C’est le premier article de votre série que je lis, avec grand intérêt je dois dire.
C’est la référence à Virilio qui m’a accroché. Je me demandais bien ce que vous aviez pu trouver chez le bonhomme qui, jusqu’à présent, ne m’a guère passionné et que je tiens en piètre estime pour diverses raisons à présent oubliées mais qui ont trait, je crois bien, à son positionnement sur le 9/11 dont je crois bien me souvenir qu’il m’avait semblé absolument trivial.
Je dois vous dire que je continue de penser grosso modo la même chose de cet auteur même si je reconnais que ce qu’il pointe et que vous rapportez est très significatif.
Quoique pas original pour autant !
En effet, depuis des lustres, ceux qui s’intéressent à la guerre savent que la distance entre le tueur et le tué a contribué à atténuer la « réalité » de l’acte meurtrier et donc, a contribué à le faciliter grandement. Une silhouette qui s’effondre au loin après qu’on ait appuyé sur la gachette, ça fait beaucoup moins d’émois que d’éventrer un congénère à l’arme blanche.
La flèche, le fusil, le canon, le missile, l’automatisation, l’intelligence artificielle et bientôt la robotisation ont été ou seront autant d’occasion de détruire nos semblables sans qu’il y paraisse, en douceur et presque avec confort pour le tueur.
Quand on aura des robots tueurs, seul le donneur d’ordre assumera la responsabilité morale. La troupe humaine pourra toujours se dire qu’elle n’y est pour rien. C’est bien pour cela d’ailleurs que l’on donne parfois (toujours ?) une balle à blanc à un peloton d’exécution. Pour offrir la possibilité à chacun des membres du bataillon de penser qu’il n’a peut-être pas tué le « coupable ».
C’est d’ailleurs pour ça aussi que c’est le pilote en charge de la météo qui a ressenti une immense responsabilité après le larguage de la bombe A sur Hiroshima alors que le porteur de la bombe, celui qui l’a larguée, n’en a pas été traumatisé plus que cela. Le météorologue est celui qui « décidé » que c’était OK pour larguer la bombe. Tout a dépendu de son choix. Le largueur de la bombe attendait sa décision et n’a fait qu’y obéir. Il pouvait se ranger dans la douce catégorie du rouage de machine de guerre. Que voilà une forme de déshumanisation fort utile !
Quoi qu’il en soit, Virilio me semble jouer sans génie sur les traces de Guy Debord en thématisant le passage du spectacle de la guerre à la guerre comme spectacle. Sous ce rapport, la personne même de Hughes me semble autrement plus intéressante puisqu’elle incarne superbement (si l’on peut dire) cette diabolique transition.
Là où l’absence de génie de Virilio m’apparaît la plus évidente, c’est dans cette supposée évolution de la synchronisation sur l’information à la synchronisation sur l’émotion.
On a là un bel exemple de philosophade, cad, cette affreuse tendance des philosophes et de leur séides à croire que les choses sont distinctes parce que leurs catégories les distinguent.
Certes, l’information, ou plutôt la représentation n’est pas l’émotion et vice versa. Mais sont-elles pour autant isolables l’une de l’autre comme le fait Virilio ? Certes pas. Comme le disait cet excellent penseur qu’a été le philosophe pragmatiste étasunien John Dewey, les traiter isolément c’est comme traiter isolément la moitié gauche de la moitié droite d’un cheval au galop.
La synchronisation émotionnelle c’est le b a ba de la communication et de l’invention du symbole, des évolutionnistes (Spencer) aux psychologues (Wallon), bien rares sont ceux qui ne sont pas venus à cette idée que les cultures humaines se sont inventées dans des moments d’unité émotionnelle et représentationnelle au sein des groupes humains.
Vision que René Girard a d’ailleurs superbement parachevée avec l’hypothèse de la genèse sacrificielle des cultures humaines dans le moment de mise à mort du coupable des troubles que connaît le groupe, le bouc émissaire.
Ce qui nous amène immédiatement à faire retour au 9/11 et toute la série des « false flag » dont j’espère et je dirais même j’attends avec impatience que vous nous en fassiez une série d’articles fourmillants de détails comme c’est apparemment votre spécialité.
Pour finir, je ne saurais trop vous recommander, si vous ne l’avez déjà fait, de lire Girard (surtout ses 4 premiers livres) plutôt que Virilio qui me semble contribuer à la pensée comme les m’a-tu-vu de l’art moderne contribue à l’art. Je sais, c’est un peu dur, mais je suis toujours disposé à entendre et comprendre que je me trompe. Pour le moment, personne ne m’a détrompé sur Virilio.
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