Considérations sexuelles
1. Sexe vient de section, sexuation. La coupure est aussi la complémentarité. La complémentarité est axée par l'engendrement ou la reproduction. C'est tellement essentiel à la survie des mammifères, que la nature en a rendu folles les bêtes dans l'oestrus et dans le rut, que nous subissons des envies intenables, des désirs inavouables, des plaisirs adorables. Et voici qu'un partenaire attisé traverse toute la France voire plus sur un coup de foudre et de coeur, pour rejoindre le partenaire qui bientôt le foutra à la rue sur un coup de gueule et de tête. Par exemple.
2. "Les histoires d'amour finissent mal, en général." Enfin c'était ce que prétendait la chanson. Toutes les histoires d'amour ne finissent pas mal : il y a des histoires d'amour qui finissent bêtement, platement, mutuellement... et des histoires d'amour qui ne finissent pas, entre démarches ennuyeuses, convivialités simples et enthousiasmes renouvelés.
3. Si le sexe n'avait été que l'oestrus et le rut, il n'aurait pas donné lieu à l'érotisme, culture des plaisirs sexuels, qui sont de sensualité en général. La sensualité, c'est un peu les 3B : boire, bouffer, baiser. Quand on ne parvient plus à vivre autrement que d'attirances, on appelle ça la lubricité. Quand la lubricité est crue (de crudité, non de croyance, encore que...) on appelle ça salace, salaud, salope. Mais quand l'envie est trop prégnante, on appelle ça lascivité. Et, quand on en profite, on dit la volupté. Les plaisirs sexuels. Qui n'ont pas la manie de viser l'engendrement ou la reproduction, mais cette visée n'est pas impossible, surtout à l'époque des contraceptifs et des abortifs.
4. A l'époque des contraceptifs et des abortifs, on a vu émerger la sexualité comme sensualité/lubricité/salacité/lascivité/volupté avant tout, entre érotisme et pornographie. Certains ont parlé d'un retour au paganisme, c'est-à-dire aux religions ethniques pré-monothéistes (oui parce que paganisme est une insulte depuis l'OEil du Vatican romain, de type "nous les civilisés et vous les paysans"). Certains ont parlé d'un retour au paganisme mais c'est faux pour deux raisons. La première, c'est que les Anciens n'étaient en fait "pas comme ça" en dehors des excès auxquels se sont toujours adonnés les riches oisifs ; les Anciens assuraient d'abord des lignées, des serments et des travaux : il suffit pour s'en convaincre de découvrir les Sept Sages de la Grèce ou la Mos Maiorum des Romains. La seconde, c'est que les Anciens étaient à la paillardise (même étymologie que paganisme) que l'on nomme plutôt grivoiserie selon que l'on est rural ou urbain : aujourd'hui la paillardise comme la grivoiserie ne sont plus perçues comme ce qu'elles sont pourtant, c'est-à-dire joyeuses, mais elles sont réputées pour violeuses. Enfin c'est complètement hypocrite naturellement. Comme toutes les morales, le puritanisme ultrafem/trans/voire woke actuel, a lieu à l'heure de l'accessibilité du porno et des sites de rencontres aux objectifs coquins avoués sur la place publique... encore que coquinerie assonne plus avec cachotterie qu'avec paillardise ou grivoiserie, quoi que coquinerie rime quand même avec grivoiserie qui se rapproche par son urbanité, de la moderne coquinerie. Nous nous accoquinons allègrement de nos jours.
