prends la plume.

Les homonymes ont toujours constitué un obstacle infranchissable pour qui voulait faire le grand saut de l'écriture mais n'était qu'un sot orthographique. Tous ces signes qui se ressemblent au point de me causer bien des coups de règle quand le cygne dressait son long cou devant moi. Je ne pouvais qu'être un pauvre hère, incapable de rester dans le sillage des bons élèves, sortant de leur erre et ne me rattrapant qu'en calculant mieux qu'eux l'aire de l'hexagone.

Plus il y avait de coins plus je faisais mon miel des difficultés faisant de moi une bonne pâte qui se remettait sur ses pattes en changeant de matière. J'ignorais alors qu'il existât un fruit nommé coing pour venir semer le trouble dans ma pauvre caboche. Je faisais ainsi le désespoir de père et mère quand monsieur le maire ne me remettait jamais le prix du meilleur élève dans la cour de notre école. Le prix de calcul, c'est un peu court quand on aspire à bien mieux. J'avais beau faire le coq, je restais à fond de coque avec mes zéros en dictée.

S'il n'y a plus lieu de s'en faire aujourd'hui avec les correcteurs automatiques, je reste encore à mille lieues de rendre une copie immaculée. La confusion demeure à ma plus grande honte en dépit des lignes au mètre que m'ont fait remplir mes bons maîtres. Je restais sur ma faim tandis que pour eux, mes inepties n'avaient pas de fin. Les mois passaient, les pages de copie s'accumulaient, je ne comptais plus le nombre de fois où moi, je perdais la foi en mes capacités.

La coupe était pleine et je demeurais dans la salle de classe à remplir inlassablement des pages inutiles tandis que mes camarades allaient jouer dans la plaine. Moi le sale gosse dysorthographique, je me refusais à admettre qu'il existât une distinction entre lait et laid, ce n'était vraiment pas beau. Me mettre à la tâche a toujours fait tache dès qu'il fallait bien écrire ces mots cause de tous mes maux.

Il est encore de bon ton de se moquer des fautes de ceux qui comme moi ne restent jamais sur la bonne voie de la rectitude graphique. Qu'importe si ma voix efface ces erreurs, le passage à l'écrit tourne toujours en queue de poisson. Seul le maître queux pourra accommoder le thon sans s'indigner de la friture sur la ligne. Il se contentera de présenter la note à celui qui se prend désormais pour un naute.

La bosse des maths ne suffit pas à présenter bonne face. Quoi qu'on fasse, les fautes sèment le trouble même chez ceux qui s'aiment. La platitude du propos s'explique quand on découvre que mes racines poussèrent en Beauce, si loin de Foix que je ne suis pas habilité à écrire : « Il était une fois » sans me provoquer une crise de foie.

L'obsession tourne en rond, à l'image de cette fameuse bulle qui hante encore mes pires cauchemars. Ma prose se trouva prise au piège de ce drame et j'eus beau trouver refuge dans les vers, mes pieds quoique bots et branlants n'en furent jamais beaux. Je fis une pirouette pour retomber sur ma jambe en me dirigeant vers un soulier de vair avec lequel se consola celui qui se fit conteur après avoir été compteur.

C'est ainsi que ce ne sera jamais en vain que ce billet vint prendre corps dans un verre de vin en écoutant le son du cor et en suivant les conseils du correcteur. Les homonymes peuvent danser leur ballet funeste sous mes yeux, je me contente d'un bon coup de balai pour les chasser de ma vie. Je vous ferais grâce d'un ultime homonyme de corps de garde afin que le propos demeure convenable et si possible bien orthographié ...


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17 réactions à cet article    


  • ricoxy ricoxy 24 août 13:47

     

    Bôof, il vaut être un fauteur d’orthographe qu’un fauteur de trouble. Au moins, il n’y a pas mordome.

     


    • C'est Nabum C’est Nabum 24 août 23:26

      @ricoxy

      Les deux mon général


    • juluch juluch 24 août 18:54

      Pas facile la langue française....


      • C'est Nabum C’est Nabum 24 août 23:26

        @juluch

        Affreux


      • mursili mursili 24 août 22:09

        @l’auteur

        Il est une question que par acquit de conscience j’aimerais vous poser bien qu’elle soit empreinte d’un certain mauvais esprit : ces mots pour lesquels vos bons maîtres vous avaient mis au ban, êtiez-vous censé les connaître ?


        • C'est Nabum C’est Nabum 24 août 23:27

          @mursili

          Bien-sûr
          En ce temps lointain nous avions du vocabulaire


        • mursili mursili 25 août 08:33

          @C’est Nabum

          C’est vrai. Au fond, vous connaissiez depuis le début les sens distincts de, par exemple :

          sang, sans, cent, sent
          sain, saint, sein, ceint
          mer, mère, maire
          père, paire, perd
          vin, vingt, vint, vainc, vain
          etc. etc.

          Quelle serait selon vous la meilleure méthode pour apprendre à ne pas les confondre ?

          Si je vous pose toutes ces questions indiscrètes c’est que l’orthographe du français m’intéresse, et notamment la relation entre la langue parlée et la langue écrite.


        • Jean Keim Jean Keim 25 août 09:07

          W@mursili

          Parfois mettre au féminin, conjuguer, mot de la même famille, ..., peuvent aider...

          sang –> sanguin

          cent –> centime

          sent –> sentir, etc.


