Eto’o et la retraite russe
En allant se perdre au Dagestan, petit territoire du Caucase, Samuel Eto’o a troqué son âme contre le contrat le plus juteux de l’histoire du football. Il tente aujourd’hui de se racheter une conscience mais peine à cacher son nouveau rôle de propagandiste russe.
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Mais qu’est ce qui a pris à Samuel Eto’o ? L’attaquant camerounais, ancienne star du Barça et de l’Inter coulait des heures heureuses sur les plus grandes stades européens il y a encore un an. Jouissant d’une popularité importante, le jeune trentenaire pouvait rêver d’une fin de carrière riche en titre. Oui mais voilà, Samuel Eto’o n’est pas l’ange que laisserait entrevoir son visage de bambin.
Bon chic bon genre
Costume impeccable, verbe parfait, Samuel Eto’o séduit. C’est au moins la deuxième raison de sa grande popularité, derrière ses fantastiques capacités balle au pied. Son histoire, rude, n’est pas non plus innocente au phénomène. Né au Cameroun en 1981, refoulé de plusieurs centres de formations français, Eto’o s’installe durablement en Europe à quinze ans, au Real Madrid. Un conte de fée qui va rapidement se transformer en cauchemar. Barré par Raul et Morientes, le camerounais s’en va pour Majorque. La suite, c’est sous le feu des projecteurs qu’il la vivra, exposant aux yeux de tous un talent unique.
Grande gueule
Sa popularité, Samuel Eto’o l’utilise pour défendre les intérêts du football africain et jouer un rôle politique important au Cameroun. Mais son égo surmultiplié l’emporte dans diverses polémiques. En 2010, il est au coeur d’une vive altercation verbale avec Roger Milla, l’autre légende vivante du football camerounais. Celui qui a prit l’habitude aujourd’hui de parler de lui à la troisième personne la joue grand moralisateur. Une attitude qui va devenir, pour beaucoup, insupportable après la signature d’Eto’o dans le club russe du FK Anzhi Makhachkala. Une situation que son compatriote journaliste Pepin Haman Mana regrette : « C’est la fin prématurée d’une carrière. Il avait encore quelques belles années de haut niveau devant lui. Mais depuis le temps, le personnage ne se voit vraiment plus comme un simple footballeur. Il donne son avis sur tout et sur tous. »
Discrédit moral
Si Michel Platini, grand défenseur devant l’éternel du développement planétaire du football a salué le départ d’Eto’o pour le Dagestan, le transfert a surtout créé la polémique. Assuré d’un salaire de 55 000 euros par jour, sans les primes, soit 20 millions par an, le camerounais n’a pu cacher bien longtemps les raisons de son départ. Mais l’affaire se serait arrêté là si Samuel Eto’o n’avait pas continué de faire parler de lui. En novembre, il est le meneur d’une grève – décidément à la mode- menée par la sélection camerounaise, pour réclamer une prime de 1500 euros. Le « conflit social » se conclura par l’annulation d’un match amical prévu contre l’Algérie, le 15 novembre dernier. Rappelons que l’ancien Interiste aurait pu payer la fameuse prime à ses 22 coéquipiers en seulement 15 heures de travail. Populiste, démagogique, mais bien réel. Samuel Eto’o aime l’argent et ne veut pas se priver d’un centime.
Ambassadeur russe
Une attitude qui aurait pu être simplement risible si le joueur camerounais ne profitait pas de sa situation pour vanter les mérites du pays qui vient de l’accueillir. Samuel Eto’o répète à tout va que « l’avenir du football mondial est ici », en Russie. Oubliés les assassinats et emprisonnements politiques, Samuel Eto’o n’a que faire de la situation critique que connait le Dagestan, petite république caucasienne, détentrice du record mondial de ministres assassinés. Une situation qui n’inquiète guère le joueur camerounais qui s’entraine, par sécurité, à 1500 kilomètres de là, dans la banlieue moscovite. Mais le transfert de l’attaquant africain entre dans un projet plus large de rachat médiatique entamé par la Russie, à l’approche de la Coupe du Monde 2018 qu’elle accueillera.
Jeu de dupes
Eto’o n’hésite pas à défendre le football russe et tente, à travers un vaste projet de communication, d’attirer d’autres vedettes dans le championnat. Et ce n’est pas le gilet pare-balle qu’on lui a offert en guise de prime de signature qui pourra inquiéter la star camerounaise. Une attitude déplorable que Roman Pavlyuchenko, joueur de Tottenham a tenu à signaler, rappelant que son pays reste sclérosé par la mafia et la corruption. Selon Samuel Eto’o, « tous les jours, des joueurs importants m’appellent pour me demander s’il y a une opportunité de venir jouer ici, en Russie ». Jusqu’à quand ? Qui peut dire aujourd’hui combien de temps durera le jeu de dupes qui consiste à donner des millions à des joueurs comme Samuel Eto’o pour faire oublier au monde entier que la misère la plus totale habite toujours le Dagestan ? Pas la FIFA en tous cas. L’instance suprême du football mondial qui a récemment confié à la Russie et au Qatar l’organisation des Mondiaux 2018 et 2022 ne semble pas s’inquiéter de la morale, tant qu’il y a de l’argent. Que Sepp Blatter se rassure, il a peut être trouvé, en la personne de Samuel Eto’o, un successeur qui partage ses « valeurs ».
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