5. Avec l'émergence de la sexualité comme coquinerie/accoquinement, donc, les gens font les coquets & les coquettes : ils paradent et cela donna des trucs de styles rock comme emo, et caetera. Tout le monde se donne un genre, la modernité permissive reconduisant à des formes d'animalité puisque les instincts sont lâchés : les hommes font les coqs ce qui est l'étymologie de coquet. Bien sûr certains l'ont toujours fait dans l'Histoire (les coqs) mais remarquez que cela plaît puisqu'en face les femmes s'accoutrent comme des fantasmes masculins (coquettes). Où celle qui montre le plus de peau n'est bien entendu pas celle qui se donne le plus aisément : l'excitation du mâle (allumer) fait partie d'un dispositif tactique aussi dans la relation. Voilà pourquoi on doit désormais rappeler avec frénésie que "non c'est non" et que "faut du consentement", #BalanceTonPorc. Nous vivons une époque de coquin·es...
6. Ton #Porc c'est avant tout ton désagréable lubrique, et désagréable pour des raisons plus ou moins factuelles. Factuelles : quand tu as émis un "non" ferme, quand tu te détournes tout simplement pour ne rien attiser, quand les circonstances ne sont pas à "ça", et évidemment quand ça vire au cauchemar attoucheur voire par hasard violeur. Moins factuelles : quand tu t'y es laissée plaire, quand les circonstances sont à "ça", quand tu le juges hideux, quand tu l'as allumé et que tu n'assumes pas ta démarche : soit que tu étais inconsciente (c'est souvent le cas des ados qu'on retrouve en psychiatrie pour des problèmes de violences idoines) soit que tu es dans une tactique salace. En dehors de la tactique salace, dont tu ne peux te prendre qu'à toi-même, ces raisons sont évidemment recevables : chacun sa route. Et si par principe la violence est condamnable y compris devant les tactiques salaces, les tactiques salaces sont condamnables de même. Salaudes. Politiquement, c'est la dernière campagne macronienne : "on a très envie de vous"... et pas que la dernière campagne macronienne, puisque la coquine Marlène Schiappa et caetera. Enfin les condamnations face aux actions violentes, pour utiles qu'elles sont en général à la dissuasion, ne servent à rien le jour où l'on te viole(nte) : cela reste un horrible jour. A moins d'être maso, tu n'oses pas l'imaginer, ou bien tu l'imagines pour t'en prémunir parfois même involontairement en rêve (et tu n'as pas à avoir honte de ce que tu y ressens, de même qu'après un viol tu n'as pas à avoir honte de ce que tu y ressentis) mais alors pourquoi pourquoi te rendre au fond moralement condamnable, quand et si tu adoptas de salaces tactiques ? Des hommes aussi s'y adonnent, mais chez les mammifères le sex appeal est avant tout femelle, et si le débat n'est pas humainement tranché avec notre important potentiel cognitif et culturel, il n'y a aucune raison a priori pour que nous échappions totalement au règne animal.
7. Tout le monde se donne un genre, la modernité permissive reconduisant à des formes d'animalité puisque les instincts sont lâchés. Néanmoins nous restons (des animaux) humains, c'est-à-dire que nous avons un cerveau qui tourne à blinde au point de nous faire vivre dans un univers de sens si chiadé qu'il peut nous faire quitter terre et même nous engager dans des démarches "contréalistes". Les démarches contréalistes ne sont pas vraiment irréalistes ou contre-réalistes, puisqu'elles se donnent des moyens réalistes pour réaliser les contes qu'elles se font. Elles seraient surréalistes si justement elles n'étaient pas contréalistes, c'est-à-dire si elles ne se donnaient pas des moyens. Voilà pourquoi se donner un genre devient bientôt se sentir genré·e.
