Penisfaces. C’est ainsi qu’on les surnomme. Elles sont peu nombreuses. Environ 450 selon les services de santé américains. Elles sont plus rares en Europe. Quelques cas en Allemagne et en France. On ne les voit pas dans la rue. Et pour cause, leur apparition causerait peur, sarcasme ou désarroi : à la place du nez, elles arborent un pénis. Une malformation que seule la chirurgie esthétique peut réparer. Si une majorité d’entre elles ont recours au scalpel qui les libère de leur fardeau, d’autres n’ont tout simplement pas les moyens de s’offrir une opération qui reste très onéreuse (environ 8000 dollars).
Sans compter que les donneurs de nez font défaut. Outre-Atlantique, de rares « penisfaces » radicales ont décidé de ne pas se faire opérer, quitte à se mettre au ban de la société. Elles médiatisent leur disgrâce avec humour. Leur but n’est pas seulement de briser la loi du silence, mais de militer pour que leur différence soit acceptée.
Marjorie H. Thompson est née dans le Wisconsin. Aujourd’hui elle enseigne la littérature comparée à l’Université de San Francisco. Elle me reçoit dans son petit appartement non loin du Golden Gate Bridge. Je sonne à sa porte. Je suis préparé à la rencontre.
Elle m’ouvre la porte et sourit. Hello ! me lance t-elle. Mais même avec ce sourire radieux il est tout simplement impossible de la regarder en face sans esquisser un sourire gêné ou sans regarder ailleurs. Cette femme de 58 ans, élégante et plutôt jolie, ne cache pas sa disgrâce. « Il faut surpasser ce handicap me dit-elle. Depuis que je l’ai accepté, je me sens beaucoup mieux. Et puis ça n’a pas que des mauvais côtés... ».
e médite sur cette phrase sybiline alors qu’elle m’introduit dans son salon.
« J’ai perdu mon nez à l’âge de 19 ans, en 1969. C’était à Woodstock, lors du fameux festival : trois jours de paix, de musique, d’amour, rit-elle. Surtout d’amour. Nous n’arrêtions pas de baiser . »
Ce mot soudain lâché au milieu de ce salon bourgeois par cette femme bien mise me fit l’effet d’un tremblement de terre. « Oui, de baiser ! Nous forniquions comme de beaux diables. Ce qui m’est arrivé ensuite n’a rien d’étonnant ». Elle me tend une photo d’elle à côté de Jimi Hendrix, une autre avec Janis Joplin. « Vous savez, à l’époque, nous n’étions pas regardant. Tout le monde couchait avec tout le monde. C’est grâce à Janis que j’ai appris l’amour saphique. Cela m’a beaucoup aidé plus tard ». Elle prononce cette dernière phrase dans un souffle. Impossible d’y distinguer de la nostalgie, du désespoir ou au contraire un soulagement.
A la fin de la ma 19ème année, je me souviens c’était en octobre, un matin alors que je me préparais pour aller à l’université, ma mère piqua une crise de nerf en me voyant pénétrer dans la cuisine.
Mon nez était tombé pendant la nuit. Je ne m’en étais pas aperçu. Au milieu de mon visage désormais était planté un petit sexe riquiqui. Plus tard je me souvins que cette nuit-là je m’étais beaucoup mouchée et que j’en avais pris énormément de plaisir. Aujourd’hui, le « sexe » (ou le « nez » on ne sait pas trop comment qualifier cet appendice), de Marjorie est d’une taille respectable. « Oui, me dit-elle, remarquant mon regard à la dérobée, Jimi n’avait pas que de belles guitares... ».
Vous voulez dire... Vous voulez dire ? Essayai-je de lui demander. Mais elle me coupa : « Oui, c’est le sexe de Jimi Hendrix » Vous savez j’ai consulté de nombreux spécialistes. D’autres n’ont même pas voulu me recevoir lorsque je les appelai à l’aide. Pendant vingt ans j’ai vécu un enfer. Heureusement mes amies ne m’ont pas laissé tomber. Je dirais même que depuis mes amies ont été de plus en plus nombreuses », sourit-elle en clignant de l’oeil. Les spécialistes que j’ai consultés n’ont jamais pu éclaircir ce mystère.
La seule explication qu’ils me donnaient n’est pas très rationnelle. Ils se référaient constamment à Woodstock, à la promiscuité sexuelle, ce genre de choses. Mais je ne suis pas la seule femme à avoir couché avec la terre entière à l’époque. Pourquoi cela devrait-il se voir comme le nez au milieu de la figure ? »
Je lui demande pourquoi elle ne s’est pas faite opérée. « Tout simplement parce qu’une de mes amies m’a parlé d’une femme originaire de New York qui était atteinte de la même pathologie. Nous nous sommes écrits puis rencontrées. Elle animait à Greenwich village une communauté de penisface, c’est ainsi, je l’appris plus tard, qu’elle nous désignait Je me souviens du jour où je rencontrais mes... congénères. Certaines avaient connues Jim Morrison (je l’ai bien connu aussi), d’autre Otis Redding...
Une partie de notre communauté est restée à New York et a fondé un journal, My nose [aujourd’hui le site web, mynose.com, reçoit jusqu’à 5 millions de visiteurs uniques par mois. Ndr].
Les autres m’ont suivi à San Francisco. Nous avons ouvert une librairie et animons des ateliers d’écriture et des rencontres-débats avec des auteurs de tous sexes et même certaines personnalités politiques courageux. Vous savez, l’Amérique est un pays puritain.
Les politiques nous redoutent. Non pas pour le nombre que nous représentons. Mais nous, lorsque notre nez s’allonge, c’est que nous ne mentons pas... ».
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C’est pas drôle de donner cette information un premier avril ! Du coup on ne sait pas qu’en dire...Il faut vraiment avoir le nez fin ! On peut lire le Livre du ça qui en parle.
Cette photo, c’est vraiment moche. L’idée est moche, la photo aussi. Cela ne me fait pas rire du tout. Et mon commentaire là-haut n’était que du cynisme désabusé.
j’espère, omnibuzz, que le 1er avril ne va pas continuer toute l’année... c’est le deuxième poisson gros comme une maison... hier le faux Bayrou qui quitte le modem aujourd’hui le nezpenisme... demain le lepenisme est originaire de mars ?
je dis ça parce que avox est réputé surtout pour la vérité qu’on y trouve... faudrait pas que le premier avril devienne une habitude quotidienne...