Menhir pride pour la bande dessinée « Le Chant d’Excalibur »
Sur les espaces que le christianisme a déserté, repousse lentement un étrange paganisme. Retour du culte de la Déesse-Mère, retour de la pensée magique ("Par ma seule élection la croissance repartira", "Je porte un ruban rouge donc je lutte contre l’expansion du sida", "Faisons des fanfares pour libérer les otages", etc.), indistinction du genre humain et de l’animalité (négation de l’âme humaine, ou au contraire attribution d’une âme à tous les êtres vivants ?), trips végétariens en tous genres pour ne pas offenser Gaïa, explosion des croyances initiatiques et ésotériques, multiplication des actes de profanation antichrétienne revendiqués par un certain paganisme plus ou moins satanique, etc. ; bref, les signes de volonté d’extinction des valeurs chrétiennes sont nombreux et se retrouvent de plus en plus souvent sous la bannière païenne.
Par exemple, j’ai trouvé sur un présentoir une bande dessinée promotionnelle gratuite, Le Chant d’Excalibur. En réalité, il s’agit des quinze premières pages du cinquième album de la série, distribuées dans la rue pour faire connaître la BD et donner envie de lire la suite autant que les épisodes précédents. C’est une série humoristique, certes, mais certains détails ne me font pas vraiment rire, surtout quand ils s’accumulent...
Les héros de l’aventure sont Merlin (le fameux Merlin de la légende arthurienne) et Gwyned, jolie descendante de Galahad.
Page 3, introduction du récit : "En ces temps troublés, peu après l’an mil, la chrétienté avait progressivement affermi son étreinte sur toute l’Europe du Nord."
Sous-entendu : en l’an mil, après les paisibles et inoffensives dévastations barbares, le travail du christianisme sur la terre européenne est une obscure tyrannie qui s’étend comme un cancer (ou une sclérose, comme vous voulez).
Page 8, Merlin énumère avec fierté quelques-uns de ses hauts faits pour répondre aux reproches qu’on voudrait lui faire sur sa conduite : "Eh ! Doucement ! On a rendu vie à un dragon, retrouvé des licornes, réveillé un paquet de fées et de lutins, dézingué un pape, libéré un peuple oublié dans les montagnes... Encore deux ou trois bricoles et c’est bon."
Hop, distillons un peu d’anticléricalisme de bon aloi au milieu d’un bestiaire fantastique, ça passera inaperçu... Mort au pape, ça sonne bien et c’est fun. D’ailleurs je suis sûr que ce sont le pape et ses sbires qui ont génocidé les korrigans.
Page 10, une troupe de brutes épaisses pénètre de force chez un couple de petits vieux aussi paisibles qu’innocents. Celui qui défonce la porte est un type énorme qui a une tête de tueur alcoolique et une grande croix rouge sur sa tunique ; c’est un abbé (!). Il assomme la petite vieille contre la porte et maltraite le petit vieux. Il manie l’épée à merveille et est tout disposé à poursuivre le massacre quand nos héros interviennent. Celui qui emmène la sinistre troupe et trucide finalement le petit vieux comme un boucher est un "comte", et tous sont au service du "bon roi Gradlon" converti au christianisme.
On apprend page 15 qu’ils se sont déplacés après une délation calomnieuse qu’un brave moine a cautionné.
Voilà, en moins de quinze pages d’"humour décapant", le ton est donné : le christianisme est violent, mensonger, obscurantiste ; le paganisme est merveilleux, courageux, pacifique et éclairé...
Pour mieux enfoncer le clou (le message n’était pas assez clair), une fois que vous arrivez à la fin de la page 15, l’extrait de l’aventure s’interrompt et vous tombez sur la quatrième de couverture qui vous vend les cinq tomes du Chant d’Excalibur. Je vous retranscris tel quel le petit texte qui cherche à vous les refourguer, c’est un manifeste au vocabulaire bien choisi qui se passe de commentaire :
"Ve siècle après le roi Arthur, Merlin se réveille (sic) d’un profond sommeil dans une Irlande dominée par la chrétienté. Entre quelques pintes de bière et avec l’aide de la tumultueuse Gwyned, à qui il confie la célèbre épée Excalibur, Merlin va devoir sauver le monde de la magie menacé par la nouvelle religion."
C’est aux éditions Soleil.
Addendum :
Sur le site web des éditions Soleil, on vous offre gratuitement la lecture des premières pages des albums en PDF. Dès les premières pages des aventures de Merlin et Gwyned, le christianisme y est textuellement défini comme une secte.
De l’heroïc fantasy amusante à l’anticléricalisme imbécile et calomnieux, il n’y a qu’un pas, franchi allègrement.
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