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marcuz 4 juin 2011 13:37
marcuz

Il se trouve que je viens de tomber amoureux de la jeune femme la plus belle du monde...bien évidemment. Elle m’aime, je l’aime. Pour autant, on est pas au pays des bisounours...

Quand je lui dis que j’aime sa liberté, elle me répond (bien légitimement) que l’attachement suspend la liberté. Quand je lui dit que je ne suis pas jaloux, ça la rend triste...
Bref, .au delà de notre intimité (et mon témoignage s’arrêtera là...), les rapports du sujet à l’objet vont bien au delà de vos analyses, à mon goût trop idéalistes, trop contractualistes, pour ne pas dire... moralistes.

Sartre le disait justement :

"Il arrive qu’un asservissement total de l’être aimé tue l’amour de l’amant. Le but est dépassé : l’amant se retrouve seul si l’aimé s’est transformé en automate. Ainsi l’amant ne désire-t-il pas posséder l’aimé comme on possède une chose : il réclame un type spécial d’appropriation. Il veut posséder une liberté comme liberté.
Mais, d’autre part, il ne saurait se satisfaire de cette forme éminente de la liberté qu’est l’engagement libre et volontaire. Qui se contenterait d’un amour qui se donnerait comme pure fidélité à la foi jurée ? Qui donc accepterait de s’entendre dire : "Je vous aime parce que je me suis librement engagé à vous aimer et que je ne veux pas me dédire ; je vous aime par fidélité à moi-même ?" Ainsi l’amant demande le serment et s’irrite du serment. Il veut être aimé par une liberté et réclame que cette liberté comme liberté ne soit plus libre. Il veut à la fois que la liberté de l’Autre se détermine elle-même à devenir amour - et cela, non point seulement au commencement de l’aventure mais à chaque instant - et, à la fois, que cette liberté soit captivée par elle-même, qu’elle se retourne sur elle-même, comme dans la folie, comme dans le rêve, pour vouloir sa captivité. Et cette captivité doit être démission libre et enchaînée à la fois entre nos mains. Ce n’est pas le déterminisme passionnel que nous désirons chez autrui, dans l’amour, ni une liberté hors d’atteinte : mais c’est une liberté qui joue le déterminisme passionnel et qui se prend à son jeu."

(in L’être et le néant, III, 3)


Non, l’amour n’est pas un contrat. Il n’y a de contrats que dans la vie marchande. Et le « contrat social », politique ou amoureux ne sont que des chimères. Non, je parlerais davantage de pacte. Un pacte qui commence dés la séduction : ce jeu plein de pièges (à cons) et de coups (tordus) que l’on inflige à l’autre. Et qu’on consent à subir.... On a pas 36 milles possibilités, on joue le jeu ou non. Et ce qui pousse souvent à ne pas le jouer, ce qui effraie, c’est son terrorisme. Cette terreur douce, à la fois criminelle...et bienveillante. Il est initiatique, éducateur... Lisez Baudrillard, De la séduction. C’est magnifique !

Voilà pourquoi je pense sincèrement qu’il est tout bonnement impossible d’empêcher les rapports de force dans une relation amoureuse et de séduction. Ce n’est même pas souhaitable, ce n’est même pas l’enjeu.

Et parlons donc de démocratie... Si l’on considère que la démocratie consiste à détruire les relations de pouvoir alors on se trompe lourdement... (L’Histoire n’a pas de fin et n’en aura jamais...)

Non, la démocratie est bien davantage sa circulation, le tour et retour d’un pouvoir qui tourne. Voilà pourquoi il n’y a de relation amoureuse saine qu’à l’unique condition que la force tourne, que les positions de dominant/dominé puissent être renversées, occupées alternativement par les deux amants. Et que l’on y prenne du plaisir ...

Voilà la différence entre un pacte et un contrat. Les contrats (de vente, de paix, etc...) arrêtent la circulation des forces et décident de qui domine. Définitivement. Et c’est cela qui est insupportable... C’est cela la tyrannie.


ps : le « pacte » dont je parle, n’a bien évidemment rien à voir avec le libertinage ni ce que Sartre et « le Castor » ont pu « machiner », puisque leur correspondance a davantage révélé leurs échecs et leurs souffrances....



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