J’ai bien conscience que la quantité de chaleur rejetée par un EPR est infinitésimale par rapport à l’ensemble de l’énergie que nous consommons, et encore plus minuscule par rapport à l’énergie reçue par la Terre en provenance du Soleil.
Là où elle devient nettement plus importante c’est lorsqu’il s’agit de la dissiper, et c’est le problème qui se pose par temps chaud lors du rejet en rivières.
C’est le problème de la quantité d’eau indispensable pour constituer une source froide et la question de l’eau est (et sera) de plus en plus un énorme problème mondial : il nous faudra de plus en plus utiliser l’eau avec beaucoup d’efficacité et autant de parcimonie, tout en veillant à ce que la biodiversité souffre le moins possible de ces usages.
Les rejets thermiques des centrales nucléaires peuvent paraître anecdotiques face aux masses océaniques certes, mais ces dernières sont déjà fort mal en point, soumises à un réchauffement qui les fait se dilater, qui pousse les espèces à migrer pour certaines ou à probablement disparaître pour d’autres (et l’on peut assez raisonnablement estimer que les manchots empereurs n’en n’ont plus pour très longtemps si le rythme actuel de réchauffement perdure).
Ceci affecte aussi la capacité à absorber plus ou moins de gaz carbonique... : nous sommes au coeur d’un faisceau de contraintes très fortes et difficiles à résoudre.
Mais je souhaite faire un parallèle avec une molécule médicamenteuse qui me soignerait et dont une fraction serait évacuée dans mes urines.
10 mg par jour dont 3% rejoignent finalement la rivière : je pourrais estimer que "ce n’est rien".
Pourtant nous sommes un certain nombre à utiliser cette molécule et l’on s’aperçoit qu’elle affecte fortement les poissons.
Cette question de la chaleur émise n’a en fait que peu de rapport avec celle évoquée dans un autre article d’un ralentissement de la rotation terrestre à cause de l’utilisation de l’énergie des marées, à laquelle vous vous référez.
L’inconvénient "source froide" sera au rendez-vous de toute production d’énergie dans un cycle thermique, et l’exploitation de la géothermie aurait également l’effet de tirer des profondeurs terrestres des calories qui y auraient dormi longtemps encore, pour les faire finalement aboutir dans les airs et les eaux, j’en suis bien conscient.
Seulement il est d’autres cycles qui ne présentent pas cet aspect extractif : une centrale solaire thermique capte une chaleur dont une très grande part serait absorbée par l’atmosphère et quitterait d’autant moins la biosphère que l’effet de serre serait important.
Par ailleur par sa taille toujours assez imposante (si l’on désire de la puissance) un champ de capteurs doit permettre de changer localement le climat : certains promoteurs de centrales solaires thermiques pensent ainsi convertir certaines zones désertiques en aires de maraîchage abritées sous les réflecteurs.
Les retombées d’un tel couplage doivent également être prises en compte dans un calcul plus vaste que celui de la seule énergie électrique produite.
Quelques milliers d’hectares de cultures maraîchères en zones désertiques, cela signifie une production agricole, des emplois, de la création de richesse pour beaucoup plus de personnes que n’en générera une centrale nucléaire.
Il semble donc thermiquement, mais aussi économiquement et socialement, beaucoup plus raisonnable d’utiliser le rayonnement solaire que l’atome, et l’énergie éolienne quand à elle ne produit aucun rejet thermique.
Enfin des projets comme TREC / DESERTEC largement basés sur des mix renouvelables et sur le solaire thermique ne se conçoivent vraiment que dans le cadre de coopérations internationales étroites et fortes : ce pourrait être l’occasion d’un projet à la hauteur de la construction de l’Europe (qui a commencé avec la CECA, ou Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier) appliqué à l’ensemble du pourtour méditerranéen.
C’est, disons le tout net, d’une envergure tout à fait démesurée par rapport au seul fait de construire un, deux, ou même trois EPR en France.
Mais évidemment ce n’est pas à la portée de n’importe quel représentant de commerce : seule une personnalité politique d’envergure serait capable de fédérer autour d’une telle idée, et là... il faudra peut-être attendre...
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