La der dans ma Segpa ...
Le pot de départ.
Aimable plaisanterie …
L'année scolaire s'achève dans la déliquescence programmée, nouveau concept de notre éducation nationale qui n'accepte pas de voir la vérité en face. Il est parfaitement illusoire de faire revenir des élèves après les conseils de classe et la fermeture pour les épreuves du brevet. C'est implicitement donner raison aux absents. C'est également refuser la double nécessité d'un rituel collectif de début et de fin d'année sans lequel l'école devient un hôtel des courants d'air.
L'hypocrisie est à son comble dans cet établissement que je vais quitter sans regret. Je fais actuellement le joyeux animateur socio-culturel pour les deux élèves présents pendant que j'écris ces lignes. Dans le même temps, 4 adultes tiennent une conférence de chantier dans la pièce où nous sommes, les salles de classe étant elles aussi en travaux. Après avoir rafraîchi les murs, le Conseil Général dans sa logique propre refait les sols et daigne enfin se conformer à la loi en cablant les classes …
Ainsi donc, il est acquis pour tous, nos responsables politiques inclus, que les cours sont terminés ! Nous sommes désormais astreints à une présence vide de sens puisqu'elle n'est pas même consacrée à préparer la rentrée, organiser des projets ou remplir les inévitables fiches à renseigner éternellement qu'il nous fallait rendre bien avant. Nous sommes dans l'attente d'un temps qui n'en finit pas de s'étirer ….
C'est dans ce contexte désastreux que nous apprenons que nous sommes conviés jeudi soir après des cours qui n'existent plus au pot de départ organisé par notre collège de rattachement. Poursuivre l'ennui jusqu'à 17 heures 30 pour faire des risettes à des collègues que nous n'avons pas vus de l'année, la vaste et belle farce que voilà. Je partirai de ce lieu sans un bonsoir ni une risette impossible !
Comment faire bonne figure à des gens qui ne se sont pratiquement jamais déplacés aux conseils de classe de nos élèves qui, faut-il le leur rappeler, sont parfois les leurs ? Comment accepter un cadeau de départ alors que je ne suis jamais arrivé dans leurs murs ? Comment lever mon verre avec des gens que je ne connais pas et qui me le rendent pareillement ?
Pire que tout, il y a des professionnels que je ne peux nommer ici qui ignorent à un tel point nos élèves et nous mêmes que jamais ils ne se fendent d'un bonjour. Plus insupportable encore, je n'ai pas mis les pieds au CDI en deux années de présence en ce ghetto. Je n'ai pas plus reçu de journaux lors de la semaine de la presse ni n'ai été invité à une action quelconque organisée en ce point névralgique d'un collège ordinaire. Alors trinquer dans ces conditions est au-dessus de mes forces, j'aurais tant à leur dire …
Ne pensez pas que ce sont de mauvaises personnes. Ce sont simplement les circonstances imposées par un Conseil Général ségrégationniste qui favorisent de telles dérives. La mise à l'écart d'un groupe d'élèves, leur éloignement géographique (1Km 300 qui deviennent un gouffre) provoque à la fois notre repli sur nous-mêmes et cette réciproque ignorance abyssale.
Mes multiples jérémiades n'ont eu pour effet que le lancement de travaux d'embellissement de l'épave. La couche de peinture ne changera rien à l'apartheid scolaire voulu par un pouvoir politique honteux. S'il est une personne, une seule, avec laquelle j'aimerais trinquer à mon départ, c'est le Président de l'Assemblée départementale qui a entériné ce scandale.
Mais il y a aucune chance que ce grand personnage s'abaisse à venir en notre zone d'exclusion. Le courage politique a des limites. J'abandonne donc ce feuilleton lamentable. Voici le dernier numéro de la saga pitoyable. « En direct de ma Segpa » prend fin ici. J'ai la gorge nouée, je suis en colère devant ce gâchis monstrueux.
Vous retrouverez d'autres aventures scolaires, les réformes successives ont repoussé aux calendes grecques mon droit à la retraite.. Je ne suis donc pas prêt à arrêter ces chroniques de l'intérieur d'une structure d'exception, ce récit en direct d'un naufrage inéluctable. C'est le silence qui tue notre système aux mains de hauts fonctionnaires suicidaires. Vouloir ne pas taire ce qui se passe derrière nos murs, est un acte de résistance. Comptez sur moi pour ne pas abandonner ce combat !
Finalement leur
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