8. Se sentir genré·e c'est se sentir pris au piège des genres qu'on se donne. C'est avant tout une psychologie inversée, qui accuse tout le monde et personne de nous avoir genré (comme on prétend être "racisé") alors que jusque là nous étions tout seuls à faire genre. Alors on peut reprocher fielleusement que "c'est la société qui dicte mon genre" autant qu'on veut, c'est quand même insensé parce que le groupe musical Indochine n'a pas attendu le transgenre actuel (plus ou moins dit woke) pour se sentir libre dans et de son genre, et tout le monde le laissa faire, sans parler d'André Gide. Car c'est même plus insensé que ça encore : le travestisme et les invertis sont historiquement connus et situés dans les groupes. Bien entendu, l'époque de Ludwig II de Bavière ne tolérait aisément "l'excentricité partenariale" que de la part des riches (c'est comme le rebouteux du village qu'on brûle sur les conseils... de l'astrologue de cour... : comme toujours, il y a les privilèges de classe). Bref il y a des altérations sociohistoriques. Mais c'est justement le propre des groupes et de l'Histoire que de varier. Et tout ceci ne tient qu'à la reconnaissance inébranlable quoi que branlables, d'un pénis et d'une vulve.
9. "Heureusement" qu'il y a le politiquement correct, pour nous parler de "personnes à pénis" ou "à vulve"... ça ne peut pas angéliser le sexe, ça parle quand même du sexe des anges ; des genres, et plus précisément de personnes (hommes et femmes confondues) qu'on traite comme si elles étaient des anges auxquels on aurait malencontreusement greffé un organe masculin ou féminin dans l'immense majorité des cas, c'est-à-dire en dehors des exceptions alloformées souvent défectueuses, voire difformes, qui confirment la règle. Car à angéliser on manque "contréalistement" la réalité : un pénis sert l'insémination et la vulve la fécondation, soit l'engendrement ou la reproduction. C'est-à-dire qu'en voulant angéliser on n'a fait que cerner l'élément inébranlable de "la Chose", témoignant une énième fois s'il en fallait une que le puritanisme est une hypocrite démarche d'obsédé·es sexuel·les.
10. Le sexe, c'est réaliste. Que les sociétés l'affublent de choses et d'autres, des invariants psychanalytiques demeurent même si toutes les sociétés ne résolvent pas l'oedipe de la même façon, voire ne le résolvent pas du tout (et même si la psychanalyse est attaquée de toutes parts dans le monde : elle reste une pierre d'angle dans l'Histoire psy qu'on le veuille ou non ainsi que d'usage lucratif, dans la publicité depuis que Freud-neveu aka Edward Bernays l'intégra au marketing). Les symboles sont les mêmes et l'imagination anthropologique des sociétés a des limites hyperréalistes : symboliquement le champ fertile est féminin, la bêche qui insémine par l'action du cultivateur masculine. D'ailleurs on voit bien que le genre grammatical n'a aucun impact là-dedans : un champ fertile féminin, une bêche cultivatrice masculine... Bref le sexe c'est la vie, et la façon dont les sociohistoires le réalisèrent n'a rien d'un genre par essence. Les sociétés ne se sont jamais demandé quel genre se donner, elles ont par contre beaucoup joué à et avec "ça" de façon culturellement assumée. C'est vraiment prendre nos ancêtres pour des imbéciles que de ne pas leur accorder cette ingéniosité. Comme on dit : "on fait ce qu'on peut avec ce qu'on a"... ou pas. Des burnes, des ovaires, des miches, des roberts, des droits aussi, mais encore des interdits. En assumant le réalisme ou en tactisant contréalisement, avec le travestisme et les invertis dans le lot commun.
11. C'est qu'il y a l'érotisme, c'est qu'il y a Eros. Mais Eros n'est pas le Dieu de la sublimation comme en fit le socratisme : le socratisme divague de la mythologie hellène, pas étonnant que Socrate fut condamné pour impiété alors qu'il tenait un discours théologique alternatif... Pour Socrate les Dieux n'étaient que justice, ce dont les poèmes d'Homère ne rendent pas vraiment compte qui sont plus proches de nos péplums, où les Dieux (sans toutefois faire preuve de la cruauté que leur prêtent les monothéistes) jouent leur propre partie dans l'univers. Chez Hésiode de même où Eros naît d'Aphrodite et d'Arès, de Sensualité et de Hostilité. En effet Aphrodite préside aux amours et Arès aux combats-même ! S'ébattre et se battre, cela fait la guerre de Troie. Freud fit une grossière erreur en distinguant l'eros psychanalytique (les pulsions de vie) de thanatos (les pulsions de mort) : Hésiode lui-même nous enseigne que le Désir est sensuel et hostile. Qui Désire, Désire profiter sensuellement et, pour profiter, intrinsèquement, écarte hostilement de son chemin. Au fond, USA versus Russie au sacrifice de l'Europe, n'est-ce pas un combat de coqs ? Joe Biden fait pourtant tout pour avoir l'air en forme...
