Passage de la butte, prochainement sur cet écran

(Olivier Bailly) Aujourd’hui jeudi, ne ratez pas le nouvel épisode de Passage de la butte. Ce n’est pas une contrepèterie, mais un feuilleton littéraire. Les feuilletons, ce n’est plus dans la presse qu’on les lit désormais, mais sur Internet, un lieu (ou un non lieu ?) parfaitement adapté aux histoires au long cours, mystérieuses et pleines de rebondissements.
Pour Hubert Calevas (un pseudo), une nouvelle vie commence. Depuis quelques semaines, il a plein de nouveaux amis grâce à internet. Pas parce qu’il s’est inscrit sur Facebook, mais parce que son feuilleton, Passage de la butte, attire de plus en plus de lecteurs.
Des lecteurs qu’il n’a pas été chercher loin. Tenez, prenez Roger C., un ancien de Montmartre qui lui a laissé ce commentaire sur son site : « Cher Hubert Calevas, Je viens vous exprimer le plaisir de découvrir l’érection de votre feuilleton. Quelle bonne idée ! C’est très sympa. Vous avez un lecteur conquis ! J’ai envoyé les coordonnées de votre blog à tous mes ex-amis du quartier, à mes condisciples du lycée Jacques Decour, en l’occurrence l’Association des Ancien Elèves, à pas mal de connaissances, ainsi qu’à des confrères. »
Voilà, écrivez donc vous aussi un feuilleton policier et un peu leste (comme on disait dans le temps), avec de la fesse et du mystère, un feuilleton qui sent le fait-divers et qui se déroule dans votre quartier, et vos voisins deviendront vos amis. La presse locale parlera de vous. Bref, vous aurez tout un tas de satisfactions, ce qui de nos jours n’est pas à négliger.
Passage de la butte est un feuilleton de proximité à vocation universelle. Et l’universel c’est le local moins les murs, disait le poète portugais Miguel Torga. Commencé en octobre 2008 cet opus virtuel est écrit. Il comportera 30 chapitres, plus de 90 épisodes et au moins 300 illustrations. Il est odnc publié au compte-gouttes chaque jeudi sur le site de Passage de la butte.
Hubert Calevas écrit depuis dix ans, mais n’a jamais été édité. Un gros roman somnole dans un tiroir qu’aucun éditeur n’a voulu publier. Hubert Calevas a soixante-sept ans. Ecrire est sa passion, mais pas la seule. C’est un passionné de rugby, mais aussi d’échecs, de poker, de tango, activités qui ne sont pas incompatibles avec le roman d’aventure ou, selon l’appellation actuelle, le polar. Mais ce que pratique Hubert Calevas avec Passage de la butte est un peu décalé par rapport à la définition admise du polar : « il y a des énigmes, un détective privé, des filatures, des coups de feu, des morts et des assassins, une organisation secrète… pourtant le qualificatif de polar ne me semble pas approprié.
Disons que la crédibilité de l’aspect polar s’efface devant la place donnée au fantastique et au réalisme poétique. C’est une sorte de Club des Cinq, plus du sexe, plus un souci de l’écriture. Ce n’est ni du feuilleton à l’ancienne (le feuilleton populaire est aujourd’hui à la télé), ni un livre pour amateur de littérature. C’est quelque chose d’intermédiaire avec des personnages d’esprit bande dessinée, pour une génération de lecteurs de BD que la lecture ne rebute pas. »
Consultant en organisation pendant quarante ans, il est à la retraite depuis deux ans. Ce qui laisse des loisirs, me direz-vous. En réalité, il en a toujours eu : « Etant free lance pendant 25 ans et fort bien rémunéré, je ne consacrais que 4 mois par an en moyenne au travail, gardant le restant pour m’occuper de mes enfants, flâner, peinturlurer, puis écrire ». Une riche et heureuse nature, donc.
Aujourd’hui, c’est comme si une nouvelle vie commençait avec ce roman feuilleton. Le format du web s’y prête : « je peux choisir librement le rythme de parution, la taille des épisodes (adaptée à une lecture sur écran), pas de logistique, des coûts de fabrication nuls, la couleur pour le même prix, la possibilité de changer le texte jusqu’au dernier moment et même revenir sur les épisodes déjà parus, la facilité des relations avec les lecteurs… ».
