2009 est là mais... Le 21ème siècle n’existe pas !
Eloignez les enfants de cette lecture, la vision est cauchemardesque. L’année 2008 s’achève sur fond de mauvaises nouvelles économiques, de crises politiques partout dans le monde, de bien incertaines espérances du côté de l’Amérique dont le gouvernement change à la mi-janvier 2009. En fait, le bilan de l’année 2008 pouvait être effectué par anticipation dès le mois d’octobre. De même, sans prendre beaucoup de risque, on peut livrer le sens de cette première décennie du 21ème siècle, qui sur le calendrier prendra fin le 31 décembre 2010. Que s’est-il passé de nouveau depuis le 1er janvier 2001 ? Rien, pratiquement rien. Les mauvaises langues diront que cette non décennie a été taillée sur mesure pour une hyper existence du Président qui face au néant, ne peut que devenir proéminent.
La première décennie du 21ème siècle ne s’est pas signalée par quelques innovations surprenantes. Le long cours de l’histoire du monde s’est déroulé, avec quelques conflits. Les Etats-Unis ont occupé la place de la nation la plus puissante au monde, économiquement et militairement. Pas de quoi en faire une histoire, ni d’ailleurs l’Histoire. Pour saisir la spécificité des années 2000, il nous faut plutôt regarder du côté des artistes. Littérature, musique, cinéma. Et dans les champs sociaux, là où se dessinent des comportements et cultures inédites. Enfin, les découvertes scientifiques et les innovations technologiques signent également la marque d’une décennie. Magnéto please !
Quelques exemples. Années 1950, l’ADN est découvert, la génétique décolle, tout comme les corps s’envolent en swinguant sur les chansons d’Elvis. Années 1960, Beatles et Stones, mélodies pop, moderne, rebelle, paroles aussi, avec Dylan. La physique des particules en plein essor. L’homme marche sur la lune. Années 1970, l’ordinateur personnel, prise de tête sur les claviers. Prise d’oreille avec le punk. Année 1980. La crise, l’entreprise, culte de la réussite et du fric et Microsoft qui s’insinue dans les ordinateurs. La France invente le Minitel, affreuse machine grise devenue rose grâce aux complaisances du 36 15 et des Télécoms. Fortune fut faite. Années 1990, les belles effusions de techno et d’électro. Ce sont les années Inrock, ça commençait bien, avant que ce journal ne chronique la daube néo-pop, le lounge pour bobo à peine sortis des langes. 1990, c’est aussi l’esprit Canal, Internet qui monte, les téléphones portables, les gènes, les espoirs placés dans la thérapie génique, le métal dans toute sa splendeur, les protéines scaffold, la techno parade, les neurones miroirs, ma thèse de philosophie, les nouveaux disques dur à très haute capacité pour bouffer les 800 K de Windows, et mon livre vendu à 100 exemplaires. Années 2000. Soyons honnête. Il y eut une innovation. Une entreprise, un symbole, un réflexe, un dépassement de Windows, ordis en réseaux, merci Google ! No comment. Et le reste ?
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Le cinéma des années 2000 ? A vrai dire, rien qui n’ait été déjà expérimenté au siècle précédent. Le cinéma est devenu une affaire de production, avec gros moyens, acteurs surpayés, effets spéciaux et un cinéma d’auteur concocté par des cinéastes avec moins de moyens. La France, premier pays du cinéma derrière les Etats-Unis, se précipite pour voir deux navets, Amélie Poulain puis les Ch’tis. Entre temps, les mêmes vedettes passent à télé, quelques têtes nouvelles arrivent et c’est normal, il faut bien remplacer les vieux acteurs passés à la retraite ou à trépas. Il n’y a pas de réalisateur, pas de scénariste, pas de films. Rien à voir, circulez, après avoir payé votre place de ciné, ou bien le DVD chez le marchand ! Et à Cannes, chaque année, les festivaliers s’amusent dans les soirées, c’est ce qu’il y a de mieux à faire, maintenant que les films sont devenus ennuyeux. Enfin presque, il y a encore David Lynch.
La littérature des années 2000 ? Aucun auteur surprenant, majeur, mais il est vrai que le monde est devenu routine. Il n’y a pas d’écrivain recensé pour cette décennie. Mais vous pouvez acheter des livres dans les magasins car il y a de plus en plus de gens qui savent écrire et fabriquer des histoires. Le grand succès des années 2000, c’est Harry Potter. Pour les petits et les ados. Les grands peuvent lire le Da Vinci code.
