Traité du combat moderne
La Bombe, film majeur de Peter Watkins, est rediffusé sur Arte le 17 mai à 2h. Ce film réalisé en 1965, rarement programmé, a été censuré pendant vingt ans et « montre » les effets d’une attaque nucléaire. A ne pas manquer.
Traité du combat moderne ou La Bombe, de Peter Watkins (rediffusion sur Arte le 17 mai 2006 à 2h).
Emprunté à Jordi Vidal, ce titre consacré à Stanley Kubrick (Traité du combat moderne - films et fictions de Stanley Kubrick, éditions Allia, 2005) s’applique à l’œuvre de Peter Watkins dont La Bombe, réalisé en 1965. Ce faux documentaire réalisé à base d’études sur les bombardements de Dresde, Hiroshima et Nagasaki, montre les effets d’une attaque nucléaire sur l’Angleterre.
Jordi Vidal écrit, sur le site co-errances (http://www.co-errances.org), dans un article intitulé "Peter Watkins : la danse de la vie" : « Le pouvoir de subversion de son écriture cinématographique, tant par son propos que par sa forme, est précisément ce que le système médiatique ne peut tolérer. [...] Si, poussé par le mouvement général de contestation de l’époque, le cinéaste a reçu, en 1966, l’oscar® du meilleur documentaire pour un film de fiction, La Bombe a pourtant été mondialement interdit d’antenne pendant vingt ans. [...] Les consommateurs passifs de cinéma et de télévision sont bien incapables de reconnaître les signes de leur propre aliénation lorsqu’elle est mise en scène sous leurs yeux : ils ne possèdent plus les outils de décryptage. »
J’ai découvert ce film de Peter Watkins (ainsi que Punishment Park) au Festival international de La Rochelle dans une salle comble non climatisée en juillet 2004. Une rétrospective lui était consacrée. Ce film court, réalisé comme un documentaire, ce qu’il est et n’est pas, va là où le cinéma ne va jamais, au cœur de l’enfer et du mensonge, dont la puissance conjuguée se répand en cercles concentriques. Si nous ne le savions déjà, ce sera chose faite de constater la réalité de notre conscience destructrice. Le film a saisi la salle, tétanisé le public.
1965. Année de réalisation. 41 ans plus tard, rien n’a changé (pas plus que pour Punishment Park, film éternel) ni ne viendrait confirmer Peter Watkins.
Pour citer encore Jordi Vidal, extrait du Traité du combat moderne - films et fictions de Stanley Kubrick, sans avoir besoin d’ajouter autre chose -sinon qu’il ne faut pas manquer ce film exceptionnel - il écrit : « J’admire Peter Watkins au point de ne supporter ni les critiques ni les éloges qui lui sont destinés, les considérant toujours en dessous de l’œuvre. Un cinéaste qui a réalisé La Bombe, Punishment Park et Edward Munch : la danse de la vie est au dessus de toute critique. Avec lui, la suspicion légitime sur ce qui nous est dit et montré quotidiennement par les médias est devenue objet de film. Ne différenciant plus, dans un souci d’analyse historique, le documentaire de la fiction, Watkins est parvenu à contester les conditions mêmes de l’analyse contemporaine. C’est le premier cinéaste, dans La Bombe et Punishment Park, à avoir entretenu la confusion entre reportage et fiction au point d’amener le spectateur à douter du film qui lui est projeté, pour aussitôt suspecter tout ce qu’on tente ordinairement de lui montrer. En confondant le vrai et le faux, Watkins nous a enseigné la méfiance et, peut-être, l’esprit de discernement. La répétition de fausses interviews, la présence d’observateurs apparemment étrangers à l’action dirigent notre regard puis notre réflexion vers la contestation de notre subordination aux médias. En falsifiant son médium, en recourant aux méthodes de l’aliénation télévisuelle courante, en confondant la réalité et le discours tenu sur la réalité, le cinéaste a mis en doute le principe même de la communication télévisuelle. »
Luc Brou (Caen)
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