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Accueil du site > Culture & Loisirs > Voyages > Christiania : vers la fin d’une utopie ?

Christiania : vers la fin d’une utopie ?

En septembre 2009, je publiais un article intitulé Christiania, crépuscule d’une communauté. Dans cet article, j’évoquais l’histoire de cette étonnante « ville libre ». Installée dans l’ancienne base navale de Copenhague, il y régnait un esprit libertaire. Il y flottait aussi l’odeur âcre du haschisch. Après 40 années d’existence, la communauté est contrainte à une profonde mue, victime de ses excès et d’une reprise en main par les autorités. Faut-il y voir la fin d’une expérience alternative devenue, au fil du temps, un symbole planétaire ?...

« I kan ikke slå os ihjel ! » (Vous ne pouvez pas nous tuer !), continue d’affirmer l’hymne des Christianites, repris d’une chanson engagée des rockers « flower power » du groupe Bifrost. C’est pourtant ce qui est en train de se passer. Certes, la « ville libre » autoproclamée le 26 septembre 1971 n’a pas été phagocytée par les projets urbains de la municipalité de Copenhague comme la menace en avait pesé un temps. Elle continue même d’occuper la troisième marche du podium touristique de la capitale danoise à côté de la petite sirène (den lille havfrue), inspirée par le conte d’Andersen, et du parc d’attractions Tivoli. Mais l’esprit de Christiania agonise lentement. Lentement mais sûrement, et le plus stupéfiant, si l’on peut dire, pour une étonnante raison : l’accession à la propriété !

 Cette mort annoncée de la Christinia libertaire des seventies a été actée par une décision de la Cour suprême du Danemark en date du 18 février 2011. Ce jour-là, les « sages » danois ont mis un terme à une bataille juridique engagée dès 2004 à l’initiative du gouvernement conservateur d’Anders Fogh Rasmussen pour annuler le statut d’autonomie conquis en 1989 par les squatteurs « alternatifs » de Christinia. En rejetant l’appel de la « ville libre » contre un jugement de 2009 qui officialisait le retour dans le giron de l’État des 35 hectares de l’ancienne base navale, la Cour suprême du Danemark a ruiné les derniers espoirs de statu quo des 850 Christianites.

 Si la « ville libre » l’est de moins en moins, la combativité des Christianites ne s’est pas démentie pour autant. Résistant aux pressions extérieures visant à mettre fin à l’expérience alternative au profit de projets immobiliers, les habitants ont, avec des soutiens externes et l’active assistance de leur avocate, Line Barfod, créé en juillet 2011 la Fondation Christiania. Objectif de cette fondation : sensibiliser la population à la pérennité de la communauté et récolter les sommes nécessaires à permettre, conformément à un accord passé avec les autorités, le rachat à l’État danois de la partie des casernements où sont rassemblées la plupart des habitations et des activités culturelles de la « ville libre ». Prix fixé par les autorités judiciaires : 76 millions de couronnes danoises, soit environ 10,1 millions d’euros, à verser le 1er juillet 2012.

 

Quand les hippies deviennent propriétaires

 Cet appel, lancé en septembre 2011, a fonctionné : plus de 50 000 donateurs ont souscrit une ou plusieurs « actions populaires » de 100 couronnes danoises (13,5 euros) donnant lieu à déduction fiscale. Cet élan de générosité a contribué à alimenter à hauteur de 8 millions de couronnes danoises le fonds de rachat. L’essentiel du financement n’est pourtant pas venu de cette solidarité, mais, de manière plus pragmatique, d’un emprunt – garanti par l’État – souscrit auprès de Realkredit Danmark.

 Malgré tous leurs efforts, les Christianites n’ont pas été en mesure de payer les 76 millions de couronnes danoises à la date butoir, bien que ce montant ait été fixé à un niveau très inférieur au prix du marché. Mais au terme d’une opiniâtre négociation, un compromis a pu être trouvé avec les autorités sur un plan de financement assurant la pérennité de Christiania. C’est ainsi que, le 1er juillet 2012, les Christianites ont versé 51 millions de couronnes à l’État, les 25 millions restant ayant fait l’objet d’un accord en deux points : 15 millions devront être versés de manière échelonnée durant les trois années à venir, les 10 millions restants devant être acquittés par les habitants de Christiania en nature, sous la forme de travaux de rénovation des locaux historiques.

