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maharadh 24 février 2009 10:40
maharadh

Non, les "jeunes" des banlieues ne sont pas devenus méchants. Bien au contraire, cela fait longtemps qu’ils sont trop calmes face à un acharnement policier qui n’a jamais hésité à employer toute la force brutale pour étrangler et maintenir dans l’ordre social des centaines de milliers de pauvres pour qui plus rien n’est possible.

La police en uniforme à qui l’état a donné de plus en plus de pouvoir et de moyens pour exercer son autorité : contrôles au faciès permanents, perquisitions à tout-va, garde à vue pour un oui ou pour un non, comparutions en justice pour outrage et rébellion,... et rares sont les quartiers qui n’ont pas à déplorer un des leurs tué par la police.

Le travail de police des éducateurs de rue, des médiateurs qui sont sommés de donner les noms des familles en difficulté à la mairie, les désignant comme étant de fauteurs potentiels de trouble avec la menace pour les familles de suppression des allocations familiales, accréditant l’idée que c’est une poignée de "voyous" qui seraient responsables de tous les maux.

Le travail de police de colocataires qui signalent au force de l’ordre la présence "illégale" et pénalement répréhensible de personnes dans les halls d’immeuble et qui pratiquent légalement la dénonciation anonyme.

Le travail de police des commerçants, des vigiles, des maîtres-chiens...

Non plus en disant que ces jeunes sont des voyous qui se livrent à une compétition dans la destruction aveugle, et qu’ils sont forcément manipulés par des mafias ou des intégristes.


Alors que ceux qui ont la bonne méthode la donnent. Et en attendant, il est plus sage de ne pas donner de leçons à ceux qui expriment leur colère et de ne pas se transformer en criminologues, en militants experts, en sociologues en quête d’un terrain de lutte à vampiriser, ou en moraliste de gauche appelant une fois de plus l’état au secours pour rétablir l’ordre républicain. Qu’est-ce que ce "devoir républicain" pour des enfants de parents immigrés qui n’obtiendront la nationalité française qu’en échange d’une bonne conduite au risque de se faire expulser du territoire à leur majorité ? Qu’est-ce que ce "devoir républicain" pour des jeunes qui naviguent entre petits boulot de merde payés des miettes et allocations sociales ou RMA ?


Ah ! mais ils brûlent aussi les voitures des voisins, de ceux qui galèrent pour survivre... Primo, il n’y a jamais eu dans l’histoire de révoltes et de révolutions qui n’aient pas été génératrices de désordres et c’est dans le développement de l’émeute que se réfléchissent et se précisent les objectifs. Deuxio, c’est presque indécent de pleurer sur de la ferraille quand ça fait des années que la misère est orchestrée par les plus nantis qui ne se soucient guère de la vie des enfants des quartiers populaires. Tertio, c’est toujours la même rengaine du bouc émissaire et de la victime : il faut un responsable pour cacher sa propre misère, c’est forcément le plus pauvre. Ceux dont les voitures crament qui appellent à la responsabilité citoyenne se trompent de "tortionnaires" .

Le plus grand risque est que ce feu de vie ne dure qu’un instant, qu’il ne se propage pas et qu’il se fasse le lit d’un nouveau durcissement du contrôle social sur chacun de nous et particulièrement sur les mineurs cordialement invités dans les prisons en construction. Les policiers interpellent à la pelle, les tribunaux condamnent sans vergogne et le pouvoir décrète l’état d’urgence... Mesures d’une véritable guerre sociale. Ne laissons pas les émeutiers seuls face à la répression, ne laissons pas se développer la chasse aux étrangers.

Le recours à la violence comme "riposte légitime" m’interroge de plus en plus quand je vois que, ici comme ailleurs, il y a un anéantissement systématique, méthodique de toutes les conquêtes sociales et politiques et, au-delà, des droits fondamentaux et des libertés individuelles. Et comment ne pas s’interroger quand on voit que cette entreprise de démolition ne se heurte à aucune véritable résistance, si ce n’est à quelques "barouds d’honneur" sans effet significatif ?

Mais alors, mourir pour mourir, ne faut-il pas rechercher une mort au moins… utile aux autres ? Cette résignation, n’est-elle pas un renoncement ? Le renoncement à soi, à son humanité ? Peut-on rester humain en vivant couché ? Si vouloir rester debout, c’est s’exposer au risque d’avoir à payer le prix fort, celui de sa vie, où est la violence… illégitime ?



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