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Accueil du site > Culture & Loisirs > Étonnant > La rage de dent de Goupil

La rage de dent de Goupil

 

Confusions en série.

 

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Il advint que ce jour-là, notre brave Goupil, se levant du bon pied, d'humeur guillerette sans le moindre nuage à l'horizon, se hâta de se mettre en chasse. Une bonne traque vous ouvre l'appétit tandis qu'il n'est rien de plus agréable que de courir le campagnol dans une campagne verdoyante. Certains pourront s'indigner de pareil petit déjeuner quand d'autres estimeront qu'il convient toujours d'assumer sa nature.

Goupil donc ne tarda pas à trouver une proie à sa convenance. Il fit preuve, comme bien souvent de ruse et de rouerie pour parvenir à ses fins, le petit rongeur n'ayant que fort peu de chance d'échapper à son triste destin. Campagnol pourtant mit les gaz et prit ses petites pattes à son cou pour échapper au sort qui lui était promis. Lui qui avait su faire son trou dans ce territoire champêtre, entendait profiter encore longtemps de ce magnifique lieu de villégiature.

Pourtant dans sa course effrénée vers une issue de secours, il perdait du temps et du terrain sur son poursuivant. Il en était à devoir se résigner à la perspective d'une mort peu glorieuse quand dans un sursaut du désespoir, alors que le Renard ouvrait grand sa gueule, il projeta un petit caillou sur son prédateur.

Goupil d'un violent coup de mâchoire qui tomba dans le vide, écrasa le projectile entre les deux molaires aplaties qu'il avait au fond de la gorge. Il manqua s'en étouffer se rendant compte dans l'instant qu'il faisait une fausse route. Le chasseur renonça à son petit déjeuner afin de reprendre son souffle. Il rentrait la queue basse pour regagner l'arbre creux où il avait élu domicile quand il fut saisi d'une violente douleur dentaire.

Le renard, la chose peut prêter à confusion, était la malheureuse victime d'une terrible rage de dent. Il lui fallait consulter dans l'instant une personne de confiance. Il avait appris que non loin de son repère, dans le village tout proche, vivait un Pasteur. L'animal fit alors terrible et fâcheuse confusion entre le berger des âmes et le biologiste qui fit la mauvaise réputation de ceux de sa race. Les approximations sont légion chez les renards aussi.

C'est donc la mine déconfite que Goupil toqua à la porte du bon pasteur qui s'enquit tout naturellement de la raison de sa visite. L'homme étant des plus hospitaliers, voulut offrir à boire à son visiteur une bière, tout naturellement puisque nous étions en Alsace. Cette fois c'est le berger des âmes qui commit bourde en offrant une rousse à son convive.

Goupil en eut une dent contre ce maladroit hôte. Mais, reprenant ses esprits, il ouvrit sa gueule espérant non pas une intervention divine de laquelle sont exclus jusqu'à nouvelle révision du dogme nos amis les bêtes, mais bel et bien une intervention aussi salutaire que sanitaire. Le Pasteur de se récrier devant pareille sollicitation. Que dirait-on de lui si on apprenait dans le bourg qu'il avait soigné un animal réputé nuisible et fort mal vu des chasseurs de l'endroit ?

Le brave homme confia à Goupil qu'il ne souhaitait pas que ses paroissiens bavent à son propos suite à une intervention qui lui serait vertement reprochée. Se piquant pourtant d'humanisme le bon pasteur offrit un cachet d'aspirine à son visiteur pour calmer la douleur et lui laisser le temps de consulter un professionnel de la chose.

Goupil faute de mieux se contenta de cette offrande, bien décidé à consulter le vétérinaire le plus proche puisque désormais, il savait à qui s'adresser grâce aux bons conseils de l'homme du temple. Il s'en alla en quête de ce professionnel mais hélas, il ignorait qu'il vivait dans un désert médical. Sa requête demeura stérile, il s'y cassa justement la dent qui le faisait souffrir. C'est ainsi que sans rien coûter à la sécurité sociale des animaux, il venait de régler son problème.

Il n'est nulle morale à tirer de cette histoire quelque peu tirée par la queue d'autant que le pauvre animal se contenta désormais de ne manger que du fromage.


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14 réactions à cet article    


  • Sirius Sirius 21 mai 08:01

    la morale de cette histoire, c’est qu’un renard édenté est encore beau


    • C'est Nabum C’est Nabum 21 mai 08:25

      @Sirius

      Nulle part il a été mentionné la perte d’une dent
      Il n’en aurait d’ailleurs pas fait tout un fromage


    • Sirius Sirius 21 mai 10:52

      bougonner, c’est aussi avoir une rage dedans


      • C'est Nabum C’est Nabum 21 mai 11:08

        @Sirius

        J’en suis spécialiste


      • juluch juluch 21 mai 11:20

        Vous...vous avez eu des problèmes dentaires !!!  smiley

        J’enrage de ma rage de dent a dit renard !


        • C'est Nabum C’est Nabum 21 mai 11:33

          @juluch

          Comment le savez-vous ?


