La canicule
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Le sale air de la sueur
Après une nouvelle douche rapide mais bienfaitrice, je me présente à vous dans une tenue qu’il est préférable de ne pas vous dévoiler même s'il ne reste plus grand chose à retirer. Ne pas s’essuyer, profiter de cette humidité transitoire pour jouir encore quelques instants d’un répit et d’un peu de fraîcheur. La chaleur environnante va une fois encore gagner la partie, elle impose son effet désastreux sur ma peau. Il est inutile de lutter, je vais passer une nouvelle journée entre transpiration collante et odeurs aigres. Mon adiposité se rappelle honteusement à moi en cette maudite période de canicule.
La veille s’était achevée par la même quête désespérée d’un brin d’air, d’un peu de fraîcheur . Une ultime douche avant de tenter vainement de trouver le sommeil. L’heure tardive autorisant l'ouverture de toutes les fenêtres de la maison pour un espoir déraisonnable de créer un courant d’air dans cette étuve. Rien n'y a fait pourtant, une simple illusion, un mieux être qui ne dure que le temps qu’un souffle chaud ne vienne taquiner à nouveau les glandes sudorales.
Au petit matin, il faut en toute hâte fermer fenêtres et volets. Le soleil ne se donne même pas la peine d'être à son zénith pour darder ses rayons de feu. Vivre dans l'obscurité est impératif. La lumière électrique ajoute elle aussi une chaleur qu'il convient de fuir. L’immobilité est un impératif. Ne rien faire et transpirer quand même, punition commune pour tous ceux qui ne se plaisent pas dans pareil climat. Dire qu'il y en a qui réfute encore le dérèglement climatique !
Manger est également une autre affaire pénible. Ne rien faire chauffer surtout. Tant pis pour cette belle récolte de haricots verts. Ils auraient été délicieux en salade avec quelques tomates mais la seule idée de faire bouillir de l'eau paraît stupide. À moins de se lever au cœur de la nuit pour tenter l'aventure. En attendant, tomates crues, concombre et pêches constitueront le menu du jour.
Mettre le nez dehors est une épreuve plus redoutable que toutes les autres. Malheur à qui entre dans la fournaise, une vague de chaleur l’étouffe et le submerge. Aller à pied par ce temps torride est déraison, le vélo pure folie ! Sortir c’est aussi s'exposer à la brûlure et au ridicule du maillot mouillé sous les aisselles mais aussi avec une longue et humiliante traînée humide qui vous trahit dans le dos. Prendre la voiture alors ? Bien moins raisonnable encore. Dans un véhicule sans climatisation, vous êtes condamné à vous brûler les cuisses et à cuire à petit feu dans cette caisse en fusion ! Avec, vous attisez vous aussi la fournaise.
Dans ma maison, aucun instrument pour échapper à ce supplice. Ni climatiseur, ni ventilateur. Incorruptible de l'écologie, le prix à payer pour mettre mes convictions en relation avec mes actes, sans risquer le ridicule, c’est de se terrer à l’intérieur et d’attendre que le feu du ciel se calme. L'été, quand il est caniculaire, devrait vous exonérer de nos croyances imbéciles. Les pragmatiques, les sans convictions fixes, les nantis sans idéologie ne vivent pas pareil calvaire. Ils profitent de toutes les facilités que cette société du réchauffement climatique met à leur disposition.
La chaleur me fait délirer. Je me mets à écrire n'importe quoi. Il me faut pourtant sortir pour avoir un peu de pain. Je me lamente oubliant de penser à ce pauvre artisan boulanger qui a sué pour remplir sa mission quotidienne. Faire du pain par ce temps est un acte d’amour de son prochain. Je me dois de lui marquer ma solidarité en me rendant dans sa boutique. Mais comment ? En scooter ? Ce ne serait pas écologique, porter un casque et des gants par ce temps, c'est risquer l'apoplexie. Alors, le vélo, à allure modérée, en allant chercher un peu de fraîcheur en bord de Loire semble être la solution idoine.
Mon ordinateur sur les genoux, j'écris ce billet inutile. La machine apporte elle aussi des degrés supplémentaires, bien dérisoires tout autant qu’inutiles. Rien désormais dans tout ce que nous faisons n'échappe à la folle course effrénée vers notre perte. Regarder la télévision donnerait le même résultat tout en favorisant l'abrutissement.
Des gouttes perlent sur mon front. Je suis à nouveau victime d'une bouffée de chaleur n'en déplaisent aux tenants de la théorie du genre. Je n'en puis plus. Vivement l’hiver que je grelote tout à mon aise et que je puisse me plaindre du froid. J'ai besoin de trouver le repos. La canicule est l'exact contraire.
Je déraisonne. La chaleur sans doute. Il est grand temps que j'abandonne ce billet brûlant. Je vais le confier à la toile, cette grande vague qui m'apportera peut-être un peu de fraîcheur venue du large. Bonne journée à vous dans la douceur de vos foyers équipés, climatisés, ventilés et piscinisés. Le mien n'a jamais aussi bien porté son nom, c'est une fournaise diabolique. À la douche !
Chaudement vôtre.
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