52-131
Notre prochain cauchemar ? Travailler
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52 articles et 131 pages de révélations
Il y aurait 78 % de français potentiellement opposés à la loi EL KHOMRI. Opposés aux 52 articles et leurs 131 pages ?
En 2015, une étude Ipsos-CNL établissait que 82 % des français lisaient de moins en moins.
Probablement donc que la très grande majorité des 1 200 000 signataires de la pétition Caroline de HAAS n’aura jamais lu les 131 pages de l’avant-projet de la loi EL KHOMRI. Doutons qu’elles occupent les tables de chevet.
Alors pourquoi un tel rejet ? Les français ont une perception intuitive d’un danger
La 1ère raison, c’est que les présomptions de mauvaises intentions de la part du gouvernement sont désormais fortes. Pourquoi ?
Ce n’est pas la loi EL KHOMRI seule qui mobilise. Les français les plus vulnérables, ceux qui subissent de plein fouet l’absence de croissance : les salariés, les retraités, la partie dégradée de la classe moyenne et la jeunesse ont une perception intuitive de ce qui se passe. Le système mute en un monstre qui développe ses anti corps. Peu importe la loi EL KHOMRI, simplement une partie des français perçoit que la machine à broyer se remet en branle.
Parce que aucune de mesures prises par ce gouvernement n’a porté un coup à la crise. Au-delà même des promesses non tenues, toutes ont dégradé les conditions de vie d’une majorité de français. Injustice insupportable, ces mesures ont épargné les couches sociales catégoriellement « avantagées »
Parce que ce gouvernement a aligné sa politique économique et sociale sur des concessions fortes au patronat et à la financiarisation de l’économie. Parce qu’il l’a fait sans se soucier de distinguer les TPE/PME des multinationales qui promènent leur caisse enregistreuse d’eldorado fiscal en eldorado fiscal.
Jamais un mandat n’avait reposé sur une remise en cause systémique des acquis sociaux en si peu de temps et dans un contexte d’accroissement des inégalités.
La loi EL KHOMRI et la très prochaine crise financière
Même super Mario DRAGHI s’essouffle dans son quantitative easing. Au fait, un quantitative easing pour financer quoi ? Cette démentielle injection de liquidités a-t-elle fait prospérer notre univers européen ? Non ! Aucun projet utile n’a été financé ! Parier sur les entreprises pour relancer la croissance en croyant favoriser l’embauche ? Impossible tant qu’il n’y aura pas un rebond de la consommation. Cette réforme du travail aurait pu avoir quelque vertu « libérale » dans un contexte de réhabilitation de la croissance. En fait, la perspective de redressement de la consommation est tellement aléatoire que tous ces taux d’intérêt quasi nuls vont surtout favoriser la spéculation sur les marchés financiers, l’immobilier, les matières premières, etc. C’est encore une fois les mêmes prédateurs qui vont profiter des taux d’intérêt faibles pour investir sur des actifs dont la valeur peut s’envoler par la spéculation boursière. Ces liquidités n’iront pas toutes dans l’économie réelle et déclencheront ainsi un nouvel éclatement des bulles spéculatives qui produira des licenciements en nombre, dans un cadre juridique dégradé du code du travail.
Les enfants sont dans la rue suite à abandon de famille
La gauche a définitivement perdu. En se vautrant dans le système, elle achève sa corruption en livrant ses enfants à la déchéance sociale. Ses enfants sont désormais dans la rue, malgré les sucreries promises par Matignon. Ils ne sont pas prêts d’en sortir, tel, comme le disait un chroniqueur dont j’ai oublié le nom, « le dentifrice qui ne rentrera plus jamais dans le tube »
La 2ème raison, c’est la méthode. Pourquoi ?
La méthode VALLS/EL KHOMRI ? C’est, pas de concertation, pas de consultation ou si mais tardive et une annonce en février, révélatrice des intentions puisque dans la foulée, EL KHOMRI avait stupidement évoqué l’usage du 49/3 en cas de difficultés. Une grossière erreur qui était un aveu ? Oui, l’aveu que ce projet était pourri des germes d’un échec parlementaire programmé.
La substance indigeste de la loi EL KHOMRI
Dans ce contexte, les rares lectures de l’avant-projet ont rapidement trouvé de l’écho chez les jeunes et les salariés. L’extrait concentré de cet avant-projet de loi, ne résiste évidemment pas à l’analyse. Pourquoi
Le licenciement pour motif économique deviendra la règle
Actuellement, seule une situation de difficulté économique significative ou de compétitivité altérée, justifie du licenciement économique. Avec EL KHOMRI, il suffira de justifier d’une baisse de chiffre d’affaire sur plusieurs trimestres consécutifs. Les patrons n’ont plus qu’à mitonner une pseudo « dégradation de trésorerie » pour justifier sans autres formes, de licenciements. Par ailleurs, pour les multinationales, le motif économique serait apprécié en France, la bonne santé d’un groupe au niveau mondial ne serait donc plus prise en compte.
