Un défi : le cri baudelairien mis en musique...
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Trois chorales réunies autour d'un pianiste et chanteur pour interpréter des poèmes des Fleurs du mal, voilà un spectacle original, comme on en voit peu, de nos jours...
Le chanteur Théophile Minuit a composé toutes les musiques pour adapter et mettre en scène les textes du poète maudit, on peut parler d'un véritable défi, quand on connaît la difficulté de la tâche : mettre en musique des poèmes célèbres...
Le musicien et la chorale se répondent en un jeu subtil de reprises, de relances pour mieux mettre en valeur les poèmes.
Le récital s'ouvre sur des extraits du poème, intitulé Les phares, un hommage aux grands peintres, Rubens, Léonard de Vinci, Rembrandt, Michel Ange... L'oeuvre d'art est associée aux thèmes du déchirement et de la souffrance : on entend un cri qui fait frissonner.
Au passage, on reconnaît, ensuite, des poèmes et des vers célèbres de ce grand poète du 19 ème siècle...
"J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans.."
"Sois sage, o ma douleur, et tiens toi plus tranquillle, Tu réclamais le soir, il descend, le voici.."
"Mon enfant, ma soeur, Songe à la douceur d'aller là-bas..."
On est sensible à ces thèmes égrenés par Baudelaire dans son oeuvre : le Spleen, ce mal de vivre douloureux et lancinant qui assaille le poète, les rêves de voyage qui permettent d'échapper à la monotonie du monde.
La présence de la femme qui vient apaiser ou tourmenter le poète est évoquée, aussi, dans de nombreux textes : la mendiante rousse dont le poète révèle toute la beauté, ou encore la femme madone, magnifiée....
"Les yeux fixés sur moi, comme un tigre dompté,
D'un air vague et rêveur elle essayait des poses,
Et la candeur unie à la lubricité
Donnait un charme neuf à ses métamorphoses ;"
"Blanche fille aux cheveux roux,
Dont la robe par ses trous
Laisse voir la pauvreté
Et la beauté..."
"Je veux bâtir pour toi, Madone, ma maîtresse,
Un autel souterrain au fond de ma détresse,
Et creuser dans le coin le plus noir de mon coeur,
Loin du désir mondain et du regard moqueur,
Une niche, d'azur et d'or tout émaillée..."
Les parfums, si importants dans la poésie baudelairienne, sont, aussi, mis en scène de façon à mettre en valeur leurs épanchements qui se répandent et se déploient : les reprises de la chorale se font, alors, insinuantes et insistantes... "Chaque fleur s'évapore, ainsi qu'un encensoir... Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir ! Langoureux vertige ! Langoureux vertige !"
Baudelaire est un des premiers poètes à avoir, ainsi, mis les parfums à l'honneur dans son oeuvre, la sensation olfactive, jusque-là, méprisée par nombre de poètes, jugée trop animale trouvait, enfin, sa place dans la production littéraire française.
Le récital s'achève sur le poème L'albatros, qui représente le poète lui-même, maudit par la foule, méprisé souvent, alors qu'il règne en souverain dans le ciel, où il atteint, grâce à son art, des sommets de pureté, de finesse et d'harmonie...
L'harmonie ! C'est bien le maître mot de la poésie baudelairienne, que l'on trouve résumé dans ce vers célèbre extrait du sonnet intitulé Correspondances : "Les parfums, les couleurs et les sons se répondent... "
L'harmonie et le cri déchirant d'un poète exilé sur la terre, c'est aussi ce qui ressort de ce spectacle... une alternance émouvante où l'on sent la détresse humaine et une soif d'évasion et de pureté, une envie d'absolu.
Après un rappel, on entend encore un dernier poème : "Oh mort vieux capitaine, il est temps, levons l'ancre", ultime cri de désespoir d'un poète déchiré et meurtri.
On prend conscience, au cours du spectacle, de tout le travail de synchronisation de la chorale et du soliste. On perçoit la force des gestes des chefs de choeur qui mènent le groupe et créent un ensemble harmonieux.
Il faut saluer, aussi, tout le talent du soliste qui tient le spectacle à bout de bras, l'anime de son piano et de sa voix.
Au cours de ce spectacle, les chorales Aureto de Poulx, Voix d’Argence de Jonquières-Saint-Vincent et Rap’s Ody Swing de Redessan ont uni leurs chœurs avec beaucoup d’enthousiasme, d’émotion et de complicité...
Bravo aux deux chefs de choeurs Nathalie Martinez et Cécile Veyrat.
Le blog :
http://rosemar.over-blog.com/2015/08/un-defi-le-cri-baudelairien-mis-en-musique.html
Documents joints à cet article
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