        • pemile pemile 25 août 09:23

          @mursili « l’orthographe du français m’intéresse, et notamment la relation entre la langue parlée et la langue écrite. »

          https://www.ted.com/talks/arnaud_hoedt_jerome_piron_la_faute_de_l_orthograph e/up-next


        • mursili mursili 25 août 09:56

          @pemile

          Merci pour ce lien. Je n’ai pas encore regardé toute la vidéo. Les deux conférenciers sont très sympathiques et mettent les rieurs de leur côté, pour autant cela ne veut pas dire qu’ils sont convaincants. Je connais leurs arguments et ce sont un peu toujours les mêmes depuis des décennies. On peut les suivre s’il s’agit de dédramatiser le problème orthographique mais ne pas être d’accord sur les solutions qu’ils préconisent. 

          Car l’orthographe, c’est pas la langue, c’est juste le code graphique qui permet de la retranscrire.

          Entièrement d’accord avec ça.
          Cependant, je ne suis pas partisan d’une écriture phonétique, précisément à cause des nombreux homonymes (ou plutôt homophones) de la langue française. Les diverses orthographes permettent de lever facilement les ambigüités.


        • cevennevive cevennevive 25 août 13:59

          Bonjour C’est Nabum,

          Et que pensez-vous de l’inénarrable Raymond Devos qui nous conjugue le verbe ouïr :

          Au présent :

          J’ois, tu ois, il oit,

          Donc, « l’oie oit » nous dit-il.

          Au passé simple :

          J’ouis « il n’y a vraiment pas de quoi » ajoute-t-il

          Jeux de mots si savoureux...


          • Seth 25 août 15:21

            @cevennevive

            C’est un verbe particulier. Tout comme rares sont ceux qui connaissent l’infinitif et la conjugaison du verbe utilisé dans « ci git »...

            Et pour la bonne bouche :

            Ci git et dort en solier
            Qu’amour occit de son raillon
            Un pauvre petit escolier
            Qui fut nommé François Villon...

            « Epitaphe Villon »

            Voilà qui devrait plus intéresser notre maîtresse en Français, j’ai nommé Rosemar., que les chansons de variété cucul, mais bon...  smiley


          • C'est Nabum C’est Nabum 25 août 22:20

            @cevennevive

            Je me délecte de sa langue


          • Seth 25 août 15:11

            Il y a un autre truc rigolo en Français, c’est la liaison traître par le miracle de laquelle on relie deux mots par une lettre écrite mais non prononcé, notamment après un verbe conjugué.

            Ex : on était une bande. Prononciation dans l’absolu : on étai une bande ( le t final de la 3ème pers du singulier ne se prononçant pas, ex : on étai(t) là)) or non, c’est on étai tune bande.

            Essayez d’enseigner ça à des Anglais, ce que j’ai fait dans ma vie... Malheur ! smiley

            Ajoutez au ruban continu du Français parlé. Il n’existe pas d’accent tonique, hormis les accents dits « sémantiques » servant à insister sur le sens particulier d’un mot ou sur son importance sans rupture hors de la ponctuation. Le Français est dont une sorte de mot unique qu’il est très difficile de diviser pour le comprendre.

            Tout cela bien sûr en plus des fameux homonymes qui sont un calvaire pour les non-francophones.

            Et il y a encore bcp d’autres choses qui font de ce qui nous paraît simple un truc piégeux, dont notre incroyable concordance des temps.


            • cevennevive cevennevive 25 août 15:44

              @Seth, bonjour,
              Magnifique langue française !

              Et que pensez-vous de :

              « Gal, amant de la Reine, alla, tour magnanime,
              Galamment de l’Arêne à la Tour Magne à Nîmes »

              Allez dicter cela à un élève, si bon soit-il !


            • Seth 25 août 17:29

              @cevennevive

              Je ne me souvenais plus de ces vers, merci de nous les rappeler. C’est de Marc Monnier. On me les avait dictés dans ma jeunesse, mais on ne peut faire que des fautes dans un truc pareil qu’on ne comprend pas sans le lire.

              Dans un autre genre, Allais a écrit cette chute de sa Complainte Amoureuse :

              Fallait-il que je vous aimasse,
              Que vous me désespérassiez,
              Et qu’en vain je m’opiniâtrasse,
              Et que je vous idolâtrasse
              Pour que vous m’assassinassiez !

              Je l’avais entendu dit par François Seigner (Comédie Française). Avec un texte de Rictus, je ne me rappelle plus lequel mais je crois que c’était La Farandole des pauv’s P’tits fanfans morts. C’était magique. Le vrai théâtre, simple mais ultra-travaillé sans donner dans le Lucchini qui fait du Luchini aevec un voix dans le masque limitée et trop haute. En voilà un qui parle faux...

              J’ai travaillé le théâtre classique sans jamais en faire mon métier, je peux donc en juger : elle était étincelante. La manière dont elle maîtrisait sa voix, ses couleurs sous une remarquable simplicité, le ressenti qu’elle en donnait, c’était extraordi


              Et ceci que je crois avoir déjà cité ici : Maurice Donnay dans son Jeune Homme Triste  :

              Il était laid et maigrelet
              Ayant sucé le maigre lait
              D’une nourrice pessimiste
              Et c’était un nourrisson triste.

              Bon, j’arrête de blablater. smiley


            • C'est Nabum C’est Nabum 25 août 22:21

              @Seth

              La liaison se meurt et c’est fort dommage

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