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Accueil du site > Tribune Libre > 1945 - Le parti communiste devient le premier parti de France

1945 - Le parti communiste devient le premier parti de France

Au soir du vote du 21 octobre 1945, l’attelage référendum-élections-à-l’Assemblée-constituante mis au point, pour l’essentiel, par Jules Jeanneney sous l’autorité de Charles de Gaulle, a commencé à faire dévier la France d’un éventuel débouché institutionnel sur l’Assemblée unique, terreur des possédants depuis le temps de la Convention de 1793…

Cette Assemblée constituante, très éloignée d’être souveraine - alors qu’elle vient tout juste d’être élue par le suffrage universel direct féminin et masculin -, voit l’ensemble de ses attributions mordues par un pouvoir exécutif auquel la mini-constitution adjointe aux résultats du référendum fait la part belle.

Vient ensuite le moment de désigner la personne qui dirigera le Gouvernement tout au long de la préparation, par cette Assemblée constituante, du texte de la nouvelle et véritable Constitution.

La mini-constitution indique que c’est à l’Assemblée constituante de choisir un responsable politique, qui, ensuite, formera une équipe gouvernementale et déterminera les éléments du programme qu’il compte appliquer, le tout devant être accepté par un vote de l’Assemblée.

Mathématiquement, les choses paraissent claires : avec 50,9 % des voix et 306 députés sur une Assemblée qui en compte 579 au total, les communistes et les socialistes sont majoritaires. Ils sont donc en situation de s’entendre sur la candidature de l’un des leurs, et sur un programme marqué de préoccupations socialo-communistes, si l’on peut oser le terme.

À l’intérieur de cette éventuelle coalition, le parti communiste, avec ses 160 sièges (26,8 % des voix, premier parti de France… ce qui devait durer jusqu’aux élections de 1956), devançait le parti socialiste (146 sièges pour 24,1 % des voix).

Et voilà Maurice Thorez chef du gouvernement ?... Ce qui voudrait dire que l’Assemblée constituante n’aurait plus rencontré aucun véritable frein à l’exercice, par elle, d’une souveraineté pleine et entière… La future Constitution menaçait, par conséquent, de porter sur les fonts baptismaux… la terrible Assemblée unique ! Ce que la plupart des responsables socialistes ne voulaient certainement pas.

Et les voici qui, sans trop le dire, obtiennent des communistes qu’ils renoncent à la candidature de Maurice Thorez… Or, en parfaite logique avec la dynamique majoritaire, les camarades de celui-ci offrent de soutenir la candidature d’une personnalité socialiste : Félix Gouin.

Ah que nenni ! se récrient les socialistes… qui ne veulent surtout pas, eux, de la dynamique majoritaire… C’est-à-dire qu’ils ne veulent surtout pas que ce qui s’est manifesté à travers l’expression du suffrage universel puisse devenir la réalité politique du pays jusque dans l’élaboration de la future Constitution et déboucher sur… l’Assemblée unique.

Et ils redoutent d’autant plus cela que, dans le pays lui-même, le parti communiste se révèle ne pas être seulement le chouchou du vote… Son influence tourne au raz-de-marée, et ceci, dans différentes couches de la population.

L’historienne Georgette Elgey - qui se situe elle-même politiquement à mi-chemin de Pierre Mendès France et de Charles de Gaulle - nous fournit quelques chiffres, et quelques témoignages :
« Les communistes étaient 45.000 en février 1934, 340.000 en décembre 1939, les voici 906.727. Les sympathisants ne se comptent plus. 80 % des ingénieurs des bassins miniers du Nord adhèrent au syndicat d’obédience communiste. » (La République des Illusions, Fayard 1993, page 44)

Pour sa part, l’ancien ministre socialiste de la Production industrielle, Robert Lacoste, devait s’exclamer :
« Que de hauts fonctionnaires et parmi les plus haut perchés jouent le communisme gagnant ! » (page 44)

Or, au-delà du parti communiste, il y a la C.G.T. (Confédération générale du travail) qui, dès septembre 1944, totalisait, toujours selon Georgette Elgey, 5.429.000 adhérents.

Ajoutons encore que le journal L’Humanité est, avec 456.000 lecteurs et lectrices, le premier journal de France, tandis que Ce Soir, dirigé par Louis Aragon et Jean-Richard Bloch, en compte 419.000.

Petite note complémentaire de Georgette Elgey  :
« Les tirages de la presse régionale [communiste] sont analogues. » (page 43)

Voilà donc ce qu’il allait falloir balayer au plus vite… Ce serait la première tâche vraiment importante du parti socialiste de Léon Blum… dès les lendemains de la Libération.


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10 réactions à cet article    


  • Le Corbeau Magnifique Le Corbeau Magnifique 4 juillet 2015 16:12

    T’as rien sur l’Homme de Néanderthal ?

    C’était juste après, j’crois...


    • Dwaabala Dwaabala 4 juillet 2015 17:24

      @Le Corbeau Magnifique
      ... lâche sa fiente...