Pire : une indemnisation au rabais des licenciements abusifs
Le tribunal des prud’hommes statue tous les jours sur ce motif. Un abus lourd de conséquences, lorsqu’il est avéré, sur le destin des individus et de leurs familles. Or dans l’avant-projet de loi, le juge n’aurait plus à apprécier l’ampleur du préjudice subi mais à se référer à un barème d’indemnisation, non en fonction du « crime » mais en fonction de l’ancienneté du salarié au moment du « crime » En fait un employeur peut faire de l’abus, un mode opératoire de gestion des ressources humaines. Du jamais vu même par la pire des droites !
La dépréciation juridique du contrat de travail
Dès lors que les accords d’entreprise priment sur le contrat de travail, celui-ci ne constitue plus une protection. C’est la notion même de rupture de contrat qui s’en trouve dégradée. Un accord d’entreprise signé « en vue de la préservation ou du développement de l’emploi » s’imposerait aux contrats de travail des salariés. Le risque du développement de l’abus est bien réel, dès lors que le salarié réfractaire pourrait tout simplement être licencié pour tout motif sans que le patron n’ait à se fendre d’un plan social.
On pourrait réinitialiser les acquis tous les 5 ans
Habituellement les accords sont pris sans durée limitée. La durée de 5 ans proposée dans un contexte de rapport de force défavorable aux salariés ne peut que produire l’érosion des acquis et l’affaissement de la notion de travail.
Le licenciement, comme règle de productivité
Bref,
Sans aucune intention idéologique partisane, on ne peut que se soucier de cette prochaine dégradation sans précédent, du statut de salarié. Ce statut qui semblait avoir gravé dans le marbre, le rêve d’ascension sociale de nombre de français, va vaciller. C’est la clef de voûte de notre mode de vie qui s’effondre. Nous ne nous sommes pas préparés. Le monde a changé et nos gouvernants n’ont jamais su anticiper.
La proposition de ce gouvernement est d’entrer dans le 21 ème siècle avec un régime minceur, un vrai repli politique. Un repli parce que la première action des employeurs sera de procéder aux licenciements jusqu’ici retardés. C’est une supercherie car cette loi ne va créer aucun emploi et même augmenter le chômage. Et comme les nouvelles dispositions vont se transformer en règles définitives, c’est une inévitable soumission des individus, à la mondialisation qui est promise. L’euthanasie de retraités en guise de réforme des retraites et la transformation du statut de salarié en problème humanitaire sont un ultime recours pour sauver l’« obédience » française de l’ordre capitaliste mondial.
La réforme du code du travail serait-elle le socle d’un nouvel ordre social ?
Certains sociologues avisés ont même prédit qu’avec cette loi, on verrait l’émergence d’une nouvelle bourgeoisie patronale qui s’enrichirait sur le pouvoir absolu que lui garantirait le nouveau code du travail.
Alors, nul ne doute que tous les français ont compris que plus rien ne serait comme avant, surtout ceux qui devront vivre moins longtemps et probablement plus mal que d’autres qui sont programmés, comme les acteurs du capitalisme international, pour vivre bien mieux et plus longtemps. Les inégalités sociales vont aussi se creuser au plan sanitaire.
La France qui se lève tôt, celle qui s’appuie des crédits à vie, celle qui fait notre identité nationale, pas celle des banques et les laboratoires pharmaceutiques, est constituée de 25,8 millions d’emplois, occupés par 22,8 millions de salariés et 3 millions d’indépendants. 12,3 % des salariés, soit 3,2 millions de personnes, ont un emploi précaire (source observatoire des inégalités - 2015)
Les trois quarts des emplois seraient des postes de salariés du privé en contrat à durée indéterminée (59 %) ou des fonctionnaires (17 %) selon les données 2014 de l’Insee.
22, 8 millions d’individus pour 131 pages d’EL KHOMRI. Le concept de « civilisation de loisirs » des experts en sociologie des années soixante serait-il en train de muter en « civilisation du cauchemar » avec la génération des nouveaux experts ? Et pourtant, ils avaient des certitudes les experts de 1960 comme ceux de 2016.
Documents joints à cet article
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