Le Menteur
Nicolas Sarkozy a su récemment incarner dans L’illusion comique un Matamore plus vrai que nature. Un personnage qui lui colle tellement à la peau que l’on ne sait plus très bien, désormais, qui s’exprime face aux micros et aux caméras, du chef de l’Etat ou de Matamore. Or voila que le président revient sur scène dans un autre rôle taillé pour lui par ce bon Corneille : Le Menteur !

Quel effet cela vous fait-il de côtoyer les grands de ce monde lors des sommets internationaux ? « Je suis en passe de les dominer tous », me répond-il avant d’ajouter : « Et parmi tant d’esprits plus polis et meilleurs / Il y croît des badauds autant et plus qu’ailleurs ! »
Autrement dit, me dis-je in petto, un ramassis de niais et d’incapables. Et que dire de votre gouvernement ? « Il y croît des badauds autant et plus qu’ailleurs ! »
Des oreilles doivent siffler, me redis-je in petto. Et qu’en est-il de l’Assemblée Nationale, du Sénat, du Conseil constitutionnel, de la Cour des comptes ? « Il y croît des badauds autant et plus qu’ailleurs ! »
Nous voilà bien, le disque est rayé ; passons à autre chose. Vous êtes entré en politique il y a fort longtemps. Comment expliquez-vous votre ascension au sein de la droite ? Le président se redresse sur son siège Louis XVI : « Mon nom dans nos succès s’était mis assez haut / Pour faire quelque bruit sans beaucoup d’injustice. »
Certes, mais depuis, quel a été votre part dans les succès de notre pays ? Nicolas Sarkozy me présente sa main droite d’un geste énergique et dit d’un ton chargé d’orgueil : « Nos armes n’ont jamais remporté de victoire / Où cette main n’ait eu bonne part à la gloire. »
Toujours aussi modeste ! Changeons de sujet. Qu’est-ce qui vous a séduit chez Carla, ce n’est tout de même pas sa voix ? À moins qu’il ne s’agisse de ses phéromones de gauche ? Le président rit de bon cœur puis redevient sérieux : « Attaqué par ses yeux, je leur rendis les armes / Je me fis prisonnier de tant d’aimables charmes. »
Voilà qui est clair, rien à ajouter. Et les journalistes ? Comment pourriez-vous définir vos rapports avec la presse ? Il prend un air gourmand et me répond : « J’aime à braver les conteurs de nouvelles, / Et sitôt que j’en vois quelqu’un s’imaginer / Que ce qu’il veut m’apprendre a de quoi m’étonner, / Je le sers aussitôt d’un conte imaginaire, / Qui l’étonne lui-même et le force à se taire. / Si tu pouvais savoir quel plaisir on a lors / De leur faire rentrer leurs nouvelles au corps… »
Mais enfin, convenez que vous mentez souvent, et avec un aplomb déconcertant. Comment faites-vous pour n’en être pas gêné ? « Le ciel fait cette grâce à fort peu de personnes ; / Il y faut promptitude, esprit, mémoire, soins, / Ne se brouiller jamais, et rougir encore moins. »
Certes. Cela dit, vous y allez fort. Et souvent. Hier encore avec Gandrange ou l’audiovisuel. Et cela n’est pas nouveau : vous avez même, à plusieurs reprises d’après le Canard Enchaîné, fait passer votre grand-père pour un héros combattant de la Grande guerre alors qu’exempté, il n’a jamais porté l’uniforme*. À quoi riment tous ces mensonges ? « Ne t’épouvante point, tout vient en sa saison, / De ces intentions, chacune a sa raison. »
Quand même, Corneille a le dernier mot lorsqu’il vous fait dire : « Blâmez-moi de tomber en des fautes si lourdes, / Appelez-moi grand fourbe et grand donneur de bourdes. » Nicolas Sarkozy rit cette fois franchement avant de m’avouer : « Cette tirade, je l’ai bannie du texte au profit de cette autre, écrite par Guaino : « Louez-moi d’être plus malicieux que palourde, / Appelez-moi grand maître et grand meneur de gourdes. »
Après les « veaux » du Général, voilà les « gourdes » de Sarko. Quel respect pour le peuple ! Un mot pour terminer. En admettant que vous décédiez soudainement, quelle épitaphe souhaiteriez-vous pour votre stèle ? Le visage du président s’illumine d’un sourire gourmand : « Si j’en crois Guaino, ce bon Corneille a écrit en parlant de lui-même : "Peu m’ont égalé à ce jour, mais aucun ne m’a dépassé !" Pas mal comme épitaphe, non ? Mais à l’évidence, elle n’est pas à la hauteur de mon personnage. C’est pourquoi je veux que l’on grave sur le monument funéraire qui sera érigé en mon honneur au cœur de la nef du Panthéon : "Beaucoup ont tenté de l’égaler, mais nul n’y est parvenu !" »
Incorrigible !
* Sarkozy et son grand-père
Le 3 mai 2006, Nicolas Sarkozy déclarait : « Oui, je suis un enfant d’immigré, fils d’un Hongrois, petit-fils d’un Grec né à Salonique, QUI S’EST BATTU POUR LA FRANCE pendant la Première Guerre mondiale. » Récidive du même le 10 avril 2007 lors d’un meeting à Tours avant le 1er tour de l’élection présidentielle : « J’ai été élevé par mon grand-père, je l’aimais passionnément. IL AVAIT FAIT LA PREMIERE GUERRE, et il avait eu peur, lui le Juif de Salonique, de la Seconde Guerre mondiale. » Gros problème : le grand-père en question, le docteur Benedict Mallah, n’a JAMAIS servi dans l’armée française au motif qu’il avait été exempté au titre de « soutien de famille » comme le montre page 64 le livre de Elise Karlin et Pascale Nivelle « Les Sarkozy, une famille française » tiré d’interviews des proches du président.
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