Tonton Fernand Raynaud
« Il y a la rue de l'égalité, mais c'est une impasse ! » (Fernand Raynaud, "Le brassard").
Un simple accident de voiture, un bête accident de voiture lors d'un trajet le menant à sa ville natale, Clermont-Ferrand, cité de Michelin dont avait été employé son père. Il y a exactement cinquante ans, le 28 septembre 1973, l'humoriste Fernand Raynaud est mort écrasé contre le mur d'un cimetière (de Cheix-sur-Morge, dans le Puy-de-Dôme), en guise de pirouette pour quitter la scène. Il voulait l'annoncer (de manière un peu plus "calme") car il voulait se focaliser sur une carrière au cinéma.
Il conduisait sa Rolls-Royce, qu'il n'appréciait pas car elle n'était pas très stable, parce que sa Citroën SM venait d'être volée. Par chance, son fils adolescent devait l'accompagner mais ce ne fut pas le cas. Il avait 47 ans, et finalement, il aurait pu être notre contemporain, sans cet accident, le 16 mai dernier, il aurait pu fêter paisiblement son 97e anniversaire dans une maison de retraite. À cette époque, on mourait beaucoup sur la route avec une mortalité au sommet (16 000 morts par an). Mourir d'un accident de la route semble aussi être un risque d'humoriste ; un autre quadragénaire, Coluche, a pris hélas le même chemin un peu moins de treize ans plus tard.
Fernand Raynaud n'était donc pas un artiste plus âgé que d'autres... contemporains (comme Marcel Zanini ou encore ses deux témoins de mariage, les compères Roger Pierre et Jean-Marc Thibault), il était un humoriste populaire très apprécié à la voix très posée (lorsqu'il interprétait un homme de l'ordre, son autorité était immédiate et crédible), il jouait dans ses nombreux sketchs des personnages sans âge, faisant référence parfois à sa sœur, ou à d'autres éléments de récurrence.
Il a inondé la France de son humour durant les années 1950 et 1960, il a aussi été comédien, jusqu'à jouer des pièces classiques comme "Don Juan" ou "Le Bourgeois gentilhomme" (en 1962), ainsi que dans des films au cinéma en reprenant généralement ses personnages de sketchs. Il semblait vouloir se consacrer au cinéma plus sérieusement, en abandonnant la scène, quand son accident est survenu.
Fernand Raynaud a inspiré plusieurs comédiens, comme Michel Serrault pour le ton des hommes lâches et faibles (à la voix vaguement chevrotante), aussi Jean Rochefort, et il a surtout imprimé dans la mémoire collective de nombreuses phrases "culte" comme "Y a comme un défaut" (dit au tailleur), "Ça eu payé" (le paysan en parlant du blé), "C'est étudié pour" (le père à son gamin trop curieux), "C'est le plombier" (une histoire de perroquet et de baignoire qui fuit), "Allo ! Tonton ? Pourquoi tu tousses ?", etc.
Au-delà du talent de scène (gestuel, diction), Fernand Raynaud faisait preuve d'un grand sens de l'observation de la société française (le principe du caricaturiste) et d'un grand don de créativité (j'ai évoqué dans la phrase précédente le perroquet et la baignoire qui fuit, mais on peut aussi parler de l'éléphant qui s'est assis sur la 2 CV rouge de sa sœur avant d'aller paître, etc.
Peut-être que le ton chevrotant de Fernand Raynaud, laissant croire qu'il est un ivrogne permanent, comme Bourvil avec l'eau ferrugineuse ou Jean Lefebvre dans de nombreux films, passerait beaucoup moins bien aujourd'hui, car l'alcoolisme est une plaie, une maladie et un facteur de mortalité très important (et pas seulement sur la route), mais à part cet aspect, ses sketchs passent bien, ont bien vieilli, malgré l'évolution rapide de la société et de la technologie, parce qu'il était un moderne. On rappellera aussi que le niveau scolaire qui baissait, c'était une donnée inhérente à la critique populaire de l'éducation nationale depuis plus d'un siècle, et qu'on retrouve dans un détour de phrase de Fernand Raynaud qui fait dire par un enfant de 9 ans dans son sketch "C'est étudié pour" : « Avec la nouvelle instruction scolaire, je ne sais pas grand-chose ! ». Rien de nouveau, donc, dans ce genre de critique...
