Bientôt le sapin de Noël puis la trêve des confiseurs et dans toutes les rédactions, le traditionnel marronnier du papier récapitulatif est déjà prêt pour être imprimé dans les journaux. L’année 2011 se termine alors que dans les cercles financiers, une formule prévaut, ça sent le sapin ! A Londres, les paris sont ouverts sur la fin de l’euro en 2012. Que retenir de 2011 ? Il sera difficile d’être original et de se démarquer du quartet médiatique ayant dominé l’année écoulée. Printemps arabe, catastrophe de Fukushima, affaire DSK et pour finir, les sommets de la dernière chance pour maîtriser la crise des dettes souveraines européennes. Cela ressemble aux saisons de Vivaldi. Le printemps arabe s’est en fait déroulé en plein hiver. Mais comme les observateurs ont voulu y voir un signe d’espérance, ils ont baptisé printemps ce qui n’a été qu’une insurrection populaire dont nul ne pouvait statuer sur le sens et le cours que ces événements allaient prendre. Seule certitude, deux dictateurs arabes ont été destitués par la rue. Et pour l’avenir, Incha Allah, formule bien facile mais appropriée. Ensuite, l’actualité a connu le printemps japonais, avec une médiatisation active et une pollution radioactive. Un printemps qui a viré au cauchemar. L’été sera show et c’est un véritable show de télé plus que réalité servi par DSK qui lui, est passé d’un rêve présidentiel à un cauchemar judiciaire. Pour finir, l’automne et les feuilles qui se ramassent à la pelle, tandis que l’euro risque de se ramasser malgré l’appel au secours lancé par Nicolas et Angéla.
Il reste quelques petites places pour évoquer l’intervention de l’Otan en Libye et la fin de Kadhafi dont l’exécution a été sans doute voulue et orchestrée par l’Occident, tandis qu’au Pakistan, Ben Laden fut liquidé par un commando américain. L’actu de 2011 s’est déroulée à Tunis, au Caire, à Fukushima, à Tripoli, à New York, à Bruxelles. Dans notre province de France, accordons une mention spéciale au PS et à ses primaires jouées dans la sérénité pour choisir le candidat qui avait été choisi par les médias quelques mois auparavant comme outsider face à DSK, puis comme favori sans DSK. Voilà un digest de l’actualité qui donne une figure assez particulière et bigarrée de cette année 2011. Le titre de ce billet aurait dû être ficelé en copiant Magritte : « ceci n’est pas l’année 2011 ». Nul ne peut contester que les choses ont changé dans les pays arabes, au Japon et dans la vie de DSK. Mais dans de nombreux pays, la France notamment, rien n’a vraiment changé globalement. Les événements de 2011 on surtout frappé les esprits. Les gauchistes du front faussement populaire de Mélenchon ont fantasmé sur les fausses révolutions arabes, les Verts s’affolent du nucléaire, le PS, le Centre et l’UMP sont inquiets pour la croissance en 2012, le triple A et les dettes européennes. A chaque parti politique son choix des thèmes présents dans l’actualité. Et ce billet sera rebaptisé : « ceci n’est pas la réalité ».
Finalement, l’Histoire de la seconde décennie du 21ème siècle ne ressemble à rien de bien clair. Il n’y a pas de grand principe déterminant, comme au temps de la guerre froide et des mouvements sociaux, de la jeunesse, des émancipations, qui en France ont porté la gauche au pouvoir en 1981. Ou comme après 1990, quand l’Amérique du Sud s’est réveillée et que l’Union soviétique s’est effondrée alors que la nouvelle économie a flambé. Ou comme après 2001, la guerre contre l’axe du mal et la fascination pour Internet. La décennie qui vient n’a pas encore de marque de fabrique. C’est assez contrasté, sans unité, avec un sentiment de liquéfaction du monde. Les geeks pleurent Steve Jobs et les humanistes rendent Hommage à Vaclav Havel. Il n’y a pas grand monde pour regretter Ben Laden mais sans doute beaucoup de Libyens qui ont pleuré la mort de Kadhafi.
De ce portrait d’un monde liquéfié on ne tracera aucune perspective ni interprétation de tel ou tel événement qui marque les uns en laissant indifférents les autres. Le monde n’avance pas d’un pas coordonné et c’est peut-être mieux. Une maîtrise totale du monde par un gouvernement mondial ne serait pas une bonne nouvelle. Laissons l’Histoire se fluidifier car elle ne peut pas se sublimer en l’état actuel des choses humaines. Au fait, avez-vous remarqué ce qui relie les événements des quatre saisons en 2011 ? C’est le côté matériel et pulsionnel. Révoltes et ressentiments arabes, tsunami et instabilité nucléaire consécutive à l’instabilité de la terre, vie réglée puis déréglée par les envies en dessous de la ceinture pour DSK et enfin, des histoires de sous avec la dette. La matière semble s’être déchaînée au point d’inonder la civilisation et d’éteindre les étincelles capables d’enflammer les passions pour la science, l’art et la liberté.