12. Le consumérisme c'est Eros déchaîné, encore que commercialisé : c'est Eros avec des oeillères... un cheval noir et impétueux dans un supermarché sur internet. Pas étonnant que Charles-Marie Leconte de Lisle en fit dans Poèmes tragiques (1884) le Dernier Dieu d'une fin du monde poétique, durant un XIXème siècle inaugurant l'ère consumériste :
Bien au delà des jours, des Ans multipliés,
Du vertige des Temps dont la fuite est sans trêve,
Voici ce que j'ai vu, dans l'immuable rêve
Qui me hante, depuis les songes oubliés.
J'errais, seul, sur la Terre. Et la Terre était nue.
L'ancien gémissement de ce qui fut vivant,
Le sanglot de la mer et le râle du vent
S'étaient tus à jamais sous l'immobile nue.
Par le Vide sans fin, le globe décharné,
A bout de désespoir, de misère et de force,
Bossuant le granit de sa rugueuse écorce,
S'en allait, oublieux qu'un jour il était né.
Les Iles d'autrefois hérissaient de leurs cimes,
Le gouffre monstrueux des océans taris,
Où s'étaient desséchés la fange et les débris
Des siècles engloutis au fond des vieux abîmes.
Funéraire flambeau d'un sépulcre muet,
Le soleil épuisé, pendu dans le ciel blême,
Baignait lugubrement de sa lueur suprême
L'immense solitude où rien ne remuait.
Et j'errais en esprit, Ombre qui rôde et passe,
Sans regrets, sans désirs, au hasard emporté,
Reste de l'éphémère et vaine humanité
Dont un souffle a vanné la cendre dans l'espace.
Et je vis, au plus haut d'un mont, silencieux,
Impassible, plus froid que la neige éternelle,
Un Spectre qui couvait d'une inerte prunelle
L'univers mort couché sous le désert des cieux.
Majestueux et beau, ce spectre, auguste image
Des Rois olympiens, enfants des siècles d'or,
Se dressait, tel qu'au temps où l'Homme heureux encor
Saluait leurs autels d'un libre et fier hommage.
Mais l'Arc, d'où jaillissaient les désirs créateurs,
Gisait parmi les blocs de neige, avec les Ailes
Qui portaient vos baisers, ô blanches Immortelles,
De la bouche des Dieux aux lèvres des pasteurs !
Mais le front n'avait plus ses roses de lumière,
Mais rien ne battait plus dans le sein adoré
Qui versait sur le monde à son matin sacré
Tes flots brûlants et doux, ô Volupté première !
Et le charme et l'horreur, le souvenir amer
Des pleurs sanglants après les heures de délice,
Tous les enivrements du céleste supplice
Me reprirent au coeur d'une étreinte de fer ;
Et je connus, glacé sur la terre inféconde,
Que c'était là, rigide, endormi sans retour,
Le dernier, le plus cher des Dieux, l'antique Amour,
Par qui tout vit, sans qui tout meurt, l'Homme et le monde.
13. Il faut profiter sensuellement et écarter hostilement de son chemin pour vivre. Tous les bébés, toutes leurs mères pour les soigner et les enseigner, comme tous leurs pères pour les épauler et les édifier, savent cela. Comme les Orcs dans Warcraft...
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