 Même amputée d’une partie des ex-terrains militaires, Christinia a réussi à survivre à la croisade lancée naguère par les conservateurs dans le sillage d’Anders Fogh Rasmussen. Mais si l’on continue de vendre du haschisch dans Pusher Street et de monter des spectacles alternatifs au sein de la « ville libre », il ne fait aucun doute que l’esprit libertaire d’origine va profondément se transformer. Devenus propriétaires du site, les Christianites vont progressivement s’installer dans un statut de bobos. De cela, la plupart ont conscience et c’est, pour les plus anciens squatters et hippies, un véritable crève-cœur. Mais ils n’avaient pas le choix. D’ailleurs, les jeunes sont plutôt satisfaits d’un accord qui pérennise globalement leur mode de vie dans un cadre exceptionnel. Or, c’est à ces derniers que l’avenir appartient, pas à leurs aînés dont les vieux rêves de flower power finissent de s’envoler, mêlés aux volutes du haschisch, dans le ciel de Copenhague.

 


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42 réactions à cet article    


  • Surya Surya 13 décembre 2012 10:19

    Bonjour Fergus,

    Je pense que si l’Etat danois aide à ce point Christiania (car c’est tout de même le cas : tout d’abord ils mettent le site en vente à un prix largement inférieur au prix du marché, et en plus s’il est impossible aux habitants de payer, on leur permet d’échelonner une partie de leur dette, et de payer le reste en nature, du jamais vu !) c’est aussi parce que c’est une attraction touristique qui amène des visiteurs dans la ville de Copenhague. Car l’Etat danois aide-t-il autant les initiatives visant par exemple à reloger les sdf (car il doit y en avoir à Copenhague comme partout ailleurs j’imagine), accorde-t-il aux associations les mêmes facilités ?

    A moins que Christiania n’ait également accueilli les sdf de la ville (et que donc l’argent donné serve à empêcher le retour à la rue de ces sdf, dans ce cas ok) cet élan de générosité de la population me laisse un peu perplexe. Car les hippies de Christiania ont choisi cette vie, ce ne sont pas des « accidentés de la vie », ils ont choisi de vivre selon leurs convictions et leur utopie, et j’espère que l’élan collectif de solidarité de la population danoise (ou autre ?) est aussi fort lorsqu’il s’agit d’aider les associations, souvent petites et méconnues, qui aident les sdf à survivre, ceux qui n’ont vraiment, pour le coup, rien du tout, et ne savent même pas ce qu’il vont manger, ou même s’ils vont manger, chaque jour.

    Donc, si d’un côté je trouve l’expérience de Christiania super intéressante (en dehors du problème de la drogue qui a évidemment tout gâché), tout cela me laisse un peu perplexe.

    Autre chose, l’Etat danois avait des projets immobiliers, donc je suppose qu’ils avaient l’intention de tout démolir, et maintenant on demande aux habitants de Christiania de réhabiliter les baraquements historiques ?

    Ils sont désormais propriétaires. Ils devaient de toute façon se sentir déjà propriétaires, même s’ils ne l’étaient pas a regard de la loi, et surtout propriétaires des maisons qu’ils ont construites eux mêmes. J’espère en effet que le fait d’être proprio au regard de la loi ne va pas changer leur mentalité (mais les Gitans sont proprios de leurs caravanes, donc le fait même d’être proprio ne devrait pas changer votre façon de voir la vie), mais cela ne dépend que d’eux. Ce sera un bon test, en fait.


    • Fergus Fergus 13 décembre 2012 11:45

      Bonjour, Surya.