Suite à l’insurrection populaire du 17 décembre place Tahrir, l’institut d’Egypte fondé en 1798 par Napoléon a subi un incendie dont il est fait peu de cas parmi les manifestants. On sait seulement que des individus ont tenté de sauver quelques vieux livres et manuscrits pour les remettre aux autorités ou peut-être les revendre. Des documents d’une valeur historique inestimable sont partis en fumée. Voilà bien le triste symbole d’un monde balayé par les puissances matérielles et qui voit peu à peu la Civilisation s’étioler pour laisser place à un monde de technologies, publicités, propagandes, envies, futilités. Quelle importance après tout que ces vieux livres partis en fumée, puisque les nouveaux livres ne seront ni lus ni publiés. Qu’a-t-on vu de neuf en 2011 ? Rien, du moins selon mon opinion personnelle. Pas un film, un livre, un disque, un auteur, une idée, une découverte, une innovation technologique, un politicien visionnaire. Rien, la civilisation n’avance plus et reste sur ses acquis ce qui est le minimum syndical. Méfions-nous alors des liquidateurs.
L’année 2011 n’a été pleine que pour remplir les journaux mais n’a rien offert de substantiel si ce n’est qu’elle a confirmé l’état médiocre de la culture, la diffusion du mauvais goût, la présence permanente des mêmes célébrités sur les plateaux et les mêmes rengaines attisant les peurs et les ressentiments. Sur fond de malaise de civilisation. Bref, ces industries culturelles, ces gouvernances sans vision, ces machines médiatiques, ces bureaucraties diversifiées, ces finances décomplexées, c’est tout un système se jouant entre élites et masses pour enterrer la civilisation. 2011 s’en va et c’est tant mieux. Par contre, il peut se passer des choses intéressantes dans la vraie vie. L’esprit humain n’est pas encore enterré par le tsunami du monde liquéfié* et décivilisé qui avance.
* Le sociologue Zygmunt Bauman n’est pas étranger à cette idée de liquéfaction
Moyenne des avis sur cet article :
3.89/5
(18 votes)
« tandis qu’au Pakistan, Ben Laden fut liquidé par un commando américain. » Même Dugué y croit ! Alors que sur Agoravox beaucoup - y compris moi- penchent plutôt pour une mise en scène : les USA ont fait descendre un gros bonnet, le faisant passer pour Ben Laden (déjà mort depuis longtemps) pour annoncer le retrait d’Afghanistan.
Justement, c’est bien l’esprit humain qui est à la source de ce monde liquéfié. Arrêtons de toujours faire porter la faute aux pouvoirs occultes ou non, ils sont là car les masses l’ont bien voulu. Comment croire que 6 milliards d’individus sont à la botte de quelques prédateurs, hommes ou systèmes ? Le vrai problène ne réside-t-il pas d’abord dans la nature humaine profonde ?
L’état du monde n’est que le phénomène émergent de l’état de conscience de l’ensemble des individus qui le compose. Il n’y a pas besoin d’illuminatis pour mettre la planète en vrac, notre seule inconséquence collective suffit.
Oui, c’est trop facile de se dédouaner sur quelques pitres de la politique. Ils sont élus par nous car ils nous racontent les mensonges que nous avons envie d’entendre, parce que nous croyons avoir avec eux une plus grosse part du gâteau. L’oligarchie ne parvient à s’imposer que parce qu’elle flatte nos sentiments les plus bas. La responsabilité est bien collective.
BD J’aime bien ce petit résumé de l’année 2011. En fait l’oligarchie est entrain de brûler ce qu’il reste de notre histoire,et notamment les livres, pour en construire une nouvelle. Nous sommes malheureusement à l’aube de la nouvelle. Et vous avez raison, ils nous restent l’esprit, pas celui des maçons comme l’avait pensé Mitterand, mais un esprit de bonne volonté. Je ne peux m’empêcher de citer D Rockfeller dans cette circonstance, et surtout ne perdons pas notre bonne volonté.
«
La présente fenêtre d’opportunité, durant laquelle un ordre mondial
pacifique et interdépendant peut-être construit, ne sera pas ouverte
pour très longtemps. Nous sommes à l’orée d’une transformation globale.
Tout ce dont nous avons besoin est une crise majeure appropriée, et les
nations accepteront le Nouvel Ordre Mondial. »
David Rockefeller, 23 septembre 1994
«
Quelques-uns croient même que nous (la famille Rockefeller) faisons
partie d’une cabale secrète travaillant contre les meilleurs intérêts
des Etats-Unis, caractérisant ma famille et moi en tant
d’internationalistes et conspirant avec d’autres autour de la Terre pour
construire une politique globale plus intégrée ainsi qu’une structure
économique – un seul monde si vous voulez. Si cela est l’accusation, je
suis coupable et fier de l’être. »
David Rockefeller, Mémoires, éd. Random House, 1st Trade Ed edition (ISBN 978-0679405887), 15 octobre 2002, p. 405.
Avoir un peu de culture politique ne peut pas nuire quand on se pique de donner son avis sur la politique. Le Front de Gauche n’est pas gauchiste. Il est de gauche. Les partis à sa gauche (NPA, POI, LO) se revendiquent du gauchisme, car ils sont trotskystes. De rien.
là tu pousses un peu, on a mesuré qu’un neutrino va plus vite que la lumière. si cela se confirme c’est la découverte ultime, nous pourrons voyager dans l’univers. sinon je te ferais un commentaire pour te dire que tu avais probablement raison. cordialement.