Nanar de retour aux affaires ?
Bernard Tapie a les amours fidèles. Si, si. Et son coeur bat toujours la chamade pour l’OM. Seul petit souci, la belle phocéenne a un prix. Du coup, Nanar repart à la chasse au grisbi.
En février dernier, Tapie faisait une brève escale à Hô Chi Minh-Ville (ex-Saigon). Une aubaine pour le Business Week local auprès duquel Tapie justifiait sa présence au Vietnam afin d’étudier « la possibilité de monter un théâtre ».
L’interview accordée au confrère était ainsi titrée : « Retour aux affaires ? Non je suis un artiste ! » (cf. ITW Tapie sur le site).
Sacré Nanar et chapeau l’artiste ! Ambassadeur culturel, même Sarkozy n’y avait pas pensé. Du reste, renseignement pris, pas plus de théâtre que de beurre en broche à l’horizon. C’est le pétrole et la fièvre de l’or noir dont Tapie est saisi depuis plusieurs mois qui explique sa présence à Saigon.
Le pétrole encore le conduit quelques semaines plus tard à prendre langue avec le président ivoirien. Sous couvert de promouvoir la candidature de son nouvel ami Sarkozy, l’artiste multicartes, flanqué de son impresario Loïk Le Floch Prigent, espère arracher au passage quelques juteuses concessions à Laurent Gbagbo.
Eventé en avril par Bakchich ce mini-sommet franco-ivoirien a été remis à des jours plus discrets : « Tapie et son équipe ont été très déstabilisés par cette fuite. Ils traquent la taupe », nous confie cette dernière. Mais l’invitation à Abidjan a bien été lancée, grâce entre autres à Basile Boli.
Ancien joueur de l’ OM, d’origine ivoirienne, « Basilou » a rejoint Sarkozy, dont il se dit « conseiller » et la « dream team » du Nanar. « Homme de gauche », le « larmoyant de Bari » travaille notamment au rapprochement du socialiste Gbagbo et du nouveau président. Dans les colonnes du quotidien ivoirien Le Patriote (8 mai), il explique que si les dirigeants socialistes français ont jugé bon de déclarer le président ivoirien « infréquentable », monsieur Sarkozy, lui, « n’a rien dit sur le président Gbagbo ».
Et à l’occasion, Nanard et Basile font quelques virées ensemble. Aucun des deux bonhommes n’a assisté à la finale de coupe de France OM-Sochaux. À La Provence, Tapie explique ne pas pouvoir assister au match pour cause de départ vers Dubaï.
Petit cachotier. C’est à Bahreïn qu’on trouve une trace avérée de son passage. Dans ses bagages, l’incontournable le Floch mais peut-être aussi Basile Boli. Présence qui, si elle était confirmée, pourrait donner une teneur footbalistique à cette virée moyen-orientale et un peu de consistance à la piste d’investisseurs made in Golfe persique pour succéder à un Robert Louis-Dreyfus à bout de souffle à la tête de l’OM.
On voit la queue du serpent de mer
Business, pétrole, politique ! Au cocktail détonant qui marque le grand retour aux affaires de Super Nanar ne manque donc plus qu’un peu de football et pour corser le tout, à Marseille bien entendu !
Bien plus qu’Adidas, l’OM reste la grande affaire de sa vie. Rien de ce qui se passe à l’OM n’échappe à Tapie et nombreux sont ceux à penser qu’il continue d’en tirer toutes les ficelles en coulisse. Et les mêmes d’ajouter : « Il n’a qu’une idée depuis qu’il pense pouvoir se remettre à flots avec le Lyonnais, racheter l’OM ! ». D’où la suractivité actuelle du bonhomme dans la recherche de grisbi.
Mais qu’est ce que l’OM ? Le club de foot le plus populaire du pays (et de loin), certes, mais dont le stade appartient à la mairie et la billetterie est en partie aux mains des clubs de supporters (délégation concédée par Tapie).
Lors du match OM/Sochaux au Stade de France, 77 % des places dévolues au club ont ainsi été vendues par les clubs de supporters. Gérées sous forme associative ( à but non lucratif ... ), ces clubs brassent des sommes considérables n’hésitant pas à facturer aux minots quatre euros le ticket de métro permettant de rallier la Gare de Lyon au Stade de France !
Le parquet de Marseille a bien un jour promis de se pencher sur le problème mais ça n’est jamais le moment et, comme l’a déclaré le procureur de la République, il faut bien tenir compte du « statut particulier » de l’OM dans la ville.
Tapie et les dirigeants de l’OM jouissent-ils aussi d’un statut particulier ? Cette question c’est Vincent Turbeaux, le président de la 6e chambre correctionnelle qui l’a posée en rendant son délibéré le 11 mai (veille de la finale) dans l’affaire Tuzzio/ Leboeuf.
Résumé à la hache, le transfert de ce joueur argentin a permis à l’OM de dégager 46 millions de francs. Argent ayant servi vraisemblablement à alimenter une « caisse noire » au profit du club et de ses dirigeants selon le tribunal. Une enquête gérée exclusivement par le parquet de Marseille, lequel a préféré faire l’économie d’un juge d’instruction.
Chef principal des poursuites ? Abus de bien social. Et notamment contre Pierre Dubiton, ex-responsable administratif et financier du club.
Si aucun des prévenus n’a pris la peine de se déplacer, le président Turbeaux prend, lui, grand soin lui de lire les 74 pages de sa décision. Un réquisitoire au vitriol contre le travail du parquet incapable d’identifier les véritables responsables. Et pour l’ABS c’est une relaxe générale.
Le tribunal ne se contente pas de constater les carences du parquet, il éclaire aussi notre lanterne :
« Ce n’est pas Pierre Dubiton qui a pris la décision d’engager Franck Leboeuf, c’est également Bernard Tapie qui a été à ce propos on ne peut plus clair. Il a sollicité l’aval de Robert Louis Dreyfus sur la venue du joueur et sur ses conditions, en indiquant que le statut de résident étranger de Franck Leboeuf devait permettre de trouver une solution. »
Et encore : « L’intervention décisive de Bernard Tapie dans le montage frauduleux, jusque et y compris à propos de l’ouverture d’un compte bancaire à Luxembourg a été soulignée tant par le joueur que par Philippe Flavier »
La cécité du parquet de Marseille est d’autant plus inexplicable que le SRPJ à qui il avait confié l’enquête a abouti exactement à la conclusion d’une « intervention décisive » de Tapie dans le montage (cf. PV de synthèse et suites judiciaires sur le site).
Dans le contexte des relations exécrables entre le parquet et les magistrats du siège ou de l’instruction, le recrutement du gendre d’un haut magistrat du parquet par une société de Robert Louis-Dreyfus est certainement anecdotique, mais sur la Canebière il fait tout de même jaser.
Tandis que le président Turbeaux déroule son délibéré assassin, un scribe aux allures de paisible retraité prend minutieusement des notes. C’est l’ami Marc Fratani, ancien attaché parlementaire de Nanar :
« L’œil et les oreilles de Tapie à Marseille. Il ne rate jamais une audience sur l’OM », précise un confrère. Il devra remettre le couvert. Le parquet a fait appel de la décision...
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