Éloge de la fainéantise
Le gros mot est lâché.
Fainéants ! Nous avons ainsi beaucoup progressé depuis que nous étions devenus des pauvres cons et nous devrions nous réjouir de ce pas en avant qui nous a laissés, épuisés au bord d’une route empruntée par des marcheurs courageux. Les présidents passent et leur connaissance du petit peuple ne cesse de s’affiner. Il faut dire que nous faisons assaut de pertinence dans notre choix du commandeur suprême et que ces chers personnages savent se montrer impitoyables à notre encontre.
Fainéants ? Comment en serait-il autrement dans un pays où la société, ses failles, ses erreurs, ses dérives et toute la clique des profiteurs pas plus courageux que nous mais fort bien argentés, nous poussent à l’inaction, au chômage, à la désespérante inactivité ? Il convient de se satisfaire de notre fainéantise de classe quand la vie active se refuse à tant d’entre nous.
Fainéants. Il a bien raison de stigmatiser ce terrible travers, notre freluquet hyperactif. Plus nous serons de fainéants moins il y a aura de monde dans les rues, à battre le pavé pour dénoncer son mépris sidérant, sa morgue, sa suffisance de petit bourgeois détestable. Restons donc dans nos lits douillets plutôt que de remettre en cause la casse sociale qu’il prépare en se relevant les manches, lui qui est seul à déborder d’énergie et de courage.
Laissons donc les marcheurs à leurs agitations néfastes et regardons de loin, les coups bas se faire en nous croisant les bras, en nous tournant les pouces et en fermant les yeux. Le fainéant ne peut s’endormir sur ses lauriers, il n’en mérite aucun, lui qui n’a aucun dynamisme et pas l’ombre d’un esprit d’initiative. C’est un contemplatif qui à franchement parler n’a guère à contempler dans le paysage politique national. C’est un oisif de la pire espèce, de ceux qui se complaisent dans leur insigne médiocrité.
Le fainéant a baissé les bras, ne croit plus aux paroles illusoires pas plus qu’aux vaines promesses. Alors quand vient le dimanche de vote, il reste dans son logement qui soudainement lui coûte cinq euros de plus sans se soucier de ce devoir citoyen qu’il se refuse de remplir. Le fainéant s’abstient, de l’effort comme de l’expression démocratique en sachant parfaitement que c’est ce qu’espèrent ceux qui font semblant de condamner son inaction.
Le fainéant est le roi des cons d’après celui qui est sur le trône. Le beau renversement des valeurs ! Georges doit en avaler sa pipe. Nous voilà bien lotis avec un mal embouché de la sorte. Qu’il soit allé en Grèce, berceau de la démocratie pour nous bercer avec de telles inepties me laisse sans voix. Européen convaincu, il va ainsi faire le tour des nations qui composent l’Union pour décocher à chaque sortie, un charmant défaut pour nous caractériser.
Qu’il reste donc à la maison, à se pavaner avec sa chère compagne. Nous n’avons pas à être tancés de la sorte. Il peut nous imiter et se contenter de faire aussi peu que son devancier. Voilà qui nous satisfera grandement et nous mettra à l’abri de nouvelles saillies détestables. Nous boucher les oreilles nous demande bien trop d’énergie. Les fainéants n’aiment rien tant que de n’avoir rien à faire pour qu’on leur fiche la paix.
Je termine épuisé ce coup de colère qui me laisse sans force. Le diable de banquier aurait-il réussi à me faire sortir de mes gongs ? Non, qu’il se rassure, je lui réponds avec mon inépuisable force d’inertie. Qu’il aille au diable, je ne vais tout de même pas me dépenser plus encore pour lui signifier ma colère. Pour le développement durable de ma couardise, j’économise désormais mon énergie.
Inactivement sien.
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