      Le problème posé par les sans-abris (hjemlose) au Danemark est sans commune mesure avec ce qui se passe en France, et cela parce que l’Etat danois est sans doute le plus en pointe de toute l’Europe en la matière. Depuis des années ont été construites dans tout le pays des résidences pour les sans-abri. Les SDF y sont logés dans des conditions correctes et surtout, en conformité avec la mentalité danoise, peuvent y garder leur autonomie. Résultat, le nombre des SDF encore à la rue est inférieur à 5000 (contre 150 000 à 200 000 chez nous pour une population 8 fois supérieure), soit un nombre finalement assez proche du seuil incompréhensible (quoi que l’on propose, il y aura toujours des gens qui refuseront toute forme d’assistance).

      Les aides, bien réelles, apportées aux Christianites ne l’ont donc pas été au détriment de l’assistance aux SDF. Ces aides trouvent leur origine, d’une part (comme vous l’avez souligné) dans le rôle d’attraction touristique de Christiania qui n’est pas sans effet sur la fréquentation de la capitale danoise, d’autre part dans la remarquable tolérance dont sont capables les Danois vis-à-vis des expertises alternatives, même si, là comme ailleurs, elles peuvent faire grincer des dents, notamment chez les conservateurs.

      Comment évoluera Christinia ? Difficile à dire. Mais le fait est que les « anciens » s’en inquiètent.

      Cordialement.


    • Surya Surya 13 décembre 2012 12:39

      Alors dans ce cas, chapeau bas au gouvernement danois ! Comme quoi quand on veut vraiment résoudre les problèmes de logement, en particulier les problèmes des sdf, c’est possible. Les gouvernements successifs de la France feraient bien de prendre exemple sur eux, car il n’y a pour l’instant eu que des belles promesses électorales, suivies de pas grand chose ensuite.
      Très cordialement,


    • Fergus Fergus 13 décembre 2012 12:50

      @ Surya.

      Un erratum tout d’abord : la population française est environ 11 fois celle du Danemark et non 8 comme je l’ai écrit de manière erronée.

      Tout n’est pas rose au Danemark et l’Etat pourrait sans doute faire encore mieux, mais le fait est que ce pays est exemplaire comparé aux autres nations européennes. Il l’est sur la question des SDF, mais il l’est également sur la détention des détenus, un domaine où la privation de liberté ne se fait pas au détriment de la dignité des prisonniers, contrairement à ce qui se passe en France où l’état des prisons et les conditions de détention sont de véritables et insupportables scandales.

      Bref, ce n’est pas par hasard si le Danemark fait fugure de laboratoire social sur ces deux dossiers sensibles.

      Bonne journée.


    • Emmanuel Aguéra Emmanuel Aguéra 15 décembre 2012 12:01

      Bonjour à tous,

      Euh, Fergus... Erratum n°2, semble-t-il...

      Lire : « seuil incompréhensible »... vraiment ?
      Ou plutôt ... « seuil incompressible » ?


    • Fergus Fergus 15 décembre 2012 13:49

      Salut, Manu.

      Gloups ! Quelle faute ! Effectivement « incompressible » et non « incompréhensible » comme je l’ai écrit, au risque d’être précisément incompréhensible. Je prie tous les lecteurs de m’excuser.

      Bonne journée.


    • Mmarvinbear Mmarvinbear 16 décembre 2012 11:35

      En clair, la « ville libre » est en train de devenir un zoo...


    • Fergus Fergus 16 décembre 2012 12:15

      Bonjour, Mmarvinbear.

      Le mot « zoo » est excessif, mais il n’est pas tout à fait faux, Christiania ayant pris, au fil du temps, des allures de réserve indienne. Mais ce n’est pas que cela, fort heureusement, et l’admission des touristes est grosso modo limitée à Pusher Street et ses environs immédiats, là où se situent lieux d’expo et salles de spectacle alternatifs.


    • Cocasse Cocasse 13 décembre 2012 12:14

      Je me demande si la consommation de haschich n’a pas entamé la détermination et la capacité d’autonomie de cette communauté.


      • Fergus Fergus 13 décembre 2012 12:54

        Bonjour, Cocasse.

        Je ne crois pas que la consommation de hasch ait eu une quelconque influence sur les Christianites, exception faite sans doute de quelques individus. Au contraire, depuis l’offensive de Rasmussen, ils se sont mobilisés et se sont battus pour sauver la « ville libre » des appétits des promoteurs extérieurs qui louchaient avec gourmandise sur ce lieu rermarquable.


      • Lou Lou 13 décembre 2012 20:10

        Cocasse devrait fumer un joint de temps en temps, il n’ a pas que le gros 12 qui tache dans la vie ...
        Sinon bon article je connaissais Christiana sans y être aller, pas de surprise que le gouvernement conservateur cherche à mettre des bâtons dans les roues d’ un tel projet de société car ces laquais du sacro saint marché ne veulent surtout pas que des gens leur prouvent que l’ on peut vivre avec d’ autres valeurs que l’ individualisme et la cupidité ...


      • Fergus Fergus 13 décembre 2012 23:07

        Bonsoir, Lou.

        Merci pour votre commentaire. Sauf difficulté bien improbable, les Christianites vont pouvoir pérenniser leur expérience et continuer d’être un lieu de création artistique alternative. Qu’ils soient devenus propriétaires de Christiania ne devrait pas changer fondamentalement les choses. C’est du moins ce que croient les jeunes, moins dogmatiques que leurs aînés. Les prochaines années nous diront s’ils ont raison de se montrer optimistes.


      • Fergus Fergus 14 décembre 2012 13:06

        Bonjour, Yoann.

        Il ne s’agit pas de nier les effets des drogues sur les organismes, mais de souligner que, dans la communauté christianite, certains sont des consommateurs modérés et d’autres n’y touchent pas. Ce n’est donc pas la communauté dans son ensemble qui peut avoir été victime de cet usage, au point d’en avoir perdu sa combativité. 


      • Emmanuel Aguéra Emmanuel Aguéra 15 décembre 2012 12:55

        La pire drogue se confirme bien comme étant la connerie, je vois.


      • foufouille foufouille 13 décembre 2012 12:21

        j’avais lu un article dessus
        un peu le bordel
        maisons vides car les voisins peuvent choisir le locataire
        rues tenues par les dealers
         


        • Fergus Fergus 13 décembre 2012 13:00

          Bonjour, Foufouille.

          Le « bordel » ? Sans doute moins qu’avant que les Christianites, il est vrai sous la pression de la ville de Copenhague et de l’Etat, ne mettent en place des règles communes de vie, en organisant par exemple le tri sélectif des déchets et la collecte de ceux-ci.

          Sur le rejet d’un éventuel voisin, je ne peux rien dire, sinon que les Christianites peuvent se montrer intransigeants vis-à-vis de ceux qui, précisément, refuseraient de se plier aux règles communes en arguant de leur liberté individuelle.


        • Robert GIL ROBERT GIL 13 décembre 2012 13:41

          il existe aussi des experience interressant en espagne...

          voir : MARINALEDA, VILLAGE AUTOGESTIONNAIRE


          • Fergus Fergus 13 décembre 2012 13:58

            Bonjour, Robert Gil.

            Je ne connaissais pas Marinaleda. Merci pour ce lien.

            Compte tenu de la crise et de la prise de conscience des inégalités qu’engendre le type de société dans lequel nous vivons, il est possible que d’autres communautés comme Marinaleda voient le jour. Puissent-elle agir comme des laboratoires afin de montrer à tous que des alternatives à la société de consommation et à la pensée unique sont possibles !


          • Fergus Fergus 13 décembre 2012 18:41

            Bonsoir, Schweizer.

            Vous touchez là la limite de ces expériences alernatives. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle elles ne peuvent en général perdurer qu’avec un minimum d’accord des autorités locales.


          • ecophilopat 14 décembre 2012 10:56

            @schweizer.ch

            « Je vous invite néanmoins à considérer que, faute d’être autarcique, Marinaleda ne peut durer que grâce à la normalité de son environnement, du point de vue de l’approvisionnement en denrées de première nécessité, en électricité et en carburants, mais aussi des infrastructures en général, des transports publics, du système de santé... »

            Comme n’importe quelle autre ville ou village !


          • Fergus Fergus 14 décembre 2012 11:13

            Bonjour, Ecophilopat.

            A titre payant, veut dire Schweitzer. Or, si tous les villages payent leur contribution à l’adduction aux réseaux, certaines communautés sont quasiment insolvables et par conséquent dans l’incapacité de subvenir à certains besoins. Cela a été le cas de Christiania. Dans les premiers temps de la « ville libre », un minimum d’eau et d’énergie gratuite ont d’ailleurs été fournies par la ville de Copenhague. Sans elles, la communauté aurait sans doute plongé dans la clochardisation ou le deal à grande échelle.


          • roro46 14 décembre 2012 11:45

            Bonjour Fergus,
            comme le souligne Peachy ci-dessous, c’est bien l’argent qui mène tout et qui est le problème, le frein à ce type « d’expérience » (ce n’est pas une expérience de mon point de vue, ce sont simplement des gens qui vivent d’une certaine manière, point.)....
            ...Argent détenue et utilisée pour ce faire par les « autorités » que vous évoquez.
            C’est ça le problème, pour moi, et pas autre chose.
            Des choses comme l’eau ou l’energie de 1ère nécessité devraient être gratuites pour tous, et pas détenues par une quelconque autorité.

            D’autre part, je crois que notre « imaginaire » est bien formaté, car pourquoi parler de clochardisation dès lors qu’on imagine une vie différente du système capitaliste actuel... Ce que je veux dire, c’est : les sociétés dite « premières », par exemple en Amazonie, sont-elles composées de clochards ? Les Bushmans (ou du moins ce que nous avons permis qu’il en reste en l’état naturel) sont-ils des clochards ? ...Et si ils le sont devenus par la suite, c’est bien parceque « nous » les avons déracinés, parcequ’on leur a dit « hé là, mais ça c’est pas à toi, cette viande que tu manges gratuitement ! Et puis tu ne vas pas vivre comme ça, c’est pas bien ! Tu vas travailler et payer un loyer ; et payer ta nourriture et ton eau...) ...Les Indiens d’Amérique étaient-ils des clochards ? Ce que nous prenons pour des »alternatives" n’en sont pas forcément, puisque nous en avons eu et pouvons encore avoir la preuve de leur viabilité...
            Merci pour votre article quoiqu’il en soit.
            Cordialement


          • Fergus Fergus 14 décembre 2012 13:18

            Bonjour, Roro46.

            Je ne fais évidemment pas d’amalgame entre la « clochardisation » et les modes vies alternatifs ou naturels que vous évoquez. Je voulais simplement souligner en utilisant ce mot que ce n’est pas forcément vers un mode de vie naturel sain qu’aurait pu évoluer Christiania si on l’avait laissée coupée de la ville, mais vers une possible déchéance des pionniers qui, avant d’être des libertaires, étaient surtout des squatters, pas forcément tous reluisants, venus du chômage et d’une mouvance hippie en voie de déclin. Les débuts de Chritiania ont d’ailleurs été marqués par des gros problèmes d’hygiène et de trafics de drogue dure avant que la situation ne s’assainisse, en partie sous la contrainte des autorités qui, en échange d’une non-intervention, ont exigé l’éradication des drogues dures.

            Cordialement.


          • ecophilopat 14 décembre 2012 13:27

            @Fergus

            Christiania et Marinaleda sont deux « expérience » différentes et schweizer.ch cite Marinaleda dans le commentaire auquel j’ai répondu.

            @schweizer

            « non, ce que je veux dire, c’est que l’expérience est pipée, en partie à tout le moins, puisque dépendant largement d’un environnement conventionnel, elle ne peut guère prétendre servir de laboratoire »

            Comment pourrait-il en être autrement ?

            Je vois mal les initiateurs d’une alternative comme Marinaleda coloniser une nouvelle planète pour partir de zero, et surtout je ne vois pas pourquoi il serait necessaire de partir de rien pour tenter d’inventer un autre modèle de société.

            Mettre en place une société ou l’humain et son environnement prime sur l’argent et le pouvoir n’implique pas forcément de tout raser ce qui existe actuellement.

            C’est plutôt au niveau des mentalité que la remise à zero s’impose.


          • Fergus Fergus 14 décembre 2012 15:58

            @ Ecophilopat.

            Effectivement, les deux « expériences » sont très différentes, celle de Christiania restant dans la filiation des mouvements hippies et libertaires, celle de Marinaleda s’incrivant dans une idéologie politique d’autogestion. S’il doit y avoir un avenir à l’une des deux, sans doute faut-il espérer que ce sera le modèle de Marinaleda qui l’emportera et essaimera sur le vieux continent. Un modèle nettement plus subversif relativement à notre modèle de société.


          • ecophilopat 15 décembre 2012 12:33

            « Moi non plus, en revanche, je vois très bien que pour une expérience comme Mainaleda, il est vital de bénéficier d’un environnement dans lequel tout fonctionne normalement et conventionnellement, avec le niveau d’organisation que requiert une société aussi complexe que la nôtre. »

            Je vous fais la même réponse que dans mon premier message « comme n’importe quel ville ou village »

            Dans votre phrase remplacez Marinaleda par le nom de votre ville est vous constaterez que c’est la même évidence.

            En fait c’est presque une lapalissade.


          • Fergus Fergus 15 décembre 2012 13:55

            Bonjour, Ecophilopat.

            Sans prétendre défendre Schweizer qui est assez grand pour le faire lui-même, je pense que, relativement au sujet, le mot important est « conventionnellement ». Autrement dit qu’une société alternative, mais non totalement autarcique, doit asseoir en partie sa viabilité sur des services négociés par convention avec l’« extérieur » de la communauté. Ce qui, quasiment depuis les débuts, a été le cas de Christiania.


          • ecophilopat 16 décembre 2012 10:32

            Bonjour Fergus,

            je me répète, mais Christiania et Marinaleda sont deux expériences différentes.

            Sauf à revenir au Moyen-âge voir au néolithique suivant la « taille » de l’expérience, il est évident que vivre en totale autarcie à l’échelle d’un village ou d’une ville est impossible, à ce titre effectivement Marinaleda est dépendante de son environnement mais ni plus ni moins que Paris, Marseille ou Genève.

            Schweiser a donc raison, je lui faisait simplement remarquer qu’il n’était pas allé au bout de son raisonnement.

            Raisonner comme il le fait est très réducteur, c’est d’emblée minimiser l’importance de ces expériences au prétexte que .. Il existe surement des arguments pour le faire mais celui qu’il utilise n’en n’est pas un.

            Encore une fois je parle bien de Marinaleda.


          • Peachy Carnehan Peachy Carnehan 14 décembre 2012 01:13

            C’est par l’argent que les néoconservateurs, les réactionnaires, font rendre gorge à la « ville libre ». Ces « parasites », comme diraient Copé, Berlusconi, Merkel, etc.

            Il ne reste plus qu’à plier l’échine, se soumettre ?

            Triste constat.


            • Fergus Fergus 14 décembre 2012 09:26

              Salut, Peachy.

              Il est sûr que la pensée et le pouvoir conservateurs ont du mal à s’accommoder de tels exemples. D’où les offensives menées pour éradiquer les communautés qui font tache dans le paysage social. Mais à Copenhague, les libertaires ont quand même bien conduit leur résistance et pourront conserver une large autonomie.

              Hélas pour nous, ce qui est possible au Danemark, où le mot « tolérance » signifie quelque chose pour la majorité de la population, l’est nettement moins en France. C’est pourquoi l’existence dans la durée d’une « ville libre » comme Christiania eût été inimaginable chez nous.

              Bonne journée.


            • shiatsulandes40 shiatsulandes40 14 décembre 2012 09:09

              En France , toutes les petites « Christuiana » reçoivent la visite de la Mivilude qui oeuvre à supprimer toute pensée et communauté alternative ...

              Organisme à l’utilité hautement discutable , ( payé par nos impôts tout de même )aux méthodes indignes , avec à leur tète un homme ayant trempé dans des affaires plutôt douteuses ...
              Nos pouvoirs très conservateurs n’aiment pas trop les mouvements alternatifs , des fois que ça nous donnerais des idées ...

              • Fergus Fergus 14 décembre 2012 09:39

                Bonjour, Shiatsulandes40.

                Je vous invite à lire la réponse que je viens de faire à Peachy Carnehan ci-dessus. Effectivement, l’on n’aime guère en haut lieu, et pas seulement à l’UMP, les mouvements libertaires et les communautés alternatives, porteuses aux yeux des puissants qui dirigent notre pays d’un insidieux poison idéologique. C’est en partie cet état d’esprit qui a conduit Alliot-Marie à monter en épingle terroriste l’affaire de Tarnac.

                Pour ce qui est de la Miviludes, le problème vient moins de l’existence de cette Mission que de la manière dont elle dirigée par le très controversé Georges Fenech. Sur le fond, il est utile qu’une entité d’observation puisse faire de la veille sociale afin de déceler d’éventuelles dérives sectaires aux conséquences parfois désastreuses. A condition que cette entité ne se détourne pas de son objet pour saper les expériences alternatives sous des prétextes fallacieux, le cas échéant en collaborant avec la DCRI.


              • Fergus Fergus 14 décembre 2012 16:45

                @ Schweizer.

                Vous n’avez pas tort concernant la pérennité des communautés. J’ajoute même un ingrédient que vous n’avez pas cité : le romantisme attaché à toutes les initiatives alternatives ou révolutionnaires. Or, le romantisme est souvent soluble dans la fuite du temps. Et lorsque le romantisme s’est éteint ne restent plus que des considérations pragmatiques nettement moins séduisantes lorsqu’elles ne sont plus nourries par l’utopie. Proudhon et Fourrier ont été des formidables vecteurs d’espoir, mais leurs travaux n’ont pas débouché sur des sociétés viables dans la durée. C’est pourquoi, à titre personnel, je ne crois pas à la pérennité d’un esprit libertaire à Christiania. Marinaleda est plus intéressante en tant que laboratoire social, mais il est à craindre qu’elle ne se fonde tôt ou tard dans la société dont elle veut se démarquer.

                Bonne fin d’après-midi.


              • Fergus Fergus 15 décembre 2012 10:15

                Bonjour, Schweizer.

                Le parallèle entre expériences alternatives et révolutions me semble tout à fait pertinent si l’on ne considère que les révolutions nées d’un soulèvement populaire ou d’une adhésion massive à un discours populiste et revanchard (exemple : l’Allemagne nazie). Mais les révolutions peuvent également prendre la forme d’une vague de réformes progressistes et constitutionnelles. Mais celles-ci sont rares car elles nécessitent des hommes exceptionnels, réellement au service de leur pays.


              • ecophilopat 14 décembre 2012 13:39

                Daniel Mermet a consacré plusieurs émission de « La bas si j’y suis » au village espagnol de Marinaleda.

                http://www.la-bas.org/recherche.php3?recherche=marinaleda


                • sleeping-zombie 14 décembre 2012 14:42

                  Salutations Fergus

                  Je ne suis pas d’accord avec ton analyse, car finalement, la fin annoncée dans le titre n’a pas eu lieu... En fait, le seul point qui l’annonce est ta conclusion :

                  Devenus propriétaires du site, les Christianites vont progressivement s’installer dans un statut de bobos.

                  Mais d’après ce que j’ai lu dans ton propre article, la « propriété » du site n’est pas individuelle, c’est juste que l’état renonce officiellement à utiliser le site. Je ne vois pas en quoi cette « accession à la propriété » est un nouveau « statut » pour les résidents. Est-ce que ça leur donne le pouvoir de percevoir un loyer ? refuser de nouveaux entrants ? D’après ce que j’ai compris de l’article, ça ne change rien.
                  (au fait, si tu pouvais me dire ce qu’est un « bobo », ça éclairerait un peu ma lanterne...)


                  • Fergus Fergus 14 décembre 2012 15:46

                    Salut, Sleeping-Zombie.

                    J’ai mis un point d’interrogation dans le titre, précisément parce que cette fin n’est pas forcément inéluctable. Mais les interrogations sont bien réelles au sein de la communauté. A l’heure actuelle, tous les problèmes posés par le statut de propriété collective ne sont sans doute pas encore levés, la question principale étant : « Faut-il désormais que chaque foyer christianite paye un loyer à la collectivité ? » Je ne sais pas comment cela a évolué durant les dernières semaines, mais cette éventualité semblait la plus probable.

                    A priori, pas de problème pour les nouveaux arrivants dès lors qu’il y a de la place pour eux et qu’ils acceptent le règlement intérieur.

                    Qu’est-ce qu’un « bobo » ? A vrai dire, la réponse part un peu dans tous les sens. Mais si l’on se réfère à la définition la plus courante, c’est grosso modo une personne sensibilisée aux questions sociales et environnmentales qui, de surcroit, a la chance d’habiter dans un cadre de vie agréable. Tout cela correspond assez bien à ce que sont les Christianites. Il manque cependant un critère important : les revenus, en général plutôt confortables dans l’univers bobo (d’où le bo de bourgeois). Et là, ce n’est pas ce que l’on peut mettre en avant pour la plupart des habitants de la « ville libre ». Mais ce confort, ils en disposent quand même de manière collective, et de façon encore plus voyante avec ce rachat du site qui en fait des proprios en indivision en quelque sorte. D’où la référence aux bobos qui ne vient d’ailleurs pas de moi, mais des Danois eux-mêmes, bien que cet acronyme n’existe pas du côté de Copenhague.

                    Bonne journée.


                  • sleeping-zombie 15 décembre 2012 09:32

                    merci pour ces précisions


                  • tf1Goupie 15 décembre 2012 11:53

                    @Fergus

                    Un article intéressant sur un sujet que je connaissais pas.
                    Et vous avez le talent pour attirer les commentaires d’un bon niveau (je ne parle pas du mien bien sûr)


                    • Fergus Fergus 15 décembre 2012 13:44

                      Bonjour, Tf1goupie.

                      Merci pour votre commentaire.

                      Cela faisait quelques semaines que j’avais en tête d’écrire un nouvel article sur Christiania après les changements intervenus durant l’été. Content de savoir que ce sujet a pu intéresser.


                    • Hervé Hum Hervé Hum 17 décembre 2012 10:19

                      Merci pour l’info, je ne me rappelai plus de cette ville.

                      Cela me fait penser à des amis d’Uruguay ayant construit leur maison (rancho) sur une plage publique dont le gouvernement souhaite faire démolir pour permettre la vente au privé des terrains au droit de la plage.

                      Je leur expliquai 3 choses :

                      1) Si vous voulez défendre votre droit à habiter sur la plage, vous devez remplir votre devoir vis à vis de celle ci, c’est à dire à en prendre le plus grand soin en la maintenant propre. En effet, comment convaincre un journaliste de votre droit de vivre sur la plage en faisant de celle ci une poubelle à ciel ouvert ?

                      2) Si vous voulez que vos maisons soient difficiles à détruire faites en des oeuvres d’art, car s’il est facile à convaincre l’opinion de détruire des maisons « poubelles » il est bien plus difficile de détruire une oeuvre d’art.

                      3) Conséquemment des deux premiers points, montrez à l’opinion et à l’Etat que vous avez une réelle utilité et valeur ajouté pour l’endroit. Que vous êtes responsables...

                      Pour le 1er point, le conseil porte ses fruits, pour les deux autres, je ne sais pas, mais j’espère que si !


                      • Fergus Fergus 17 décembre 2012 19:32

                        Bonsoir, Hervé.

                        Désolé de répondre avec retard, votre commentaire m’avait échappé.
                        Je pense que ces conseils sont les meilleurs qui pouvaient leur être donnés. Espérons pour eux qu’ils ont pu rester sur cette plage.

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