Un grand parmi les géants
La bande dessinée est riche en célébrités, et d’Hergé, à Franquin, en passant par Morris, ou Uderzo, ils sont nombreux à avoir fait légitimement l’unanimité autour d’eux... pourtant il en est un qui mériterait mieux que l’attention timide du public.
Peyo, c’est son nom, et il doit ce pseudo étrange à son petit neveu qui, n’arrivant pas à articuler son prénom, Pierrot, ayant des difficultés manifestes à prononcer les « r », l’appelait « Péyo »...
De son vrai nom, Pierre Culliford, est né à Bruxelles, d’un père anglais, et d’une mère belge... et ses meilleurs amis s’appelaient Franquin et Morris.
L’une des particularités de ce grand artiste est d’avoir négligé, la plupart du temps, de donner un rôle important aux animaux qui accompagnaient ses héros.
Ainsi, alors que Tintin semble inséparable de son Milou, que Lucky Luke ne serait rien sans Jolly Jumper, que Spirou ou Fantasio seraient des orphelins inconsolables sans leur marsupilami, et leur Spip, un petit écureuil, ou que même Astérix, et son complice Obélix sont toujours, ou presque, accompagnés du petit chien Idéfix, les héros de Peyo n’ont pas d’animaux de compagnie notoires...
Certes Johan a bien un cheval, mais on ne connait pas son nom, et seul son ami, un lutin fantasque, a comme monture une chèvre noire et hargneuse portant le joli nom de Biquette.
Autre particularité, et pas la moindre, Peyo a une affection incontournable pour les petits, voire les nains, les lutins, les gnomes...aux dépens des géants, et autres grandes brutes.
Ainsi son espiègle Pirlouit triomphe facilement d’un géant décidé à ne pas leur laisser l’accès à « la source des Dieux »...
A noter que les collectionneurs ne s’y sont pas trompés, et l’un de ses albums, « la pierre de lune », quasi introuvable en édition originale, atteint des sommets...aux alentours de 1500 € lorsqu’il est en bon état. lien
Un autre, « la flèche noire », s’est vendu aux enchères 6719 €... lien
Et dernière grande différence, Peyo n’est pas le créateur d’un seul héros...
Il est le père de Johan, lequel sera bientôt affublé d’un lutin, farfelu, goinfre et intelligent, Pirlouit... qui devra son nom au cri qu’il pousse pour paniquer la populace.
Et puis, il invente les schtroumpfs, petits hommes bleus, hauts comme 3 pommes et pesant, d’après l’auteur, 100 grammes : l’artiste assure qu’il doit le nom de ses personnages à son ami Franquin, avec qui, il partageait des vacances...
Alors qu’ils étaient à table, Franquin, désignant la salière, son nom ne lui venant pas à son esprit, lui aurait demandé : « passe-moi la Schtroumpf »...
A noter que Peyo avait fait d’abord de Johan un blond, avant de le changer en brun, faisant l’inverse avec la Schtroumpfette, qui au départ était brune...semant le désarroi et la passion dans les rangs des schtroumpfs, qui malgré leur âge avancé, centenaires pour la plupart, n’avaient pas perdu leur vigueur amoureuse...
En effet, le temps ne semble pas avoir prise sur ces petits hommes bleus, leur patriarche avouant 542 ans...lien
Mais Peyo est aussi le père de Benoit Brisefer, un minuscule garçonnet, doté d’un ridicule béret noir et d’une force extraordinaire : il est en effet capable de soulever un éléphant, d’arrêter une locomotive folle, de rattraper à la course une voiture de sport, d’éteindre un incendie d’un seul souffle, voire même de dresser la bâche d’un cirque d’un seul coup.
N’oublions pas dans ses enfants de BD, Jacky et Célestin, mais aussi les aventures d’un petit chat Poussy...lesquels ont eu une existence moins prolixe.
Ajoutons pour la bonne bouche qu’il a mis le pied à l’étrier à de nombreux artistes qui allaient faire bientôt parler d’eux, comme Walthéry, le créateur de la petite hôtesse de l’air, la pulpeuse Natacha, mais aussi de Derib, père de Yakari, et de quelques autres...
Mais finalement, l’intérêt que l’on pourrait porter à « Peyo », n’est-il pas d’un autre domaine ?
Car face aux vedettes, ce Tintin, scout irréprochable, qui finit toujours par triompher, ou ce Spirou, propre sur lui, qui gagne toujours, ou même notre cher Lucky, abandonnant la cigarette ... et l’alcool... pour une boisson discutable (et dangereuse. ndlr) ...histoire de se ranger des meubles, les héros de Peyo ne sont-ils pas plus proches de nous ?
Ce goinfre de Pirlouit, ces lutins bleus, infatigables taquins, ce petit Benoit, dont personne ne veut constater la force phénoménale, ne sont-ils pas l’image d’un monde plus proche de nous, plus réaliste ?
Le 24 décembre, date de sa disparition, Pierrot Culliford aurait eu 92 ans...
Il me manque.
Comme dit mon vieil ami africain : « un homme sans ami, c’est la main gauche sans la droite ».
L’image illustrant l’article vient de francetvinfo
Merci aux internautes pour leur aide précieuse
Olivier Cabanel
Articles anciens
Le folk vous trouvez ça beau ?
Coluche, la mort d’un mec bien
55 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON