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Accueil du site > Culture & Loisirs > Sports > L’Helvético « Federer – Wawrinka » : sommet du sport (...)

L’Helvético « Federer – Wawrinka » : sommet du sport suisse

Après leur sacre commun en Coupe Davis fin 2014, les deux meilleurs joueurs de l'histoire du tennis helvétique, Roger Federer et Stanislas Wawrinka, s'étaient affrontés pour la 21e fois en 10 saisons lors du Masters de Londres 2015. Un dernier duel en date qui avait, une fois de plus, tourné à l'avantage du « Maestro ». Amis dans la vie mais bel et bien rivaux sur le circuit, chronologie et décryptage du derby 100% suisse de l'ATP.

En football, il y a les Classicos (Barça-Real, OM-PSG), la France a son Olympico (OM-OL) et les Alsaciens ont même droit à un Alsacico (Strasbourg-Colmar, non ce n’est pas une blague !). Du côté des Alpes, depuis plus d’une décennie, les fans de tennis suisses se régalent quant à eux avec leur Helvético, « Rodgeur vs Stan », le seul duel intra-national de l’actuel circuit ATP à mettre aux prises des joueurs titrés en Grand-Chelem. De plus en plus souvent opposés l’un à l’autre depuis 2005, ces deux alpinistes raquettes en mains (qui cumulent ensemble quelques 25 titres majeurs en simple dont 19 en GC + une médaille d’or olympique et une Coupe Davis, excusez du peu) ont ainsi porté le sport de leur pays dans des sphères qu’il n’avait encore jamais atteintes. Focus-rétro sur les 10 épisodes les plus marquants d’une rivalité pas forcément si amicale que ce que l’on pourrait croire…

Rotterdam 2005, 1/8e de finale, victoire de Federer (6-1 6-4)

Lors de cette 1ère assez confidentielle (et plutôt anecdotique) entre « petits suisses », Roger Federer se présente dans la peau du N°1 mondial en puissance qu’il est déjà à l’époque. De fait, alors que RF (23 ans) vient tout juste de réaliser le 1er de ses 3 Petit-Chelems en 2004, son jeune compatriote (19 ans) découvre pour sa part à peine les dures exigences du Top 100. Encore trop tendre, et certainement un peu impressionné, Wawrinka ne pourra que regarder le train passer.

Dubaï 2006, 1er tour, victoire de Federer (7-6 6-3)

Un an après leur rencontre initiale, Stan a visiblement pris de la bouteille. A l’été 2005, il a disputé sa 1ère finale sur le circuit ATP (à Gstaad) et pointe désormais aux portes du Top 50 mondial. Pendant une grosse demi-heure, le benjamin tiendra ainsi la dragée haute à son illustre aîné, le poussant même à disputer un jeu décisif. A cet instant, rattrapé par le stress, Wawrinka flanche. Le match tourne alors à la démonstration en faveur de Federer qui enchaîne les points, lui infligeant un cinglant 7-0 lors du tie-break avant de boucler le 2e set en à peine plus de 20 minutes.

Monte-Carlo 2009, 1/8e de finale, victoire de Wawrinka (6-4 7-5)

Suite à leur succès en double aux J.O. de 2008, les compères ont gagné un surnom commun, « Fedrinka » (né de la contraction de leurs patronymes respectifs). En outre, leur tandem affiche désormais une belle complicité. Par ailleurs, le titre olympique a également (un peu) permis à Wawrinka de sortir de l’imposante ombre médiatique de la montagne « fédérienne » du côté de leur confédération natale. Se montrant plus audacieux que jamais, et visiblement dans un grand jour sur sa surface de prédilection (la terre-battue), Stan joue cette fois crânement sa chance pour surprendre Rodge lors de ce 3e épisode. Une défaite qui n’entamera cependant pas, outre-mesure, la confiance d’un Federer qui remportera dans la foulée (tout juste un mois et demi plus tard) l’un des titres les plus importants de sa carrière à Roland-Garros.

Roland-Garros 2010, 1/8e de finale, victoire de Federer (6-3 7-6 6-2)

Y aurait-il pu y avoir plus bel endroit que le court central de l’Open de France pour ce 1er « Helvético » de l’Histoire en Grand-Chelem ? Fort du précédent monégasque de 2009, Stan est persuadé d’avoir une carte à jouer. De surcroît, il aborde ce 1/8e en bonne forme, sans avoir perdu le moindre set lors des 3 premiers tours et après avoir atteint les quarts du Masters 1000 de Madrid en battant notamment Söderling (le finaliste et tombeur de Nadal à RG 2009). Pourtant, encore une fois, Waw débute la rencontre la fleur au fusil. En face, Federer en profite pour s’offrir le break d’entrée avant de s’adjuger rapidement la 1ère manche. Malgré un 2e acte conclu au terme d’un tie-break accroché (7-5), le natif de Lausanne se montre à nouveau impuissant face au tenant du titre qui subira pourtant le joug de… Söderling au tour suivant.

