La technique Strange and Funky de 2010
Roulement de tambours…
Il s’agit de l’Optogénétique selon le journal scientifique Nature Methods. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’ils se sont pas fourrés le doigt dans l’œil en la choisissant ! Ils se sont même démerdés pour nous concocter une superbe vidéo, simple à comprendre, efficace et impressionnante mais sans tomber dans le sensationnel, bref, un bijou de pédagogie :
Transcription :
Des chercheurs peuvent activer des cellules dans le cerveau de cette souris, simplement en allumant la lumière. La lumière active des cellules du cerveau qui font que l’animal tourne en rond. Ce sympathique tour de magie représente également un outil scientifique important. Utiliser la lumière pour comprendre le comportement cellulaire nous renseigne sur de très nombreuses questions, sur la manière dont on se réveille ou encore notre capacité à apprendre.
Ceci est l’optogénétique.
Tout a commencé avec des algues.
En 2002, des chercheurs ont découvert que la protéine responsable du comportement des algues verte consistant à se rapprocher ou s’éloigner de la lumière, est un canal sensible à la lumière. La lumière bleue oblige le canal à s’ouvrir, et des ions positifs peuvent ainsi rentrer à l’intérieur de la cellule, à l’instar du flux d’ions positifs qui entraine l’activité d’une cellule nerveuse.
De nombreux scientifiques comprirent vite le potentiel de ces algo-protéines. Ils réalisèrent que s’ils étaient capables de faire fonctionner ces canaux de type rhodopsin dans des cellules nerveuse de mammifères, ils auraient une manière de contrôler très précisément l’activité de ces cellules dans le cerveau. Dans de nombreuses applications, cette méthode serait plus efficace que des drogues qui fonctionnent plus lentement, et plus efficace que des stimulations électriques sur le cerveau, qui sont moins précises.
Faire rentrer une protéine d’algue dans un cerveau de souris, par exemple, requiert un peu d’ingénierie génétique. D’abord, on prélève le gène codant pour la protéine, mais également un autre morceau d’ADN appelé promoteur, et on les injecte dans un virus. Quand le virus est introduit dans le cerveau de la souris, il infecte des neurones et introduit le gène. Un sous-ensemble pré-déterminé de neurones aura la machinerie protéique nécessaire à l’activation du promoteur. Et alors uniquement dans ces cellules, la protéine d’algue sera exprimé et le canal inséré dans leur membrane. Pour activer la protéine, tout ce qu’il faut c’est de la lumière qui sera acheminée par un câble de fibre optique.
C’est la possibilité de cibler des neurones spécifiques dans un animal vivant qui rend cette technique si puissante. Et les canaux-rhodopsin ne sont pas les seules protéines qui existent dans la boite à outil de l’optogénétique.
Chez cette mouche, un système différent de protéines sensibles à la lumière est utilisé pour cibler seulement deux neurones parmi 200 000 ! Ces 2 neurones gouvernent le comportement de fuite : le réflexe qui fait que la mouche fuit quand vous essayez de l’écraser. Ici, c’est un flash de lumière qui active ces neurones, ce qui fait bondir la mouche et étendre ses ailes. Elle ne peut pas s’envoler parce qu’elle ait enfermée dans une boite de Pétri. (Voici ici toutes les autres vidéos publiées dans Cell)
Tout autant qu’ils voulaient activer des neurones, avec de la lumière, les chercheurs voulaient également les inhiber. Désactiver un neurone ne nécessite que l’emploi d’un autre type de protéine sensible à la lumière, comme l’Halo-rhodopsin, et un lumière d’une autre couleur.
Regardez comment la gymnastique de ce ver est interrompue quand une lumière jaune est allumée. La lumière active l’Halo-rhodopsin, entrainant un flux d’ions négatifs qui inhibe les moto-neurones du ver, et l’empêche de nager (tous les films des différentes expériences tentées sur le nématode C. elegans, ici)
Et les chercheurs en neuroscience ne sont pas les seuls à utiliser l’optogénétique. On peut tout autant utiliser cette technique pour activer et désactiver des neurones, que pour contrôler d’autres processus dans des animaux vivants, mais aussi dans des cultures cellulaires.
Ces cellules de cœur de souris ont été conçues pour battre au rythme de flashs de lumière.
Et ici, une protéine sensible à la lumière fait que cette cellule de peau suit le laser.
Les applications sont infinies. Des chercheurs ont déjà utilisé la lumière pour transformer la marche tremblante de rats atteints de Parkinson, en course assurée, et ont montré quels sont les neurones activés au moment où une souris se réveille.
L’optogénétique jette une lumière dans tous les domaines, du comportement animal jusqu’aux interactions de protéines à l’intérieur de cellules.
C’est pourquoi Nature Methods a sélectionné l’Optogénétique comme méthode de l’année 2010.
Liens :
Références :
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