        • juluch juluch 21 mai 15:05

          @C’est Nabum

          Si je me fis à certains écrits il y a quelques temps....

           smiley

        • C'est Nabum C’est Nabum 21 mai 15:42

          @juluch

          Bonne déduction


        • ilias 21 mai 15:51

          « Il n’est nulle morale à tirer de cette histoire quelque peu tirée par la queue, d’autant que le pauvre animal se contenta désormais de ne manger que du fromage », dixit Nabum. C’est bien le contraire, et ce qui suit le montre.

          L’histoire de Goupil, le renard rusé mais malheureux, nous offre un terreau fertile pour une réflexion profonde sur la sagesse et la condition humaine. Les péripéties de ce renard, bien que teintées d’humour et d’ironie, résonnent comme une fable philosophique, révélant les subtilités de notre existence quotidienne, les malentendus de notre quête de solutions, et les limites de notre compréhension face aux épreuves de la vie.

          L’instinct de (sur)vie et la nature humaine

          Goupil, en se levant de bonne humeur pour partir en chasse, incarne l’instinct naturel que chaque être vivant porte en lui. La chasse, acte primitif, nous rappelle notre connexion archétypale intrinsèque à la nature, où la survie et les besoins primaires dirigent souvent nos actions. Cette pulsion primaire peut être vue comme une métaphore de nos propres désirs et besoins, qui nous poussent à agir parfois sans considération pour les conséquences.

          La ruse et la désillusion

          Le renard, symbole de ruse et d’agilité, se retrouve piégé par une simple pierre lancée par un campagnol désespéré. Cette scène nous enseigne que, malgré toute notre ingéniosité et notre savoir-faire, nous sommes susceptibles de rencontrer des obstacles imprévus qui peuvent déstabiliser nos plans les plus soigneusement élaborés. La fausse route de Goupil, où il se blesse avec la pierre, évoque les illusions et les désillusions que nous vivons lorsque nos stratégies échouent face à l’imprévu.

          La quête de secours et les malentendus

          La souffrance de Goupil le pousse à chercher de l’aide, mais son ignorance le conduit à faire des confusions. En confondant un pasteur avec un vétérinaire, Goupil met en lumière la difficulté que nous avons parfois à identifier la bonne source de secours dans nos moments de détresse. Le pasteur, représentant de la religiosité et de la morale sociale ambiante, offre un réconfort temporaire, mais ne peut résoudre le problème matériel de Goupil. Cela illustre le conflit entre nos besoins physiques et spirituels, et la difficulté de trouver des solutions complètes à nos souffrances.

          L’hospitalité et la morale sociale

          Le pasteur, malgré sa bonne volonté, est contraint par les attentes sociales et les préjugés de sa communauté. Cette rencontre souligne les limitations de l’altruisme dans un contexte où les normes sociales et les jugements externes influencent nos actions. Le refus du pasteur de soigner directement Goupil, de peur des répercussions sociales, est une critique subtile des barrières que la société impose à l’expression de notre humanité et de notre compassion.

          La résilience face à l’adversité

          Finalement, Goupil, confronté à un désert médical, se voit contraint de laisser le temps et la nature résoudre son problème. Sa dent se casse, mettant fin à sa douleur de manière brutale. Cela symbolise la résilience et la capacité d’adaptation face à des circonstances adverses. Parfois, les solutions les plus inattendues et les moins conventionnelles s’avèrent être les plus efficaces, même si elles impliquent une forme de perte ou de sacrifice.

          La simplicité et le contentement

          En se résignant à une diète de fromage, Goupil nous rappelle l’importance de la simplicité et de l’acceptation. Parfois, face à des défis insurmontables, nous trouvons le bonheur et la paix en ajustant nos attentes et en nous contentant de ce que la vie nous offre. Cette adaptation n’est pas un signe de faiblesse, mais une preuve de sagesse et de flexibilité, qualités essentielles pour naviguer dans les eaux troubles et les complexités de tout ordre de l’existence.

          L’histoire de Goupil, sous son apparence légère et humoristique, est une profonde allégorie de la condition humaine. Elle nous enseigne que la sagesse ne réside pas seulement dans la ruse, l’intelligence, l’ingéniosité et l’agilité tout autant physique que mentale, mais aussi dans la capacité à connaître et à accepter nos limites, à chercher de l’aide avec discernement et perspicacité, et à trouver la paix potentiellement et éventuellement dans des solutions adaptées et adoptées, les plus simples et les plus naturelles. En cela, Goupil, avec ses mésaventures, devient un miroir de notre propre quête de sens et de réconfort lorsque nous nous trouvons dans un monde souvent à contextes déroutants, imprévisibles, et parfois incertains et dangereux.


          • C'est Nabum C’est Nabum 21 mai 17:13

            @ilias

            Quand l’exégète se montre largement supérieur à celui dont il entend développer la pensée.
            Merci

            C’est vous le maître


          • zygzornifle zygzornifle 22 mai 10:09

            On se demande bien ce que la petite souris va lui apporter .....


            • C'est Nabum C’est Nabum 22 mai 12:57

              @zygzornifle

              Du fromage


            • sylviadandrieux 22 mai 15:17

              Le goupil roux est bien malheureux. 

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