Australian Open 2011, 1/4 de finale, victoire de Federer (6-1 6-3 6-3)

De tous leurs affrontements, celui de l’Open d’Australie 2011 constitue certainement le plus symptomatique du complexe d’infériorité dont souffre Waw face au « Maître ». Sur le papier, la partie s’annonce plus disputée que jamais. D’un côté, régulièrement dominé par Nadal et Djokovic, Federer n’est plus le roi incontesté du circuit ATP. De l’autre, Wawrinka, qui vient de faire son entrée dans le Top 20, s’est débarrassé du « rookie » Dimitrov puis de Monfils et, surtout, de l’ancien N°1 mondial américain Andy Roddick. Mais pour la 7e fois en 8 duels, il va perdre. Plus que la défaite, c’est la manière qui interpelle, ce revers faisant montre de la totale incapacité du Vaudois à jouer son meilleur tennis dès lors qu’il se retrouve opposé au Bâlois. Entre 2009 et 2013, Stan s’inclinera ainsi à… 11 reprises consécutives face à son compatriote !

Monte-Carlo 2014, finale, victoire de Wawrinka (4-6 7-6 6-2)

Par le biais de son 1er titre en Grand-Chelem, un titre obtenu après avoir triomphé du N°2 (Djokovic) et du N°1 (Nadal) mondial en Australie (s’il vous plaît !), celui que l’on appelle désormais « Stan the Man » vient tout juste de changer de dimension. Pratiquement 5 ans jour pour jour après son seul et unique succès contre Fed, le rapport de force entre les 2 Suisses n’a donc jamais paru aussi équilibré. Pour leur 1ère (et, pour l’heure, unique) opposition en finale, le scénario de la rencontre confirmera cette tendance. Dans un match où les breaks seront légions, le mano a mano basculera au tie-break du 2e set, RF craquant ensuite physiquement dans l’ultime manche. Cette défaite empêchera d’ailleurs par la même occasion Federer de compléter son puzzle de titres en Masters (Golden Masters), Monte-Carlo étant toujours l’un des deux seuls « 1000 » (avec Rome) qui manquent à la collection de « l’horloger » de Bâle.

Wimbledon 2014, 1/4 de finale, victoire de Federer (3-6 7-6 6-4 6-4)

Pour la 1ère fois, les chemins des deux Helvètes se croisent dans le temple du tennis mondial. Ultime preuve que Stan ne fait désormais plus aucun complexe mental vis-à-vis de Rodge, le Lausannois va commettre l’effronterie de venir titiller « Sa Majesté » Roger Federer dans son jardin londonien. Habituellement peu à l’aise sur gazon, SW se détache à 3-1 et boucle le set initial en 30 minutes. Wimbledon retient son souffle et la seconde manche vire alors au bras de fer pendant plus de 50 minutes, les protagonistes parvenant tous deux à tenir leurs jeux de service. A l’expérience, Fed se sortira finalement du piège en enlevant le tie-break, avant de se montrer chirurgical (avec un seul break dans chacun des 3e et 4e sets) pour conclure la partie.

Masters Cup 2014, demi-finale, victoire de Federer (4-6 7-5 7-6)

Sans aucun doute la plus houleuse mais aussi la plus belle de leurs oppositions, cette demie du Tournoi des Maîtres 2014 restera dans les annales. Engagée dans une cause nationale commune : la quête d’un 1er titre historique en Coupe Davis pour la Suisse, la paire helvétique a fait le pacte de ramener le Saladier d’Argent à la maison fin-novembre. Hélas, le calendrier est ainsi fait qu’une semaine seulement avant la grande bataille programmée face aux Bleus, les deux coéquipiers de la « Nati » de tennis vont se retrouver face à face lors du Masters de Londres. Loin de s’être mis d’accord pour se préserver en vue de l’échéance lilloise, ils entrent alors dans l’arène avec la ferme intention d’en découdre, se rendant coup pour coup pendant près de 3 heures d’une lutte acharnée. Au bout de cet énorme combat au suspense hitchcockien, c’est finalement le plus âgé des deux qui s’imposera. Mais ce duel va laisser des traces et mettre à mal le serment d’allégeance réciproque que les deux hommes se sont faits en début de saison. Pendant le match, Mirka, la femme de Federer, s’est en effet permise d’invectiver Wawrinka d’un « cry baby » moqueur à son encontre, tandis que ce dernier contestait un point litigieux auprès du juge de chaise. S’en suivra, après le match, une explication des plus tendues dans les vestiaires entre les deux partenaires de sélection. Un épisode fâcheux qui, bien que ponctué d’un « happy-end » en Coupe Davis, aura néanmoins contribué à mettre en lumière que l’entente entre les deux champions n’était peut-être pas si cordiale que cela…

