« Un cadeau particulier » au Funambule avec Didier Caron en prestidigitateur démiurge
Emballé en 2020, ce « cadeau » bénéficie d’une pleine reprise estivale au Funambule selon l’alternance de chacun des trois rôles aux rangs desquels l’auteur contribue à générer une situation relationnelle sociétale dont il rend compte par l’écriture et qu’il lui faut donc également assumer sur scène en défendant avec conviction son personnage.
Pas nécessairement aisé effectivement d’accepter l’image par laquelle les autres voire les proches vous perçoivent alors que le moi idéal encaisserait une dévalorisation manifeste dans sa confrontation avec le constat peu reluisant des tiers.
Mais comment savoir, même du point de vue de l’observateur extérieur, qui aurait réellement légitimité pour établir un diagnostic des qualités et défauts de chacun, lorsque trois amis dont une femme seraient incités par les événements à dresser le portrait intime des deux autres comme dans un remake du jeu de la vérité ?
Qui pourrait prétendre à être suffisamment lucide avec lui-même tout en ayant une approche objective de ses partenaires pour parvenir à dresser une carte du tendre conforme avec les aspirations forcément subjectives des trois autres protagonistes ?
Ce tour de force mentale, c’est nécessairement l’auteur qui en est le maître incontesté puisqu’il tient les cartes du jeu et surtout les rebondissements qu’il intégrera si possible à bon escient.
Cependant, pour que la tragi-comédie fonctionne à plein sur l’imaginaire du public, il faut que la crédibilité des affects soit non seulement pertinente avec l’époque en cours mais également sincère avec le caractère de chacun en rendant plausibles les états d’âme, les sautes d’humeur, les revirements, voire les colères difficilement maîtrisables…
Ainsi pour éviter toute susceptibilité, il serait plus confortable à l’occasion de l’anniversaire de l’un d’entre eux de se contenter d’un cadeau traditionnel sympathique de façon à susciter essentiellement la bonne humeur.
Adopter une attitude inverse en recherchant la provocation induite pourrait en effet déclencher des cataclysmes en série sans que personne ne sache vraiment comment mettre un terme à ces réactions en chaîne, forcément drôles pour le spectateur mais quasiment diaboliques pour les comédiens.
Il faut dire que le cadeau choisi par Didier Caron sent particulièrement le souffre mais, néanmoins, son niveau de « respectabilité » est maintenu par la notion socioculturelle et dialectique qui est immanquablement soulevée lorsque d’aucuns sont appelés à donner leur avis dûment argumenté à ce sujet.
Le piège est donc parfait pour introduire la situation psychologique d’un couple fêtant le cinquantenaire d’un ami et associé intime…. en acceptant de se projeter en aveugle sans savoir si ce sera aux dépens ou aux intérêts de l’un et les autres !
Cependant le suspens ne perdurera guère car, paradoxalement, ce cadeau sera très rapidement ouvert et dévoilé sur scène bien qu’au final une alternative à son contenu fût-ce virtuellement proposée… option qui, en définitive, ne ferait que repousser d’une année supplémentaire les sévères explications qui ont eu lieu pendant cette soirée où le coq au vin aura été cramé et la charlotte au chocolat abandonnée au profit des seules coupes de champagne fédérant en permanence les prolongations d’une situation affective se devant inévitablement d’exploser au regard et à l’entendement de cette famille qui, dans son genre spécifique, accèdera ainsi à la notion contemporaine de « recomposée ».
Aucun critique ou commentateur n’ose de fait « divulgâcher » l’objet du délit et c’est très bien ainsi car, on l’aura compris, ce « cadeau » n’est autre que l’arbre qui cache la forêt des sentiments convoqués à fleur de peau par Didier Caron pour affronter le regain d’amitié et d’amour escompté à l’égard d’un avenir si possible prometteur.
photos 1 à 4 © Franck Harscouet
photos 5 & 6 © Theothea.com
UN CADEAU PARTICULIER - ***. Theothea.com - de Didier Caron - mise en scène Didier Caron & Karina Marimon - avec Karina Marimon ou Bénédicte Bailby, Christian Mulot ou Didier Caron, Pierre-Jean Cherer ou Christophe Corsand - Théâtre Le Funambule
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