Un havre de sérénité
Quelque part dans les Landes, à distance de l'Océan et des touristes attirés par les rues piétonnes et marchandes, il est un lieu qui inspire à la fois la sérénité, la paix et une forme de spiritualité qui se passe aisément des souverains poncifs du dogme. Ici, tout est calme et presque si j'ose : volupté.
Nous sommes dans un airial. « Quésaco ? » me direz-vous et je me fais un devoir d'éclairer votre lanterne : « Un airial est un terrain couvert de pelouse et planté de quelques chênes ou de pins parasols, sur lequel se trouve une ou plusieurs habitations typiques des Landes de Gascogne ». On peut aussi affirmer que c'est un espace regroupant quelques fermes et leurs dépendances, réparties dans une clairière au sein du massif forestier. L’airial constitue une forme d’habitat caractéristique et demeure une composante majeure du paysage et du patrimoine culturel landais.
Vous quittez la route pour vous enfoncer dans les bois. Immédiatement le paysage change. Vous abandonnez les pins parasols pour retrouver les chênes, ces arbres centenaires qui vous prennent par la main pour renoncer aux prétentions d'une époque déraisonnable. Puis vous atteignez un espace enclos de manière purement symbolique pour marquer votre entrée dans ce domaine magnifique.
Des maisons landaises, dispersées de manière anarchique sur une vaste prairie que des sangliers goguenards ont eu l'indélicatesse de labourer. Mise à part cette faute de goût porcine, vous êtes immédiatement subjugués par le contraste avec le monde balnéaire que vous venez de quitter. Tout ici respire la tranquillité et une forme de quiétude qui immédiatement vous gagne.
Vous vous surprenez à parler doucement, à mieux regarder ce qui vous entoure, à prendre l'existence par un autre bout que ce qui constitue habituellement votre quotidien. Vous baguenaudez paisiblement d'une maison à l'autre, prenant le temps de regarder une exposition, de feuilleter des livres, de boire une boisson chaude ou de visiter la boutique.
De charmants bénévoles sont là, à votre service, non pas pour vous pousser à l'achat mais bien plus pour vous convier à partager ce don que l'histoire des occupations anciennes a offert en héritage aux visiteurs contemporains. Une chapelle d'une simplicité miraculeuse vous convie à entrer en communication avec ces moines qui reposent désormais dans ce petit cimetière de terre et de plantes, adossé à l'édifice.
Qui n'est pas touché par la magie de ces humbles sépultures s'est sans doute trompé de destination. Les autres, avec une immense émotion s'en retournent dans ce qui fut jadis leur lieu de culte pour y admirer une voûte fabuleuse et un décor d'un dépouillement extrême. Contraste saisissant du reste entre la magnificence de cette création contemporaine qu'il vous appartient d'admirer en levant les yeux et l'austérité des objets du culte.
De temps à autre, ce domaine ouvre ses portes à des conteuses qui entraînent les visiteurs de la Fontaine miraculeuse, à la petite rivière aux eaux ferrugineuses, de la lande à la forêt, de la prairie à la chapelle. C'est alors un parcours qui vous entraîne dans l'imaginaire, les histoires mirifiques qui ont toute leur place en un tel écrin.
À chacune de mes visites dans les Landes, je ne manque jamais de faire ici pèlerinage, non point pour communiquer avec une divinité quelconque mais plus sûrement pour entrer en communion avec une transcendance qui émane à la fois de la nature et de l'héritage légué par des gens simples. J'aimerais vous prendre par la main afin que vous aussi jouissiez de ce voyage intérieur qui rend meilleur ceux qui acceptent de se laisser pénétrer par la magie de Bouricos, ce patronyme qui renvoie aux marais voisins.
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