Roland-Garros 2015, 1/4 de finale, victoire de Wawrinka (6-4 6-3 7-6)

Alors que le tirage au sort du tournoi de la Porte d’Auteuil 2015 vient tout juste d’avoir lieu, chacun scrute le verdict de haut en bas pour voir où son nom apparaît. Les 4 principaux favoris (à savoir Djokovic, Nadal, Murray et Ferrer) ont tous été placés dans la partie-haute du tableau. En un coup d’oeil, le constat est donc limpide. Dans la partie-basse, Stan et Roger savent qu’ils disposent (pratiquement) d’un boulevard. Comme prévu, nos deux montagnards sont au rendez-vous des quarts. Les bookmakers prédisent un match serré, il n’en sera pourtant rien. Dès l’entame, un Stan de gala impose sa puissance et fait vaciller la statut d’un Federer débordé, et manifestement agacé, qui s’inclinera ce jour-là en 3 sets secs. Est-ce l’improbable short à carreaux aux allures de pyjama qu’arbore le Vaudois qui a perturbé RF ? Assurément, non ! Car Wawrinka aura retrouvé durant ce RG 2015 le niveau stratosphérique qui était déjà le sien à l’Open d’Australie 2014. Précis, puissant et incisif à l’extrême durant toute sa flamboyante quinzaine parisienne, conclue en apothéose par un récital final contre Djokovic, « Stanimal » (surnom glané au cours du tournoi) signera un succès retentissant (son 2e en Grand-Chelem) après s’être à nouveau débarrassé en chemin des N°1 et 2 mondiaux pour soulever la Coupe des Mousquetaires. Tout simplement phénoménal !

US Open 2015, demi-finale, victoire de Federer (6-4 6-3 6-1)

Cette grande première new-yorkaise constitue le 6e round de la paire « Fedrinka » en Grand-Chelem. Depuis RG, les trajectoires des « tennismen-chocolatiers » se sont à nouveau inversées. Tandis que « Fédé » a pu redécouvrir le goût d’une finale à Wimbledon ainsi que celui d’un titre en Masters 1000 (Cincinnati), les récents résultats en dents de scie de « Wawa » suggèrent qu’il a apparemment eu certaines difficultés à digérer son triomphe hexagonal. Etat de faits qui va vite se confirmer sur le court du Arthur Ashe Stadium par le biais d’une victoire-express de « FedEx » en 1h33 de jeu. Ce dernier enfoncera d’ailleurs le clou 2 mois plus tard lors d’un « remake » (tout aussi expéditif) de la saison passée en demi-finale du Masters (victoire de RF 7-5 6-3 en 1h10).

Bilan actuel, statistiques et perspectives

Pour l’heure, le bilan de leurs joutes respectives demeure sans appel, le Bâlois ayant pris l’ascendant sur le Vaudois à 18 reprises lors de leurs 21 confrontations. Les statistiques confirment cette domination et le net ascendant dont dispose toujours « The Master » sur son cadet. Outre le 18 à 3 en face-à-face, tous les autres ratios sont ainsi largement en faveur de l’homme aux 17 titres du Grand-Chelem, comme le démontre le tableau suivant (établi au terme de la saison 2015) :

Joueur Roger FEDERER Stan WAWRINKA
Victoires 18 3
Dur intérieur 5 0
Dur extérieur 8 0
Terre-battue 4 3
Gazon 1 0
% total 85,71 14,29
Sets 42 (79,25%) 11 (20,75%)
Jeux 313 (57,96%) 227 (42,04%)
Tie-breaks 8 (72,73%) 3 (27,27%)

