« Seuls Two », attention : nanar !

Difficile de sauver quelque chose de ce film. Seuls Two est un film plutôt affligeant, proche du nanar complet. On s’y ennuie terriblement, le scénario consiste, dans un Paris vide, en une course-poursuite interminable entre un petit flic (Gervais/Eric), idiot de service hyper-nerveux, et un petit malfrat (Curtis/Ramzy), cador déjanté. Alors, je suis un peu embêté car nos deux compères en pilotage automatique, Eric & Ramzy, me sont plutôt sympathiques au départ, des sortes de Tom & Jerry d’aujourd’hui, et j’avais beaucoup aimé leur film précédent, Steak (2007), ovni filmique signé Quentin Dupieux, mais, là, force est de constater que rien ne tient. Autant dans Steak, il y avait un travail de l’image passionnant (on lorgnait du côté des seventies et du cinéma américain des fifties) et un pitch tellement à l’ouest qu’on finissait par franchement se marrer, autant là, c’est la grosse cata, pas loin d’un degré zéro de l’écriture cinématographique. Ce qui se voudrait un délire visuel vertigineux (des cadres cartoonesques plus ou moins saugrenus) n’est pas du tout au niveau du chaos verbal pratiqué par nos deux larrons.
Dans Seuls Two, on a un humour moins potache que « beauf », se voulant peut-être à la mode « banlieues » (et encore, on demande à voir), et l’on assiste à une suite de saynètes qui sont drôles, question rendement zygomatique, disons, une fois sur quatre, c’est dire !, et l’image, trop surexposée, est laide la plupart du temps. Il n’y a aucun travail formel là-dedans (aucun gag visuel vraiment notoire) et le pari absurde d’un Paris vidé de ses habitants est à peine surprenant, ça se voudrait hénaurme, comme on dit dans la presse spécialisée dans le service après-vente, mais ça me fait davantage penser au Boulet (2002), qui portait bien son nom, et dont les distributeurs à l’époque de sa sortie, experts en marketing à la sauce Cauet & consorts, nous vendaient les mérites de la soi-disant scène hénaurme où l’on voyait
Je ne critique pas le jeu des acteurs : Eric&Ramzy sont fidèles à eux-mêmes, le premier jouant très bien le débile parano mou du bulbe et le deuxième, le kéké superstar, gosse de banlieue devenu gangster, fan de funk, de rap et de hip-hop. Tout cela est drôle 5 minutes, comme toutes les blagues plutôt politiquement correctes qui tournent autour des communautés et du métissage, style Gervais/Eric Judor criant devant le Tati désert de Barbès « Mais ils sont passés où tous les Arabes et les Noirs !? » ou définissant l’Hexagone comme étant « le pays de Danton, de Barbra Streisand et de Robespierre » ! Oui, c’est certainement dans ce je(u) sur les décalages et les différences de couleurs, de religions et de langages (Kristin Scott Thomas n’ayant guère à se forcer pour jouer la snob !) que ce film se montre parfois intéressant, voire attachant, on a quelquefois l’impression d’Indiens dans la ville, mi-Normands mi-Comanches (dixit Gervais), et ça marche assez bien, on rit de bon cœur et c’est Eric & Ramzy, au capital sympathie fort, alors, à deux ou trois exceptions près - j’ai vu 2 ou 3 personnes sortir du MK2 Nation -, on reste quand même dans la salle. Mais c’est bien court sur 1 h 34 d’un film qui n’en finit pas de finir.
Ce qui faisait la force de Steak, c’était sa radicalité, son less is more et son lo-fi assumés. Ici, Eric & Ramzy, craignant peut-être un second bide au box-office, habillent leur duo cocasse de tout un décorum dont on pourrait largement se passer : le Paris déserté façon Je suis une légende n’apporte pas grand-chose, les vedettes présentes (Scott Thomas, Omar & Fred, Baer, Magimel, Bouchez) ont, question jeu, trois fois rien à défendre et le côté bling-bling du film (c’est quand même un budget à 18 millions) n’emporte pas le morceau. On reste désespérément sur notre faim car le trop-plein du film, paradoxalement, nuit au patinage en roue libre de nos deux trublions du langage - eh oui on se contenterait aisément de leur mécanique langagière déréglée plaquée sur du vivant (jeux de mots absurdes, calembours, quiproquos gigognes, joutes verbales enfantines, dyslexie, arythmie, erreurs de prononciation, homosexualité refoulée) sans avoir à passer par tout un habillage visuel assez pauvre. N’est pas Jerry Lewis ou Charlie Chaplin qui veut, eh oui. La scène à
Le paradoxe de Seuls Two est certainement de ne pas avoir su trancher dans le lard : d’un côté, on essaie de créer une espèce de comique de proximité balourd, style fête de patronage (des adresses nombreuses aux spectateurs sur le mode « culture populaire commune » -
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