Certes, cher Paul, mais ne peut-on aussi voir dans tout cela un effet logique direct de la mondialisation de l’information ?
Les Aztèques ramenés par Colomb à la cour d’Espagne, les Turcs et Persans à Versailles, n’étaient pas des menaces au milieu de tant de triomphes. Mais la révolution médiatique analysée par Attali est tout autre : elle a introduit en un temps extrêmement bref un fait inédit dans l’histoire de l’humanité : la réduction du village planétaire aux dimensions qui séparent notre souris de notre écran, autant dire à rien.
On sous-estime ce qu’est l’intrusion du monde sur notre bureau : ce n’est pas seulement mon espace qui est menacé, mais mon identité.
On sait que réduire les cages des animaux en captivité provoque immanquablement des conflits, et quiconque a mis les pieds dans l’espace confiné d’un voilier pendant plus de deux jours sait que c’est l’un des plus infaillibles moyens inventés par les humains pour se disputer.
N’est-ce pas notre besoin d’être qui est ici à l’oeuvre ? N’est-ce pas lui, qui nous pousse, devant cette intrusion de l’autre, à nous tourner vers nos gisements identitaires ? N’est-ce pas lui, qui nous fait revendiquer "au nom de tous les miens", les faits d’armes du clan, martyrologe inclus ?
Il me semble que c’est dans ce besoin vital de densifier un être que l’on sent menacé, que plongent les racines de la question du négationnisme : ce dernier est perçu comme une négation non pas d’un événement parmi d’autres, mais de ce qui nous constitue, et je me demande si ce n’est pas là le mobile qui anime notre philosophe.
Ce n’est pas seulement, comme vous le dites fort justement, que "nul être sain ne livre volontairement une information susceptible de lui nuire" , c’est que nul être sain ne saurait rester sans réagir devant une information susceptible, à ses propres yeux, de remettre en cause son existence.
Avatar du plombier polonais, la mise au point de M. Redeker ne relève t-elle pas d’un instinct de (sur)vie à côté duquel les vertus du doute méthodique, que vous avez tant raison de défendre, risquent bien de faire figure d’un luxe bien doux qu’auront pu s’offrir les heureux occupants d’une planète où il y avait de la place pour tout le monde ?
Nous avons été envahis par le média informatique avant d’avoir été envahis par ce qu’il a déversé sur nos tables : tant, et si brutalement, pour si peu de place...
J’ai peur que nous ne connaissions pas de paix si nous n’apprenons pas à re-concevoir et à à réorganiser nos espaces.
N’est-ce pas ce que tente de faire M. Redeker, malheureusement sur un mode plus réactif que proactif ?
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