La musique des années 2000 ? Beaucoup de groupes de rock enregistrent des disques car il y a de plus en plus de musiciens. Mais plus aucune innovation. Tout a été déjà fait dans les années précédentes. Curieusement, l’autre jour, flânant chez OCD à Bordeaux, j’écoutais quelques disques choisis dans le rayon métal, y trouvant un certain plaisir et reconnaissant l’air du temps. En lisant la pochette, je m’aperçus qu’ils dataient de 1997 ou 1998. J’adore le rock mais serait bien démuni pour citer quelque nouveauté fracassante sortie les années 2000. A part Therion. Quant aux S.X, Arena, IQ, P. Tree et autres Shadow Gallery, ils ont livré des perles mais étaient déjà présents à la fin des 90’s. Les années 2000 sont aussi, du point de vue médiatique, très ennuyeuses. La télé se repasse les vieilles séquences, les animateurs s’invitent les uns chez les autres pour ne rien échanger sauf bavarder. Les émissions se refilent les vedettes déjà usées, Pagny, Cabrel, Obispo, Delerm. Les séries françaises sont insipides. Et chez Sébastien, on recycle les déchets de la chanson française en swinguant sur les années bonheur, 70’s et 80’s. Vivons-nous dans les années malheurs ? Mais non, plus belle est la vie sur France trois à 20 heures passées.
La science des années 2000 ? Ben, à part le séquençage du génome humain qui résulte d’un perfectionnement des outils du précédent siècle, et qui ne sert à rien ou trois fois rien, quoi de neuf docteur ? Rien. Il faut dire que la science a épuisé ses champs de progrès, et que seules, des révolutions théoriques pourraient nous surprendre, avec les applications afférentes. Mais pour l’instant, la science est devenue une compétition encadrée par un système aux règles contraignantes, gestion, moyens, machines. Si bien que le chercheur est tellement professionnel qu’il s’est spécialisé pour chercher et ne peut plus trouver. A part quelque maigre reconnaissance et un salaire pour répondre à une tâche fixée par les agences, les entreprises et les Etats. Aucune découverte majeure n’a été faite ces années 2000. Il se murmure cependant que la maladie d’Alzheimer pourrait bénéficier d’un traitement des plus efficace.
La technique des années 2000 ? Google a changé notre manière d’aller chercher l’information mais ce n’est pas ça qui va changer la vie. On a assisté à une miniaturisation des technologies liées au multimédia mais quel intérêt à vrai dire ? Si ce n’est de vendre des gadgets aux gogos qui veulent se la jouer tendance. Et le reste ? Des gros avions pour transporter les troupeaux de touristes. Des belles voitures pour afficher sa réussite sociale. Le TGV qui va très vite. Pas de quoi changer la vie, ni changer de siècle ou même de décennie.
La politique des années 2000 ? Rien qui n’ait été déjà fait. En France, la constitution n’a fait que mettre à jour un texte pour l’adapter à une présidentialisation du pouvoir qu’on avait déjà connue sous Mitterrand puis Chirac, mais avec moins d’ostentation que celle pratiquées par Sarkozy. Les lois votées sont nombreuses. Elles servent à arbitrer les enjeux et désirs économiques tout en assurant un ordre apparemment de plus en plus policier et surveillé. Bref, rien de très neuf. De l’ancien fait avec des techniques nouvelles. Qui nous ramène quelques décennies en arrière, au temps de la télé en noir et blanc. Cherchons les progrès que nous ne trouverons rien.
La pensée des années 2000 ? Là, on imagine aisément que les uns voient du vide, les autres une activité intellectuelle soutenue. Tout dépend où on se place. Mais force est de constater que les philosophes les plus vendus offrent des produits de la pensée faciles à digérer. Aucun philosophe un peu innovant et ardu ne se vend dans les magasins de livre. Finie l’époque ou Sartre, Derrida, Deleuze, Foucault, Marcuse et d’autres pouvaient faire le bonheur des maisons d’éditions tout en satisfaisant un large public cultivé. Que reste-t-il ? En fait des dizaines de livres érudits scrutant pour la énième fois tel détail chez Aristote ou chez Kant. Rien de bien fracassant. Des travaux écrit par des universitaires pour des professeurs et des étudiants. Aucun penseur important n’a émergé dans les années 2000. Le 21ème siècle n’existe pas !
L’art conceptuel des années 2000 ? Le 21ème siècle n’existe pas ! Mais il y eut des happenings dans les sixties et seventies et quelques belles toiles. C’était l’époque, plus maintenant. L’art conceptuel est dans les musées et les cartons, dans les budgets des collectivités, dans le compte en banque des prétendus artistes mais véritables cultivateurs de réseaux. L’art conceptuel est un produit aussi essentiel que le yaourt qui renforce les défenses immunitaires. Le 20ème siècle n’existe plus !
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