    • Dom66 Dom66 5 juillet 2015 00:00

      @Michel Maugis

      Votre explication (que j’approuve)  est sans doute un peu trop profonde pour un volatile. smiley

       


    • Taxiarchis 4 juillet 2015 18:17

      on se rappelle avec émotion des commentaires dithyrambiques formulés par le PC sur la personne du grand Staline, père des peuples, bienfaiteur de l’humanité ... et accessoirement boucher !


      • Michel J. Cuny Michel J. Cuny 4 juillet 2015 18:27

        @Taxiarchis
        Boucher ?...
        Où avez-vous pris cela ?
        Pour ma part, j’ai minutieusement étudié cette question, et je suis allé de surprise en surprise...
        C’est combien finalement ? Rien qu’en dizaines de millions, sauriez-vous nous donner une évaluation appuyée sur des documents précis ?
        Pour ma part, voici ce que j’ai trouvé :
        http://crimesdestaline.canalblog.com
        et publié, ensuite, dans l’ouvrage « Quand le capital se joue du travail - Chronique d’un désastre permanent » (Editions Paroles Vives, 2012, 475 pages)


      • Philippe VINSONNEAU Philippe VINSONNEAU 4 juillet 2015 23:45

        1945 - Le parti communiste devient le premier parti de France - et il le redeviendra dès lors que le néolibéralisme ne pourra plus continuer à dresser la populace à coups de crédit à la consommation, la phase ultime est déjà à coups de crédits pour regrouper des crédits.... adieu écran plat, 4x4 de débilos, ski et plage à tempérament ; ès lors que les 63 millions de français moins les 1000 familles qui se sont accaparés16 % du PNB du pays auront enfin compris où est leur intérêt, dès lors que les employés artisans commerçants petits cadres faux parvenus auront enfin compris qu’on leur a juste fait croire qu’ils étaient riches mais qu’en fait ils sont des marionnettes. Faudra -t-il comme en 1945 que cela soit au lendemain d’une guerre ??? La Grèce qui fut la mère de notre Europe va donner le ton, suivi de l’Espagne. Dommage que depuis 1968 la droite française ait tout fait pour empêcher le Peuple de France de réfléchir, nous n’aurons notre place dans ce grand retour que par la contrainte mais pas par l’intelligence et encore moins par le cœur.


        • Michel J. Cuny Michel J. Cuny 5 juillet 2015 09:55

          @Philippe VINSONNEAU
          Merci pour ce commentaire qui ne peut manquer de donner à réfléchir.
          La question du crédit à la consommation est tout à fait essentielle : elle doit conduire à étudier de près les positions de Keynes, dont il est connu qu’en sa qualité d’héritier de Malthus, il avait comme principal souci de développer ce qui, aujourd’hui, s’appelle les classes moyennes.
          Le fond de la chose était le maintien du statut international de la livre.
          En face de quoi, se profile ce qui va désormais tendre à se produire pour ces mêmes classes moyennes, une fois le crédit à la consommation en berne.
          Car se posera le problème de la production, au sens général, mais aussi (ce qui est fondamental du point de vue capitaliste) celui de la production de plus-value.
          Il suffit de regarder de près le travail de Thomas Piketty pour en prendre, malgré lui, une conscience très aiguë.
          C’est ce que je montre ici :
          http://mjcunytpiketty.canalblog.com/


        • Le p’tit Charles 5 juillet 2015 08:22

          Une preuve que la dégénérescence mène au pire.. ?


          • CN46400 CN46400 5 juillet 2015 10:01

            En dehors de son aspect historique cet article suscite des commentaires que, pour ma part, je trouve déplacés. La situation politique, française et internationale, de 44-45 n’existe plus, et la situation économique non plus. Le capitalisme a lui aussi profondément évolué si bien que les anathèmes qui se multiplient ne signifient a peu près rien pour régler les problèmes actuels. Quand au « socialisme » qui désignait alors le régime de Staline, il a aussi peu à voir avec le « communisme » fantasmé par la réaction capitaliste qu’avec celui celui que lui affublait certains laudateurs.


             En fait en 45, la déviation entamée par Staline en 27 du « socialisme dans un seul pays » sortait victorieuse de l’affrontement dantesque contre le nazisme, et personne n’osait donc la contester ouvertement. Les communistes français, dans ces conditions, ont obtenus un nombre non négligeables d’avantages pour le prolétariat qui se sont révélés décisifs dans l’expansion économique qui a suivit, et ce malgré les guerres coloniales (Indochine et Algérie) qui n’ont servi qu’à freiner cette expansion, et surtout, à éjecter politiquement le PCF des allées du pouvoir.

             Mais la vie et surtout la course au armements dans laquelle l’URSS s’est finalement perdue, ne seront profitable que si les leçons adéquates sont tirée de cet échec final. Les prolos n’ont que faire des chars d’assauts ou des avions de combats, la vie, dans le socialisme, a d’autres besoins. 

            • COVADONGA722 COVADONGA722 6 juillet 2015 10:26

              « Ô grand Staline, Ô chef des peuples
              Toi qui fais naître l’homme
              Toi qui fécondes la terre
              Toi qui rajeunis les siècles
              Toi qui fais fleurir le printemps
              Toi qui fais vibrer les cordes musicales
              Toi splendeur de mon printemps,
              Soleil reflété par des milliers de cœurs. »

              — RakhimovPravda28 août 1936,

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