Question de volume
Il y a crâneur et crâneur...

Le volume crânien de l’homo sapiens adulte est d'environ 1500 cm3, c'est-à-dire un litre et demi, mais c’est une moyenne et l’écart autour de cette moyenne est très large : plus ou moins deux verres à moutarde, sinon plus. Par exemple, on sait qu’Anatole France et Gambetta dépassaient à peine le litre et qu’il fallait remplir au moins deux bouteilles pour Lord Byron ou Tourgueniev.
Une telle imprécision ne saurait satisfaire celui qui veut s’instruire de lui-même, curiosité bien naturelle si l'on pense que le « connais-toi toi-même » n’est pas une parole en l’air.
Il faut donc mesurer.
On pourra s'inspirer de la méthode suivie par la cuisinière qui veut connaître la capacité de son moule à tarte : elle le remplit d’eau à ras bord et recueille le liquide dans un verre gradué.
En l’occurrence, un travail préalable sera nécessaire car il y a plusieurs trous dans un crâne normalement constitué et les obstruer de l’extérieur est loin d’être évident. En tout cas, si on veut faire les choses proprement.
Il n’y a qu’une seule vraie solution : ouvrir.
On sciera donc le crâne en deux, à l’horizontale, à peu près à la hauteur d’un béret basque.
Il est important de couper aussi droit que possible. L’idéal sera d’utiliser une scie circulaire de qualité, mais je ne saurais trop conseiller de confier l’opération à un spécialiste. Contre un peu de monnaie, on trouvera facilement un technicien serviable au rayon découpage-sur-mesure d’un magasin de bricolage.
Avant de procéder au colmatage dont je parlais plus haut, celui des trous que la Nature a pratiqué dans la boite et son couvercle (surtout la boite), on en nettoiera tous les recoins soigneusement. Il arrive en effet que la matière molle ait laissé ici ou là quelques concrétions - mauvais souvenirs, traumatismes, chagrins ou autres résidus de cette sorte - qui pourraient fausser la mesure.
Une brosse à dents à poils durs fera parfaitement l’affaire.
La suite ne présentera aucune difficulté si on utilise le bon matériau. On évitera la mie de pain ou la purée de pomme de terre, qui ne résisteront pas longtemps, et même le chewing-gum ou le ciment de rebouchage qui, eux, sont parfaitement efficaces mais on aura un mal fou à s'en débarrasser quand on aura terminé, ce qui est quand même la moindre des choses.
Je recommande la cire. Amollie à feu doux, elle s’appliquera facilement et un simple passage à l’eau chaude permettra de l’enlever aisément. Ai-je besoin de recommander l’eau froide pour le remplissage ? Faute de quoi la cire pourrait fondre ; j’imagine qu’on y aurait pensé.
Voilà.
Un coup de serviette éponge et quelques points de colle parachèveront la remise en état.
Evidemment, le trait de scie restera visible, mais c’est un maigre inconvénient si on songe au service rendu et à la facilité avec laquelle on pourra, si on le souhaite, effectuer d’autres relevés. De plus, on s’apercevra vite, au simple regard des passants, que cette étrange cicatrice ne manque pas d’élégance.
9 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON