Fiction de l’été : Claude François, d’étranges liens avec la mafia ?

Note de la rédaction : cet été, suivez toutes les semaines la série fiction "Complots estivaux". Chaque vendredi nous présentons un romancier qui a participé au recueil de nouvelles Complots capitaux autour d’une interview vidéo décalée et d’un extrait de sa fiction.
Vidéo exclusive ! Pour Les Rendez-vous de l’Agora, Philippe Ségur, l'un des auteurs de Complots capitaux dirigé par Olivier Delcroix, revient sur la mort de Claude François et éclaire la part d'ombre qui entoure encore ce mystère. Comment Claude François, le chanteur le plus adulé de sa génération, l’homme qui enchaînait les tubes et les succès, qui possédait des journaux et sa propre maison de disque a-t-il fini ruiné ? Sa fin est-elle due, comme la version officielle l’exige, à un suicide. Mais pourquoi se suicider alors qu’on est au faîte de la gloire ? Philippe Ségur revient sur la fin du chanteur. Une fin bien orchestrée, comme il se doit... Et, là encore, comment ne pas se dire que la réalité rejoint, voire dépasse, la fiction...
Réponse dans cet ultime Rendez-vous estival de l'Agora.
Cette vidéo suivie d’un extrait inédit du Téléphone pleure, nouvelle parue dans Complots capitaux (Néo/Le Cherche Midi).
Interview vidéo par Olivier Bailly
Extrait du Téléphone pleure, par Philippe Ségur :
« J’ouvris les yeux très tôt, beaucoup plus tôt que d’habitude. Aussitôt mon cœur se mit à battre à coups sourds dans ma poitrine. Nous étions le samedi 11 mars 1978. Le lendemain était un jour d’élections législatives.
Pour la première fois en vingt ans, la gauche pouvait ravir le pouvoir à la droite et le débat faisait rage. Les uns annonçaient une catastrophe nationale, les autres un avenir meilleur pour le genre humain. Dans quelques années, nul ne se souviendrait plus de toutes ces balivernes. Mais chacun se rappellerait le samedi 11 mars 1978. Personne ne pourrait avoir oublié ce jour-là, parce que c’était celui où j’allais mourir.
J’avalai ma salive et refermai les paupières. À côté de moi, je sentais la présence paisible de Kathalyn qui dormait. Cela ne suffisait pas à me rassurer. Je venais de faire un rêve pénible. Pour la troisième fois en moins d’une semaine.
J’étais en basse Égypte, traversant à dos de chameau le désert arabique, cherchant le chemin de ma ville natale que je ne trouvais pas. J’errais depuis des jours, desséché de solitude et de soif, incapable d’échapper à l’emprise 66 du Jabal el-Shayib, le mont rouge, qui me surveillait où que j’aille.
Les heures couraient, je ne cessais de fuir et chaque fois que je me retournais, il se tenait derrière moi, immense, impavide, comme s’il m’avait suivi. Enfin, j’atteignais les rives du lac Timsah.
Elles n’étaient plus rieuses, animées de bédouins, de marchands, de pêcheurs et de ribambelles d’enfants comme au temps de ma jeunesse. Elles étaient froides et nues, pétrifiées de silence. Je les parcourais, la gorge nouée, à la recherche d’une présence humaine. Il n’y avait personne.
Soudain, je comprenais que ce n’étaient pas les autres, mais moi qui étais mort. J’étais seul, en train d’arpenter le décor de mes souvenirs où personne, jamais, ne m’accompagnerait plus.
J’entendis Kathalyn s’éveiller, rejeter les draps de soie, se lever. Les paupières entrouvertes, je la vis qui enfilait un peignoir. Ses cheveux blonds glissaient sur sa nuque, caressaient ses épaules en éclat de soleil. Au moment de quitter la chambre, elle me jeta un coup d’œil. Je demeurai immobile, les yeux clos. Elle tira sans un bruit la porte sur elle.
Nous étions le 11 mars 1978. C’était la date qui avait été arrêtée. Mais je ne voulais pas vivre cette journée, je ne voulais pas de cette épreuve. Je ne me levai pas avant midi, m’enfouissant désespérément sous les draps, incapable pourtant de retrouver le sommeil. »
Complots capitaux © Néo/Le Cherche Midi
Crédit photo : malhanga
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