Grâce à Internet, on peut retrouver ses nombreux sketchs, et j'en propose quelques-uns ici, on savourera notamment le premier extrait proposé, qui date de 1955 où Fernand Raynaud (à 29 ans donc), jeune débutant, saoule de sa verve un marchand d'équipements sportifs jusqu'à lui susurrer, mal, sa (fameuse) blague du 22 à Asnières.
1. "Attention, v'la Fernand" (1955)
2. "Allo Tonton ?"
3. "Le plombier", "Le tailleur", "C'est étudié pour", "Le 22 à Asnières", "Les croissants"
4. "Le raciste"
5. "Le rendez-vous"
6. "Un mariage en grandes pompes"
7. "Repas de noces"
8. "Les gens sont méchants"
9. "La chatte de ma sœur"
10. "La 2 CV de ma sœur"
11. "La prévention routière"
12. "L'augmentation"
13. "Heureux"
14. "Ne me parle pas de Grenoble"
15. "Restons français"
16. "Le président"
17. "Le paysan"
18. "Au régiment"
19. "Le brassard"
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (23 septembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Fernand Raynaud.
Hubert Deschamps.
Marcel Zanini.
Roger Pierre.
Jean-Marc Thibault.
Stéphane Collaro.
Claude Piéplu.
Jacques Rouxel.
Les Shadoks.
Richard Gotainer.
Gotlib.
Philippe Bouvard.
Laurent Ruquier.
François Cavanna.
Pierre Palmade.
À votre écoute coûte que coûte !
Dieudonné.
Patrick Bouchitey.
Laurent Gerra.
Jacques Tati.
Charlie Chaplin.
Jean Roucas.
Jean Bertho.
Thierry Le Luron.
Jean Amadou.
Frédéric Fromet.
Daniel Prévost.
Coluche.
Sim.
Élie Kakou.
Pierre Desproges.
Pierre Dac.
20 réactions à cet article
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C’est aussi instructif qu’un article de Rosemar, mais c’est mieux écrit.
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Bonjour, Sylvain
Hommage mérité à un humoriste de talent.
Dommage que, lui, l’observateur de la société et des travers de ses semblables, n’ait pas porté un regard sur lui-même, ou plutôt sur cette Rolls Royce qu’il n’aimait pas mais qu’il possédait pourtant car elle constituait un évident signe extérieur de sa « réussite ». Ce qui dénotait de sa part un orgueil en contradiction avec la modestie de la plupart de ses personnages.
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@Fergus
Tout le monde a ses contradictions, à moins que ce ne fut de l’auto-dérision... -
@Fergus
Dommage que, lui, l’observateur de la société et des travers de ses semblables, n’ait pas porté un regard sur lui-même, ou plutôt sur cette Rolls Royce qu’il n’aimait pas mais qu’il possédait pourtant car elle constituait un évident signe extérieur de sa « réussite ».
Cela devient dramatique de vous voir patauger de cette manière dans une vision caricaturale du nanti !!!
Allons, Fernand Raynaud était un artiste qui faisait de la scène, beaucoup de scène, des spectacles dans les grandes villes et aussi dans les sous-préfectures, et cela à un rythme effrayant, du jour au lendemain dans des salles éloignées À cette époque, l’avion ne desservait que très rarement la province, et toujours en provenance de Paris. Les trains ont toujours été limités dans les relations transversales qui ne passaient pas par Paris. La voiture était le seul moyen le plus souple et le plus commode. Tous les artistes, oui, tous ceux qui se produisaient dans des galas, utilisaient des voitures.
Fernand Raynaud, par ce moyen de transport, évitait les tracas liés à sa notoriété et surement appréciait le confort lors de ces longs voyages nocturnes.
Ce qui dénotait de sa part un orgueil en contradiction avec la modestie de la plupart de ses personnages.
Je me demande si vous faites un concours de bêtise avec Sandrine Rousseau, Ce n’est même pas à ce niveau écolo-bobo affligeant, vous vous rendez compte ?
PS : Il possédait aussi une Citroën SM réputée pour son confort.
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@Fergus
Ben oui, il possédait une Rolls comme d’autres possèdent un Rollex (avant 50 ans).
Si jeune, j’avais eu l’argent, j’aurais acheté non une Rolls mais une Jaguar E.
Sui-je orgueilleux ? Ben non.
Que peut-on dire de votre présentation ?
J’aime bien votre inventaire à la Prévert.
Ca représente quoi ? De la modestie ?
