David contre Goliath, un classique de coupe du monde
L’Uruguay pétrifie le Marcana
On pense évidemment à l’édition 1950. Pas de finale cette année là, mais une poule à quatre équipes en guise de phase finale. L’ultime confrontation, considérée comme la finale officieuse, entre l’Uruguay et le Brésil décidera du vainqueur, sachant que la Seleçao sera sacrée en cas de match nul. Les Uruguayens semblent un cran en dessous, loin de leur sacre mondial en 1930 et des deux jeux olympiques qu’ils avaient remportés dans les années 20 : à l’époque, les Jeux faisaient office de compétition internationale reine en matière de football, il faudra attendre Jules Rimet et 1930 pour que la coupe du monde de la FIFA ne prenne le dessus.
Les auriverde ont tellement survolés cette édition que le trophée Jules Rimet ne semble pouvoir leur échapper : 7-1 contre la Suède, 6-1 contre une sélection espagnole qui joue les premiers rôles sur le vieux continent tandis que les Uruguayens ont du batailler ferme pour vaincre les suédois (3-2) et ont du se contenter du nul contre l’Espagne (2-2). Ce mondial doit voir le sacre du Brésil, il n’y a pas d’autre destinée envisageable.
L’enceinte pharaonique du Marcana et ses 200 000 spectateurs, restée dans la légende, achevée juste à temps pour la finale est censée clore l’épopée brésilienne. Mais la pression accable les brésiliens et malgré l’ouverture du score de Friaça, repliés en défense ce sont de bien ternes brésiliens qui finissent par craquer, poignardés par Schiaffino et Ghiggia. David a terrassé Goliath, le sacre annoncé des brésiliens n’aura pas lieu, et c’est le mutisme qui habite le Maracana. Le Brésil s’insurge contre ses joueurs à qui il ne manquait qu’un petit détail pour s’imposer, un petit détail qui fit toute la différence : l’humilité. Jamais on ne pardonnera cet échec à la Seleçao cru 1950, et le portier Barbosa, auteur d’une erreur d’appréciation sur le second but, sera maudit jusqu’à la fin de sa vie.
Le miracle de Berne
Quatre ans plus tard, rebelote à Berne où la RFA décroche la première couronne mondiale de sa riche histoire en battant la Hongrie : c’est le Miracle de Berne. Si les magyars ont cessé depuis quelques décennies de côtoyer les sommets du football mondial, ils sont à l’époque ce que l’Espagne est à cette édition 2010 : les grandissimes favoris.
La Hongrie, c’est quatre années d’invincibilité, une victoire à Wembley 6-3 et Ferenc Puskas, le "major", l’un des meilleurs avant-centre de l’histoire. Au premier tour, c’est un récital : un 9-0 infligé à la Corée du Sud et un 8-3 contre la...RFA. Sepp Herbeger, alors sélectionneur de la Mannschaft avait aligné une équipe B, considérant la défaite comme une certitude.
Le 4 Juillet 1954, Hongrois et allemands se retrouvent en finale : mais ce sont des Magyars diminués qui s’apprêtent à disputer leur deuxième finale de coupe du monde : ils ont du batailler ferme en demi-finale, jusqu’au bout des prolongations contre l’Uruguay. L’avant-centre Nandor Hidegkuti déclarera plus tard que jamais nous n’aurions dû nous laisser amener aux prolongations, je crois bien qu’elle nous a tués.
A Berne, le match semble joué : 2-0 pour la Hongrie moins de dix minutes après le coup d’envoi. C’est là que le miracle commence En neuf minutes, les allemands égalisent. La tension et l’énervement gagne les magyars, à l’image de Puskas, certes blessé. A six minutes du coup de sifflet final, Rahn enrhume la défense adverse et donne l’avantage aux allemands d’une frappe pleine d’autorité. 3-2, les dés sont jetés, le miracle de Berne est né. On apprendra plus tard que la Mannschaft avait eu recours à des produits dopants pour s’imposer : peut importe, David a battu Goliath, la légende est trop bien installée pour s’écrouler.
Le monde pleure la victoire du Kaiser
20 ans plus tard, nouvel exploit, à nouveau signé du sceau allemand. Ou plutôt du sceau d’un empereur, le kaiser Franck Beckenbauer qui s’est mué tout au long de la compétition en sélectionneur-joueur. Le libéro est le capitaine d’une équipe impopulaire, rugueuse, battue en ouverture par la RDA.
En finale, à Munich, la Mannschaft retrouve l’équipe qui a fait vibré le globe, infligeant une déculottée à l’Argentine 4-0 (tiens, tiens) et au Brésil 2-0, les Pays-Bas. Emmenés par Cruyff, les Oranje font rêver la planète avec leur football total qui a permis à l’Ajax d’Amsterdam de s’imposer comme le meilleur club d’europe et le prodige Johann Cruyff, au sommet de sa carrière.
Ces Oranje mécaniques à la côté de popularité inégalable ouvrent le score en tout début de match sur penalty, suite à un tacle peu académique d’Höness sur Cruyff, auteur d’un beau festival. 1-0 pour la Hollande, l’Allemagne craint la déroute, le monde entier se réjouit de la victoire quasiment acquise de ces Oranje étincelants.
Le journaliste Erik Bielderman se souvient dans une de ses chroniques vidéos que les hollandais commencent alors à tomber dans le piège de l’arrogance, de la suffisance, oubliant d’inscrire le deuxième but, et l’Allemagne finit par s’imposer. Le monde entier pleure, j’avais 15 ans à l’époque, j’étais devant ma télé et je me souviens d’avoir effectivement chialé comme un gamin devant ces hollandais magiques battus par les allemands qu’on aimait pas à l’époque ajoute Bielderman. Nouvel exploit en finale de mondial, les Pays-Bas en font les frais, David a encore battu Goliath : rebelote dimanche soir ?
L’Espagne et sa suffisance insupportable
Trois exploits, auxquels il faut ajouter tous ceux qui ont rythmé les phases finales et les phases de groupes, en dehors des finales. Les Pays-Bas ont ils les armes pour s’inscrire dans cette liste ? Cette sélection n’est guère séduisante, elle ne doit son succès qu’à ses mercenaires (voir mon article à ce sujet) et les simulations de Robben et l’impunité de Van Bommel rendent ces Oranje détestables. Cependant, je serai derrière eux dimanche. Tout d’abord car si la génération de Sneider ne mérite pas son étoile, celle de Cruyff si. Et voir les Pays-Bas vierges de tout trophée mondial est une aberration.
Et si je n’aime pas les Pays-Bas, j’aime l’Espagne encore moins. En premier lieu, l’élimination de l’Allemagne fut tellement imméritée à la vue du jeu proposé par l’Espagne depuis le début de la compétition et celui de la Mannschaft (voir mon article à ce sujet)
De plus, La Roja symbolise l’arrogance, la suffisance. Ce sentiment de supériorité qui fait titrer le quotidien As ce matin "somos los mejores" (nous sommes les meilleurs). Cette condescendance qui leur faisait dire en 2006 qu’ils allaient mettre Zidane à la retraite. Cette arrogance de Sergio Ramos qui la veille du match retour contre Lyon se disait certain de gagner facilement 3-0. C’était plus facile que prévu. Nous avons une très bonne organisation, ce qui nous a permis de nous rendre le match plus facile. Nous sommes bien conscients de nos qualités : ces mots sortis de la bouche de Vicente Del Bosque ne confirment-ils pas cette suffisance insupportable ? Une défaite de l’Espagne serait une bonne leçon pour nos amis ibères et la victoire des sentiments nobles face à l’arrogance espagnole.
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