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Toujours plus...

Andy Murray et Rafael Nadal se sont une nouvelle fois plaints du calendrier surchargé ces derniers jours, mais leur revendication est montée d'un cran avec la menace d'une grève, ce qui n'a pas tardé de faire réagir l'ATP et l'ITF. Un bras de fer psychologique s'est engagé mais les instances mondiales ne sont pas si fautives que les apparences semblent le montrer. 

Il peste depuis plusieurs années contre un calendrier surchargé. Avec la place de n°1 mondial conquise en 2008, Rafael Nadal a endossé le statut de porte-parole des joueurs, du moins des meilleurs, pour mener la fronde. Arrivé à Cordoue sur les rotules pour disputer la demi-finale de Coupe Davis après une finale de l'US Open disputée le lundi, l'espagnol n'a pas semblé montrer de signes de fatigue physique sur le court, mais la lassitude mentale s'est faite ressentir à une période de l'année où la majeure partie des joueurs est fatiguée après neuf mois de compétition. 

Les réponses de l'ATP et de l'ITF

La gestion du calendrier est une vieille antienne qu'on entendait déjà dans les années 90. A cette époque, aucun tournoi particulier n'était obligatoire mais les meilleurs joueurs avaient tout intérêt à disputer les tournois attribuant de gros points, ce qui n'empêchaient pas, par exemple, Andre Agassi et Pete Sampras de faire régulièrement faux bonds au tournoi de Monte Carlo et de Hambourg. Pour pallier à ces absences et rendre plus lisible le classement aux yeux du public, l'ATP a décidé en 2000 de rendre obligatoire un certain nombre de tournois pour les meilleurs joueurs du monde, à savoir les quatre majeurs, les neuf Masters Series et (si qualification) le Masters. 

Au fil des ans, l'ATP a lâché du lest pour satisfaire les meilleurs. Dans la plupart des Masters Series (qui deviendront ensuite Masters 1000), les meilleurs joueurs devaient disputer initialement six matches et la finale en trois sets gagnants. Le nombre de matches sera réduit à cinq (sauf à Indian Wells et Miami) et la finale réduite en deux sets gagnants, y compris pour celle du Masters. De plus, l'ATP enlève le statut obligatoire au tournoi de Monte Carlo et réforme le système de points en 2009, toujours pour favoriser les meilleurs. En dix ans, l'ATP aura donc mené plusieurs actions pour alléger l'intensité d'une saison. 

L'ITF, qui gère les tournois du Grand Chelem et la Coupe Davis, s'est montrée moins réactive. A l'exception de l'augmentation du nombre de têtes de série (passage de 16 à 32, ce qui protège un peu plus les meilleurs), aucune action concrète n'a été menée pour alléger le calendrier et pour faciliter la vie des joueurs. Malgré les problèmes de programmation répétés à l'US Open et Roland Garros depuis quelques années, rien n'a changé. Quant à la Coupe Davis, les dates proposées en 2012 sont encore pire que celles des années passées : les quarts de finale se disputent cinq jours après Wimbledon, les demi-finales cinq jours après l'US Open, la finale cinq jours après le Masters, des dates qui ne favorisent pas la participation des meilleurs joueurs du monde à cette épreuve. Ainsi, Rafael Nadal s'en est pris directement à l'ITF, qui a réagit en refilant bien injustement la patate chaude à l'ATP. 

Des motivatiions financières ?

Mais les critiques de Rafael Nadal sont à prendre avec des pincettes. D'abord, elles devront être clarifiées et harmonisées avec celles d'Andy Murray pour être audibles. Si l'espagnol a pointé du doigt le calendrier de la Coupe Davis, l'écossais s'en est lui pris au nombre de tournois obligatoires à disputer, et c'est là que le bât blesse. 

