« Petit éloge de la nuit » Pierre Richard en céleste plénitude à La Scala
En reprenant ce spectacle initié par Ingrid Astier pour une création en 2017 avec résidence d’un mois au Théâtre du Rond-Point en salle Topor à moins de cent places et réussir aujourd’hui à séjourner quatre semaines à La Scala avec une jauge six fois plus importante, Pierre Richard confirme un véritable tournant dans sa carrière artistique.
Avec sa gueule de pâtre grecque buriné sous 85 ans d’âge, le comédien a désormais acquis une relative confiance dans sa nouvelle destinée, bien encouragée par des rencontres bénéfiques à ses multiples talents dont certains encore cachés au grand public.
Osera-t-il, en effet, dans quelque temps affronter le rôle du « Roi Lear » exhorté par Gérald Garutti non sans avoir mené auparavant à terme le projet enthousiasmant que lui prépare Mathilda May à la suite de son fameux « Banquet » consacré par deux récents Molières ?
Continuant d’effectuer ses déplacements urbains en moto et fort d’une forme physique fringante, le voici arpentant, dansant, virevoltant et même sautant sur et alentours de la vaste scène quadrilatère balisée en profondeur par un giga écran où sont projetées fantasmagories et autres songeries nocturnes concoctées selon des vidéos, films et autres scénographies illustrées de lumières oniriques ou stellaires.
De méditations embrumées en pensées utopiques, se décline l’univers de la nuit qu’une ivresse latente recompose à souhait selon les états d’âme de chaque instant conceptualisé par la réalisation de Garutti devenu en quelque sorte ce mentor garant de l’inter-connectivité entre les deux faces du Pierrot lunaire & solaire.
Ainsi, Ingrid Astier ayant suscité en 2015 la rencontre entre le metteur en scène Shakespearien et l’acteur « burlesque », le trio constitua d’emblée un triangle créatif que Pierre Richard qualifia d’isocèle.
A Ingrid, le soin d’imaginer et de concevoir leur triple approche autour de son abécédaire thématique noctambule (Folio/Gallimard), à Gérald, celui de réunir les pièces du puzzle littéraire, musical, cinématographique et surtout théâtral pour engendrer ce voyage élégiaque dédiée à la Nuit, à Pierre, de rendre accessible, transparent et disponible l’ensemble de ses dons artistiques pour une éclosion magistrale.
Alors appelant fort opportunément Poe, Baudelaire, Maupassant, Desnos, Miller, Neruda, Michaux, Kundera et consorts… à la rescousse des contemplations, sensations, rêveries et autres spleens engendrés par les sortilèges de l’obscurité vespérale et symbolisés avec grâce par la flânerie chorégraphique récurrente de la danseuse Marie-Agnès Gillot, voici qu’en point d’orgue va apparaître au final, pour une diffusion presque intégrale, la formidable chanson de Bashung « La nuit je mens » d’abord écoutée dans l’intimité d’un poste de radio portatif, amplifiée ensuite à l’ensemble du dispositif acoustique de la salle.
Pour célébrer ce moment divin quasi hors du temps réel, Pierre Richard prend place dans une alvéole échancrée en plein centre de la scène où il va pouvoir s’étendre « confortablement » dans une écoute délectable et jubilatoire… cigare et coupe de champagne à la main...
Oui ! Victor Hugo avait effectivement vu juste : « Le rêve est l’aquarium de la nuit ! ».
photos 1 & 4 © Cosimo Mirco Maglioca
photo 2 © Gérald Garutti
photo 3 © Pauline Maillet
photos 5 & 6 © Theothea.com
PETIT ELOGE DE LA NUIT - ***. Theothea.com - de Ingrid Astier - mise en scène Gérald Garutti - avec Pierre Richard - Théâtre La Scala
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