La légende de Jack
Jack Kerouac, le père de la « beat generation », l’auteur de « Sur la route », n’a suivi qu’une seule route toute sa vie : celle de la Bretagne où il se rendit en 1935, pour y retrouver ses origines. En vain ! Il consacra les dernières années de sa vie à la recherche de ses racines bretonnes et mourut en 1969 sans apprendre que ses racines étaient à Huelgoat (Finistère).
![](http://www.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L262xH300/kerouac-09acf.jpg)
Son père lui disait toujours : "Ti-Jean, n’oublie jamais que tu es breton", mais Jack Kerouac mourut en 1969, sans avoir pu faire un second voyage en Bretagne, sans savoir que son ancêtre avait vécu à Huelgoat, en ce pays de légendes et de mystères... Comme Jack London - cet autre Jack -, dont les récits le bercèrent dans sa jeunesse, Kerouac a-t-il entendu l’appel de la forêt ? La forêt d’Huelgoat en l’occurrence. Les voies de la bretonnitude sont tellement mystérieuses. Mais laissez-moi vous raconter...
Huelgoat et ses légendes :
La forêt de Brocéliande doit son nom aux légendes arthuriennes. Elle fut le témoin de la rencontre de Merlin et de Viviane. Si ce lieu mythique s’est peu à peu restreint à la forêt de Paimpont (Ille-et-Vilaine), la forêt de Huelgoat n’en demeure pas moins un merveilleux vestige aux noms de lieux évocateurs comme la "Grotte du Diable", le "Ménage de la Vierge", la Roche Tremblante", le "Gouffre", le "Camp d’Artus" (nom bas-breton donné ici au roi Arthur), la "Grotte d’Artus" où se serait réfugié le roi Arthur, figure des chevaliers de la Table ronde.
La forêt de Huelgoat abrite un chaos de rochers de granit, galets démesurés qui semblent avoir été jetés là par des géants. Par Gargantua lui-même, affirme une légende. On y trouve la fameuse "roche tremblante" qui pèse 137 tonnes et peut être bougée d’une simple poussée du dos à un endroit bien précis. Un enfant de dix ans peut le faire. Elle fait partie d’un type de pierres autrement appelées "roulées" et les druides voyaient en elles le symbole de la puissance de Dieu.
Quant à la grotte, c’était, paraît-il, le logis du roi Arthur. Selon la légende, elle contenait un fabuleux trésor gardé par des démons, des feux follets, un trésor découvert par le roi Arthur au Val sans Retour grâce à l’enchanteur Merlin.
Dahut habite aussi ces lieux. Il s’agit de la fille du roi breton Gradlon, qui fut le roi de la ville d’Ys et dont la statue trône aujourd’hui tout en haut de la cathédrale Saint-Corentin de Quimper, tournée vers sa cité engloutie par la mer. Dahut aurait étranglé ses amants dans la forêt d’Huelgoat et les aurait précipités dans le "Gouffre".
Quelques liens pour découvrir la forêt d’Huelgoat :
La forêt d’Huelgoat : quelques photos et vidéos sonorisées.
Huelgoat, parcours touristique.
Huelgoat par un passionné, avec illustration nombreuses et légendes.
"Sur la route"... d’Huelgoat !
Cela peut sembler un paradoxe de découvrir que Jack Kerouac, que l’on savait gagné par une vie d’errance perpétuelle, était obsédé par ses racines bretonnes. En fait, il a toujours cherché à savoir d’où il venait. Sans doute aurait-il aimé son ancêtre finistèrien Urbain-François Le Bihan, sieur de Kervoach. Comme lui, Urbain était un aventurier. Il quitta Huelgoat pour traverser l’Atlantique au début du XVIIIe siècle et arpenter le long du Saint-Laurent à la recherche de fourrures. Il aura fallu des années de recherches à la généalogiste Patricia Dagier pour débusquer Urbain, bien caché au fond des archives française et canadiennes.
Cette recherche laborieuse répondait à une demande des quelque 3 000 membres de l’association des Kerouac/Keroack/Kirouac du Canada. Le dimanche 9 juillet 2000, la délégation de l’association des Kerouac d’Amérique s’est réunie à Huelgoat devant l’église à la construction de laquelle a participé leur ancêtre Urbain en 1698. À Huelgoat, Urbain exerça la charge de notaire avant de partir "sur la route"... du large !
En septembre 1957, c’est d’une autre route dont parlera son descendant Jack Kerouac. Sur la route peinera à trouver un éditeur mais, sitôt publié, fera naître en Amérique une multitude de beatnicks. Tout comme la forêt d’Huelgoat, Jack Kerouac demeure une légende. L’écrivain breton Youenn Gwernig, qui fut sculpteur à Huelgoat (et oui ! tout se recoupe...), avait émigré aux États-Unis. Là-bas, il se lia d’amitié avec Jack Kerouac. À la mort de ce dernier, il rentra en Bretagne. Il vient de décéder récemment.
Kerouac se sentait donc l’âme celte. D’ailleurs, parmi les écrivains dont il admit l’influence, il y avait le poète gallois Dylan Thomas. Ce poète, qu’un certain Robert Zimmerman, admirait aussi, à tel point qu’il lui emprunta son prénom et devint connu sous le nom de Bob Dylan. Kerouac fut le parrain de ce dernier et de Joan Baez.
En France le chanteur Michel Corringe rendit hommage au "clochard céleste", au "papa des beatniks" avec sa chanson Kerouac Jack. (Écoutez ici). Mais son meilleur hommage à la beatnik attitude reste La Route, véritable hymne à la liberté. Écoutez là !
"The most independent group of noblemen in Europe", dit Kerouac. Quelle plus belle marque d’amitié pouvait-il donner au peuple breton et à ses ancêtres ?
Annexe : Interview en français de Jack Kerouac à Montréal en 1967.
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