Pourquoi les joueurs sont-ils si réticents avec la notion d'obligation ? parce que l'obligation évite aux tournois concernés de verser des primes supplémentaires aux joueurs pour s'attacher leur présence. Un manque à gagner pour le membre du top 4. A l'inverse, les tournois non obligatoires (ATP 500 et 250) sont obligés de démarcher les meilleurs à coups de centaines de milliers d'euros (ou de dollars) pour les avoir. Ainsi, en 2006, le tournoi de Marseille avait offert à Rafael Nadal 400.000 euros pour assurer sa présence (plus le prize money correspondant à sa demi-finale, soit 29.000 euros). A titre de comparaison, Novak Djokovic a gagné à Miami (tournoi obligatoire) pour sa victoire 611.000 dollars (soit environ 425.000 euros). Autrement dit, sans jouer, Nadal a gagné autant d'argent qu'en disputant six matches dans un Masters 1000. 

Outre par ce constat financier, les arguments avancés par les meilleurs joueurs sont fragilisés par leur propre gestion du calendrier et l'appat du gain. Rafael Nadal dispute depuis plusieurs années un tournoi exhibition à Abu Dhabi le dernier week-end de décembre alors que rien ne l'y oblige. Fin septembre, l'espagnol s'envolera au Japon pour disputer un tournoi non obligatoire mais qui a du chèrement payé sa présence. L'année dernière, il avait participé au tournoi de Bangkok (alors qu'il avait déjà disputé le nombre suffisant d'ATP 250) courant septembre, recevant un chèque de 1,5 millions dollars. A cette époque, nulle critique à l'encontre du calendrier. Ultime provocation, l'espagnol aurait touché un million de dollars pour disputer une exhibition en Argentine contre David Nalbandian le...08 décembre prochain, une période pourtant traditionnellement destinée au repos et à la préparation de la saison suivante qui débute en janvier. Etonnant, pour un joueur qui se plaint de trop jouer. 

Peut-on réduire le nombre de tournois ? 

Rien ne le justifie. Plusieurs centaines de joueurs de tennis sont professionnels et s'inscrivent aux tournois régentés par l'ATP. En supprimer reviendrait à réduire le gagne-pain de ces joueurs qui, pour la plupart, gagnent difficilement leur vie, devant faire face à de nombreuses dépenses liées à leur métier. Pour gagner correctement leur vie, la plupart des joueurs enchaînent les tournois semaine après semaine pour cumuler les gains. A titre d'exemple, le 100ème mondial Frédérico Gil a gagné en 2011 206.000 euros en disputant 25 tournois (sans compter la Coupe Davis), soit quasiment un tournoi tous les 10 jours. Une maigre somme lorsque l'on doit déduire les taxes, les billets d'avions, les hôtels, le coach, le préparateur physique et que les carrières sont généralement faites de hauts et de bas. Le portugais a, par exemple, gagné 310 euros après avoir perdu au premier tour au tournoi de Trani. En totalisant les dépenses, le portugais a joué à perte et, pour compenser, doit disputer d'autres tournois. C'est le quotidien de la majorité des joueurs du circuit ATP. Prendre les gains de Roger Federer ou Rafael Nadal serait une erreur pour justifier l'inutilité de certains tournois. 

Face à la fronde menée par certains joueurs capricieux, l'ATP et l'ITF commettraient une grave erreur s'ils réduisaient le nombre de tournois obligatoires. Néanmoins, si l'ATP a fourni de nombreux efforts pour répondre aux exigences des joueurs, l'ITF devra impérativement présenter un plan portant sur le calendrier, voire la réforme, de la Coupe Davis, compétition particulièrement pointée du doigt par de nombreux joueurs. En n'oubliant pas, tout de même, que le tennis, avec plus d'un siècle d'histoire, ne doit pas s'arrêter aux exigences de quelques joueurs éphémères à l'échelle de l'humanité... 


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1 réactions à cet article    


  • Robert GIL ROBERT GIL 24 septembre 2011 09:58

    Comment expliquer que les rémunérations astronomiques des stars du ballon rond, de la F1, du golf ou du tennis n’interpellent personne, et que ces personnes pour ne pas payer d’impots (alors qu’ils ont profité des infrastructures mises a leur disposition et payes par la collectivité) partent a l’etranger...Voir :
    http://2ccr.unblog.fr/2011/09/13/les-jeux-sans-le-pain/

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