Si l’on se fie aux chiffres, on constate que RF inflige un sévère 14-0 hors terre-battue à son homologue du Top 5, Wawrinka faisant plus ou moins jeu égal avec Federer uniquement sur la surface ocre. Toutefois, les données en termes de jeux remportés montrent aussi que leurs affrontements ne basculent très souvent que sur d’infimes détails, l’expérience de Fed faisant la plupart du temps la différence dans les instants décisifs (notamment aux tie-breaks). En outre, les incroyables progrès accomplis par le Romand depuis 2013 (année de son entrée dans le Top 10) prouvent également que l’écart de niveaux entre les deux joueurs, tant sur le plan technique que psychologique, n’a cessé de se resserrer au fil du temps. Enfin et par ailleurs, sur le plan personnel, même si leur relation n’est peut-être pas aussi idyllique que d’aucuns pourraient le penser, leurs succès communs aux Jeux Olympiques ainsi qu’en Coupe Davis ont tout de même contribué à forger entre eux une amitié certaine, doublée d’un profond et solide respect mutuel.

Désormais tous deux trentenaires, gageons que cette bataille de légendes entre deux des plus beaux revers-à-une main de la planète-tennis nous offrira encore quelques grands moments. Avant leurs retraites, nombreux sont ceux qui espèrent ainsi assister au moins une fois à un Helvético en finale d’un tournoi du Grand-Chelem… Au pays des lacs et des montagnes, les fans de la petite balle jaune ne pourraient évidemment pas rêver d’un plus bel épilogue.

Lionel Ladenburger

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5 réactions à cet article    


  • Clark Kent Jeussey de Sourcesûre 31 décembre 2016 09:18

    Quand je pense que la Suisse n’a jamais eu de médaille olympe en curling, moi ça me démoralise !


    • Lionel Ladenburger Lionel Ladenburger 31 décembre 2016 10:28

      @Jeussey de Sourcesûre
      LOL Jeussey, effectivement, quelle injustice !!!


      Sinon plus sérieusement, une petite erreur s’est glissée dans l’article, à eux deux les deux champions suisses comptabilisent désormais 26 titres majeurs en simple dont 20 titres du grand-chelem depuis la victoire de Wawrinka cet été à l’US Open. Mea culpa et bon réveillon à tous ;)

    • Harry Stotte Harry Stotte 31 décembre 2016 10:53

      @Lionel Ladenburger

      « ...les deux champions suisses... »


      Si on veut, mais Wavrinka est quand même de père polonais et de mère allemande, ce qui fait qu’il serait miraculeux qu’il portât une seule goutte de sang l’apparentant à l’un ou l’autre des quelque 600 Suisses massacrés aux Tuileries, le 10 août 1792, par la canaille révolutionnaire.

    • vesjem vesjem 31 décembre 2016 11:35

      @Lionel Ladenburger
      persiste et signe : un sportif qui s’affirme sur le tard , çà sent l’embrouille (façon « pot belge ») ; un indice : le nez plutôt rouge après l’effort (amstrong ...)


    • WALD 31 décembre 2016 13:20

      J’ai toujours apprécié Wawrinka, je trouve qu’il a été novateur dans le tennis des années 2010. Il était à l’époque le seul représentant d’une filière de jeu assez offensive, capable d’accélérer brutalement à plat et avec un revers à une main qui n’était pas une concession coquette à une époque révolue, mais un coup puissant et tout à fait adapté au tennis moderne (comme le revers de Hénin il y a quelques années). Et en ça, il était totalement différent de Fed, qui a toujours eu les moyens techniques, mais qui a eu tendance pendant des années à jouer trop défensif et trop mou (depuis Ljubicic il a beaucoup changé). 


      Je n’ai pas l’impression que le je de Wawrinka a tellement changé depuis 2013 (il est à mon sens déjà au niveau qui est le sien depuis) et sa défaite de justesse face à Djoko à l’Australian Open de cette année. Juste un peu plus de lucidité tactique, de mental et de gestion des points importants, peut-être un peu plus de patience dans la construction des points, en attendant les bonnes positions pour faire parler sa puissance. En tout cas, aucune révolution technico-tactique. Par exemple, le Federer (en bonne santé) que l’on a vu depuis l’été 2015 et la tournée sur ciment américaine a fait des changements techniques (à mon avis de non spécialiste) plus lourds dans son jeu, surtout en se forçant à être plus agressif et à rentrer plus dans la balle, notamment en retour et/ou en revers. Wawrinka illustrerait très bien le discours qui veut que les différences dans le tennis de haut niveau se font beaucoup sur le plan mental et la gestion des points importants. 

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