C’est la tournée du Saint Patron
Le Bonimenteur en procession ...
Nicolas, Clément et les autres...
La marine de Loire cherche à renouer avec son passé. Un passé chargé d'histoire et de traditions, de croyances, de légendes et de superstitions. C'est ainsi que partout où l'individu exerçait un métier qui mettait sa vie en péril, il cherchait une assurance, un réconfort, un soutien dans le ciel. Les mariniers n'échappèrent pas à la règle eux qui, tout comme leurs homologues d'eau salée, vouaient un profond respect au grand Saint Nicolas.
Bien sûr, la concurrence en matière de saints fonctionnait également et certains préféraient mettre leurs œufs dans plusieurs paniers en appelant à la rescousse Saint Clément, Saint Loup, Saint Roch , ici où là. Nous ne pouvons leur en tenir rigueur. Les temps étaient durs et une petite fête votive épargnait parfois un jour de peine …
Depuis quelques années , les mariniers de Loire ont réactivé la célébration de la saint Nicolas. Les uns par respect des traditions, d'autres sans doute par foi sincère, certains peut-être par opportunisme, tous pour se retrouver autour de leur passion commune. Il faut reconnaître que le bonhomme est bien plus respectable que l'avatar de Coca Cola, ce père Noël de pacotille qui ne sert qu'à faire tourner les caisses enregistreuses.
Avec la Légende de Saint Nicolas et de son compagnon le père Fouettard, nous avions de quoi mettre les enfants dans le droit chemin en leur donnant des valeurs tout les en édifiant quelque peu. Les gars qui allaient sur l'eau, n'étant rien d'autre que de grands enfants, avaient trouvé là un Saint Patron à leur convenance. Leurs successeurs ont plongé avec délice dans la représentation de cette fête qui trouve écho désormais tout au long de notre Loire.
Il faut convenir que nous y rencontrons partout les traces encore présentes de cette dévotion ancienne. Les croix de Saint Nicolas ne manquent pas ; porteuses d'un passé parfois douloureux, elles sont souvent la marque d'une reconnaissance ou bien d'une croyance magique. On y ajoute encore les ex-voto dans les églises des bords de Loire pour comprendre sans moquerie l'importance qu'avait alors cette fête.
Il existe bien sûr, à Orléans quelques dissidents pour commémorer un autre saint sous prétexte que ce dernier avait une ancre à son cou. Mais n'y voyons pas malice, ceux-là veulent se démarquer et montrer ainsi leur farouche indépendance. Que le « monsieur Loire » de la ville y trouve l'occasion de montrer quelques préférences, ne fait que renforcer la dimension sacrée de la fête : indulgences pour les uns , purgatoire pour les autres.
Heureusement, en dehors de la cité qui se prétend bien immodestement capitale ligérienne, c'est à dire partout ailleurs sur la Loire, il n'en va pas de même : le brave Saint Nicolas n'a pas à affronter la concurrence céleste. C'est donc vers d'autres cités que je suis allé traîner mes pieuses menteries, là où le Saint Patron des mariniers avait à son actif, quelques interventions miraculeuses.
Les amis de Gien fêtent dignement le saint homme en chansons. Reconnaissons- leur ce talent incomparable de la fête dans la convivialité et passons au compte de quelques facéties de leur part, les quelques paroles à faire rougir un hôte de Saint Pierre. C'est aussi ce qui fait le charme de cette belle fête que les Fils de Galarne ont réactivée depuis neuf ans. Si le vin chaud a remplacé le vin de messe, c'est qu'il ne fait pas toujours bien bon en bord de Loire à cette époque de l'année !
À Chateauneuf sur Loire, la célébration est plus récente. Ce n'est que la deuxième édition d'une fête qui autrefois , en cette petite ville du Loiret, était l'occasion de grandes animations et d'une procession considérable. Son souvenir étant resté ancré dans les mémoires locales, il ne fallut que bien peu de chose pour que cette longue attente d'une renaissance, ne devienne nécessité impérieuse.
La Saint Nicolas de Chateauneuf n'est pas seulement l'affaire des mariniers et c'est en cela qu'elle se distingue de ses homologues car de nombreuses associations locales s'impliquent dans sa mise en œuvre. Pas étonnant alors que les habitants se retrouvent en nombre en bord de Loire pour participer au cortège et aux animations.
L'histoire est également au rendez-vous avec un discours au pied de la colonne des mariniers, un monument unique sur la rivière pour rendre hommage au dévouement des bateliers qui ,lors des crues de 1846 et 1856, risquèrent leur vie pour sauver celles de nombreux habitants du Val. Ce passé lointain demeure un symbole fort dans la ville et c'est sans doute ce qui explique le véritable succès populaire de la fête.
Bien sûr, les amis du musée de la marine ont réussi à fédérer toutes les énergies autour d'un projet commun qui a su renouveler la tradition et apporter une touche culturelle et spirituelle. À ce titre, le prêtre, venu bénir les bateaux, l'a fait avec la distance et la bonhomie qui convenaient. En effet il est révolu ce temps de l'ancrage totalement religieux de cette manifestation bien que l'on y respecte comme il se doit, ses racines chrétiennes historiques. C'est en cela qu'il me semble que la saint Nicolas de Chateauneuf est exemplaire ! Merci à nos amis Castelneuviens pour leur contribution à la mémoire ligérienne.
Respectueusement leur.
Photographies : Christian Beaudin
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