Remaniement : faut-il virer le soldat Nyssen ?
Un « like » de Françoise Nyssen sème le doute sur sa volonté de rester au sein du gouvernement : l'occasion de poser la question, faut-il virer le soldat Nyssen ?
La ministre de la Culture, Françoise Nyssen, a créé la surprise dimanche 7 octobre par une attention virtuelle qui pourrait être lourde de sens (pas si caché que ça). Se voit-elle déjà quitter le gouvernement et son poste rue de Valois ? C’est en tout cas ce que certains observateurs ont vu dans son « like » laissé sur une publication de l'écrivain et économiste Jacques Attali sut Twitter : « L'avenir d'un ministre, c'est d'être ancien ministre ».
Avec la démission de Gérard Collomb de son poste de ministère de l'Intérieur – un mois après le départ fracassant de Nicolas Hulot – l’exécutif va devoir procéder à un remaniement. Le gouvernement Philippe III est en effet attendu mardi 9 octobre, selon des sources à Matignon. Or, le Premier ministre semble pencher vers une réorganisation en profondeur afin de repartir sur de nouvelles bases après l’effondrement de la popularité du gouvernement et du président et ces deux départs douloureux.
Alors que la position de Françoise Nyssen au sein de l’équipe gouvernementale fragilisée par une enquête judiciaire autour de travaux réalisés illégaux au sein d’Actes Sud – la maison d'édition qu'elle co-dirigeait avant de devenir ministre – il pourrait s’agir d’une tentative d’ironiser sur son prochain départ. Reste à savoir si ce clic témoigne d’une pensée philosophique un peu générale ou s’il s’agit d’un commentaire sur un départ inévitable.
Un bilan mitigé
Le bilan de Françoise Nyssen au sein du ministre de la culture est, somme toute, mitigé. Si elle avait mis l’accent sur le développement de l'éducation artistique, mais celui-ci a été phagocyté par le ministre de l'Éducation, Jean-Michel Blanquer. Elle a également insisté sur l’ouverture de nouvelles bibliothèques, mais s’est fait encore une fois damer le pion – cette fois par le Président lui-même et son plan d'extension des horaires des bibliothèques, mis au point par Erik Orsenna.
A cela il faut ajouter la pluie de critiques qui s’est abattue sur sa réforme de l’audiovisuel public – largement entravée par les conseillers culture de l'Élysée (Claudia Ferrazzi) et de Matignon (Olivier Courson). Autre de ses grandes initiatives, le pass culture, censé faciliter l'accès des jeunes aux musées et cinémas mais aussi au jeux vidéo, a pris un retard considérable. En outre, la mesure coûteuse, au champ très vaste, divise encore les professionnels.
Mais si la ministre est aujourd’hui sur la sellette, c’est avant tout parce qu’elle aurait réalisé des constructions illégales à l’hôtel d’Aguesseau, en plein faubourg Saint-Germain, d’après le Canard enchainé. Si cette dernière plaide la négligence, il s’agit en réalité de la seconde affaire de ce type dont elle fait l’objet, après l’ouverture d’une instruction sur l’agrandissement sans autorisation du siège de son ancienne maison d’édition, à Arles. Beaucoup de négligence, donc.
Un contexte difficile
Si elle se trouve aujourd’hui dans une position délicate, il ressort toutefois que ce dont a avant tout souffert Mme Nyssen, c’est d’un manque de sens politique. Entre la récupération de ses projets par d’autres, des erreurs de positionnement et des failles de communication, la ministre n’est pas tant jugée sur la réalité de son action – et des obstacles contextuels qu’elle a rencontrés – mais davantage sur sa perception. Aussi faut-il noter que la plupart des difficultés de son bilan viennent avant tout du fait que le Président jupitérien – comprendre omniprésent – Emmanuel Macron, et plus largement le gouvernement, n'ont pas de politique culturelle claire. Aussi en a-t-elle fait les frais, étant systématiquement relayée au second plan en cas de conflits de vision.
Aujourd’hui, si elle semble en disgrâce à Matignon, Françoise Nyssen est encore largement appréciée par les professionnels du secteur – notamment grâce à sa lutte acharnée contre la dématérialisation du droit d’auteur et la part léonine que se taillaient les géants du numérique. Certains succès ressortent également, malgré une traversée pour le moins agitée : l’accord de l’Union européenne sur la réforme du droit d’auteur, qui crée un nouveau « droit voisin » pour les éditeurs de presse, le projet de soutien réussi au patrimoine grâce à un partenariat avec la Française des jeux, la création de crédits spéciaux pour soutenir la parité hommes-femmes au cinéma… Elle, en tout cas, croit en son bilan, et a jugé bon de na pas quitter le navire en même temps que ses deux anciens collaborateurs.
Pour l'instant ?
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