FergusAutodidacte retraité au terme d’une carrière qui m’a vu exercer des métiers très différents allant d’informaticien à responsable de formation, je vis à Dinan (Côtes d’Armor). Depuis toujours, je suis un observateur (et de temps à autre un modeste acteur) de la vie politique et sociale de mon pays. Je n’ai toutefois jamais appartenu à une quelconque chapelle politique ou syndicale, préférant le rôle d’électron libre. Ancien membre d’Amnesty International. Sur le plan sportif, j’ai encadré durant de longues années des jeunes footballeurs en région parisienne. Grand amateur de randonnée pédestre, et occasionnellement de ski (fond et alpin), j’ai également pratiqué le football durant... 32 ans au poste de gardien de but. J’aime la lecture et j’écoute chaque jour au moins une heure de musique, avec une prédilection pour le classique. Peintre amateur occasionnel, j’ai moi-même réalisé mon avatar. -
Bonjour, Aristide
Houla ! Mon commentaire était plutôt amusé. Ce qui démontre que l’absence d’émoticône est préjudiciable à la compréhension de personnes comme vous, tellement promptes à cibler les autres intervenants !
« Fernand Raynaud, par ce moyen de transport, évitait les tracas liés à sa notoriété et surement appréciait le confort lors de ces longs voyages nocturnes. »
A ce détail près que, comme l’a écrit l’auteur, il préférait de très loin utiliser sa Citroën SM !
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@Fergus
Il me semble que Philippe Bouvard possède plusieurs voitures mais n’a pas le permis de conduire ! Orgueilleux ?
Quand on a les moyens, on se paie ce qui nous fait plaisir ! Voilà.
Naturellement, on peut également donner de l’argent pour aider les Ukroniens ! -
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@Fergus
T’imagine vraiment pas combien sont morts en se faisant sucer le braquemart !!! exactement deux secondes après l’éjaculation selon mes sources
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@Fergus
Vous n’assumez jamais, cela devient grave !!!
Vous avez écrit : « Ce qui dénotait de sa part un orgueil en contradiction avec la modestie de la plupart de ses personnages. ».
C’est de l’humour ? Affligeant !!! Vous écrivez des bêtises, assumez un peu ...
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Bonjour, Aristide
Oui, je confirme que c’était un regard amusé sur l’une de ces contradictions comme nous avons tous. Mais peut-être pas vous ?
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Je vais m’appliquer sur les émoticônes à votre intention.
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@Fergus
Votre insoumission ne vous arrange pas !!! Vous pouvez dire des bêtises, assumez c’est simple ....
Pour les contradictions, j’essaie le mieux possible d’éviter cet écueil qui transforme un retraité de la RATP en révolutionnaire de salon.
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@ Aristide
Vous êtes décidément impayable : je n’ai pas à assumer ce qui relève d’une interprétation erronée de votre part !!!
Et ne je ne suis en aucun cas un « révolutionnaire de salon », n’ayant jamais été partisan d’une révolution dont on ne sait pas sur quoi elle pourrait déboucher.
Là encore, vous prêtez aux autres des intentions qui ne sont pas les leurs ! Une manie chez vous. -
@aux criticailleurs compulsifs
Il possédait une Rolls ? Et alors ? Il ne cherchait pas à escroquer le public pour s’en payer d’autres, il offrait du rire et de la bonne humeur et méritait largement sa réussite .
Personne n’a jamais obligé le public à payer pour aller le voir sur scène, contrairement aux margoulins qui ont fourgué, par la contrainte et les mensonges, leurs saloperies d’injections aux plus crédules, et qui eux, ont probablement plus qu’une simple Rolls...Plaçons le mépris là où il doit réellement l’être .
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@Fergus
De votre vote à deux reprises pour Mélenchon : voilà ce qu’il dit : « seule l’action révolutionnaire et subversive, qui assure la rupture avec le capitalisme, peut nous permettre de tirer l’humanité de l’impasse ».
Vous n’assumez aucun de vos propos, vous êtes insoumis mais, vous etes pour la justice mais, ....
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Il semble que, comme tous les comiques, dans la vraie vie, ce n’était pas un marrant.
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@Clocel
C’est vrai. J’ai connu un serveur d’un grand restaurant de Verdun. Car de son temps ni autoroute, ni TGV, ni avion. Il devait faire étape. Eh bien paraît qu’il était très exigeant.
Mais on ne vivait pas avec. L’important,c’était ses sketches.
Je l’ai vu lorsqu’il a fait sa tournée de France, en deuxième partie, avec le cirque Pinder. Super ! -
@troletbuse
Hébé, ça ne nous rajeunit pas tout ça !
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