Au départ, pourtant, il envisage son projet « sous la forme d’un feuilleton à diffuser dans le quartier. Mon idée est alors de sortir des fascicules de 12 pages textes et dessins photocopiés et distribués dans les librairies du quartier. C’est sous cette forme que le roman a été déposé à SGDL.
Mais cette formule était lourde et coûteuse ; une logistique devait être mise en place ; les difficultés de composition texte et images, liées au carcan d’un chapitre pour douze pages étaient désespérantes. Avec l’informaticien du groupe nous avons organisé une sortie sur Internet qui semble aujourd’hui une solution évidente.
De fait, aujourd’hui Hubert Calevas voit mal « comment intéresser les maisons sérieuses avec ce « truc » assez difficile à définir. »
C’est précisément l’intérêt de l’objet, cette souplesse, cette « faculté », finalement de ne rentrer dans aucun moule. Même si le roman est écrit, qu’il a « ses événements forts, ses articulations, des séquences obligées » et qu’il ne reste plus à Hubert Calevas qu’à poster les épisodes semaines après semaines, l’auteur est ouvert à toute éventualité. L’histoire ne demande qu’à être un peu bousculée.
Cela pourrait devenir, pourquoi pas, un feuilleton participatif ? Pas si simple : « Au départ, je suis parti sur l’idée d’un roman photo dans la butte Montmartre avec une bande d’amis. Au repas collectif suivant j’ai proposé pour chacun un personnage plus ou moins déjanté. Ce fut l’enthousiasme. D’ailleurs dans leur définition générale, les personnages masculins sont restés proches des modèles du premier jour.
Nous avons commencé à scénariser et écrire, mais rapidement la difficulté d’une création collective a cassé l’élan. J’ai repris seul avec l’aide ponctuelle d’un membre du groupe. Mais sa profession, ses voyages et des difficultés personnelles ont mis fin à cette collaboration. »
La création, somme toute, est un acte solitaire. Ce qui ressort du participatif, du collectif, du réseau est sans doute de l’ordre de la création, mais a-t-elle à voir avec la création artistique ? « Je reste pourtant ouvert à l’interactif ou au participatif, même si je ne sais pas précisément ce qui est possible et comment cela fonctionnera : trouver des cartes postales plus adaptées, des vieilles photos de famille. Apporter une expertise sur l’histoire ou la topographie montmartroise, proposer des événements à introduire… »
Mais l’histoire ? Fiction, documentaire ? « Des personnages fictifs croisent des personnages historiques, et ce jusque dans le 19ème siècle. Les quelques lecteurs (des intimes) m’ont souvent demandé : mais ça, c’est vrai ou imaginaire. On retrouve cette ambiguïté dans les illustrations.
Des images anciennes jouxtant une scène de 1997, des images actuelles, des lieux et des visages traités à la palette graphique entre dessin et photographie. Bruant est présent bien sûr et Carco. Mais les quelques personnages réels qui traversent le récit sont plutôt des peintres paysagistes de Montmartre (Utrillo, Maclet, Leprin) non que mes goûts m’y portent, mais pour les besoins de l’intrigue ».
Et Dorgelès ? Et MacOrlan ? Et Bernard Dimey ? Et Monique Morelli ? Et Marcel Aymé ? Céline ? Robert Giraud ? On peut toujours espérer. Ceux-là sont du siècle n°20. Trop frais.
Aujourd’hui, alors que le projet est encore neuf, il est déjà bien reçu, est « ancré dans le quartier. Tout a commencé par des cascades de mails, des distributions de flyers dans les environs. L’intérêt manifesté par des associations ou la presse locale (Net et papier) a pris le relais. Le pot de lancement et son exposition ont déclenché un article dans le Parisien. Certaines images ont été mises dans des blogs privés avec un commentaire favorable.
12 jours après son démarrage et moins d’une semaine après le pot de lancement, il y a plus de 550 lecteurs purs et 110 abonnements. Il y a entre 30 et 50 nouveaux lecteurs par jours. Ne me demandez pas comment j’ai des lecteurs dans 22 pays, en Europe, au Brésil, en Australie, en Grande Bretagne … C’est la magie d’Internet ».
Ce qui excite Hubert Calevas dans cette aventure ? « Etre lu, tout simplement. Que l’on me dise le plaisir de m’avoir lu, d’avoir vu mes illustrations... de préférence par écrit, car je ne tiens pas à être joignable directement. A propos… Calevas est un pseudo. »
La suite, donc, au prochain numéro…
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