« The Artist », film de bon élève
![](http://www.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L300xH200/A_The_Artist-e5ea3.jpg)
Hollywood, 1927, on assiste à la chute d’Icare d’une star masculine du cinéma muet, George Valentin/Jean Dujardin, qui n’arrive pas à franchir le cap du parlant. Il sombre dans l’oubli. Seuls son dévoué majordome (bien campé par l’acteur américain James Cromwell) et une certaine Peppy Miller (charmante Berenice Bejo) ne le voient pas comme un has been à fuir au plus vite…
On croit rêver. On va voir en salle The Artist de Michel Hazanavicius (au cinéma depuis le 19 octobre), encensé par la plupart des critiques, et on découvre un film tout petit. Pourtant, la salle est pleine à craquer (UGC Ciné Cité Les Halles) et nombre de spectateurs applaudissent à la fin du film. Mais, au juste, qu’est-ce qu’on applaudit ici ? Jean Dujardin, la mignonnette Bérénice Bejo ou Bob de Niro sont avec nous dans la salle ? Que nenni ! Est-ce qu’on applaudit alors benoîtement le fait qu’il s’agisse d’un film récent muet, en noir et blanc, primé à Cannes et en route pour les Oscars ? Et alors ?
Quand on a ne serait-ce qu’une minuscule connaissance de l’histoire du 7e art, on sait que le noir et blanc est loin d’être une audace artistique contemporaine (Godard, Lynch, Jarmusch, Burton, Coppola et autres Coen, même Besson !, sont déjà passés par là) et que le muet est également revisité de temps en temps dans les salles obscures ; à commencer par Philippe Garrel et ses fulgurants Amants réguliers (2005) et Frontière de l’aube (2008). Mais il y a mille fois plus de références au muet (attention poétique portée aux visages, aux yeux, noir et blanc neigeux, son coupé, notes de piano minimales) dans n’importe quel Garrel que dans The Artist qui lui est pourtant entièrement consacré, incroyable ! Vous me direz - « Garrel ne signe pas de comédies, Hazanavicius, si ». Pas faux. Pour autant, le rire n’exclue pas la profondeur : revoir les tragicomiques Charlie Chaplin et Buster Keaton pour s’en convaincre. The Artist semble réduire le muet à une soupe à la grimace, à un humour BD, voire publicitaire - cf. les blagues à répétition avec le clébard -, et à un scénario des plus basiques : une amourette hollywoodienne sur fond de Plus dure sera la chute.
Certes, avec pertinence, Hazanavicius situe son film en 1927, date de sortie du 1er long métrage parlant (Le Chanteur de jazz), mais quand on sait que cette même année sont sortis au cinéma des films puissants et complexes, tant narrativement que plastiquement, tels Metropolis, L’Aurore, Le Mécano de
Je n’ai absolument rien contre les œuvres de seconde main réalisées par des fous de cinéma, ou « cinéastes citationnels » façon Allen, Burton ou Tarantino mais, justement, quand on s’attaque à du gros calibre (l’histoire du cinéma :
* C’est selon moi le meilleur de The Artist. On pense à Méliès, à Feuillade, à Cocteau, à Magritte. C’est beau et subtil, là Hazanavicius est au plus près de son sujet : dire la présence d'un corps à l'écran par son absence manifeste ; la suggestion l'emportant sur la monstration.
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