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Accueil du site > Tribune Libre > « A celui qui n’a rien, la Patrie est son seul bien »

« A celui qui n’a rien, la Patrie est son seul bien »

« A celui qui n'a rien, la Patrie est son seul bien », a dit Jaurès. Mais de quoi « celui qui n'a rien » peut-il donc être dépourvu ? Et de quel « bien » risque-t-on donc de le priver, en détruisant sa Nation ?

 Jaurès, comme on s'imagine souvent un socialiste, pense peut-être surtout au rôle de l'institution, à son époque toujours nationale, pour équilibrer les rapports de force dans la société, et ne pas laisser « celui qui n'a rien » à la merci du fort. « N'avoir rien » serait alors être dépourvu de moyens pour se défendre, dans la rue ou dans le monde du travail.

 Jaurès pense peut-être encore à la solidarité nationale, surtout par l'impôt redistributif, permettant d'apporter des aides aux plus jeunes ou plus vieux, ou à ceux qui ont été touchés par un revers de fortune. « N'avoir rien » serait alors être dépourvu des moyens de subvenir à ses besoins, ou de faire face à un acharnement du sort.

 Peut-être que Jaurès n'en dit pas plus, et il aurait tort dans ce cas, car ce serait comme s'il oubliait la dimension affective de l'homme, et se focalisait seulement sur sa dimension matérielle, en ne le voyant que comme une entité matérielle dotée d'une plus ou moins grande force pour ne pas se laisser opprimer, ou dotée d'une plus ou moins grande capacité à subvenir à ses besoins matériels.

 La Nation apporte peut-être aussi une fierté à celui qui n'a pas de fierté, une compagnie à celui qui est seul, une présence rassurante à celui qui a peur, de l'espoir à celui qui n'a pas d'espoir, etc... C'est pourquoi il ne faut jamais cracher sur un drapeau national, ni chercher à le souiller d'une autre manière ou à le déchirer.

 Pour s'en convaincre il suffit d'écouter quelques hymnes nationaux. L'hymne national se chante. Il se chante en groupe le plus souvent. Et il parle d'un idéal, beau et pur, et remplit le cœur d'une chaleur qu'il est même difficile de décrire complètement avec des mots. Pourquoi donc l'hymne national, si la Nation n'a pas de dimension affective ou idéale ?

 Un petit échantillon :

 - La France

 - La Grande Bretagne

 - La Russie

 - Les USA

 Mais pourquoi vouloir apporter à ceux qui ne les ont pas, la fierté, la compagnie, la sérénité, l'espoir, et toutes les autres choses qui réchauffent le coeur, par le chant en groupe d'un hymne national qui rapproche et élève vers un idéal pur, par l'humilité et la déférence collective devant un drapeau, c'est à dire d'une manière ou d'une autre, toujours par la Nation ?

 Et pourquoi faut-il donc absolument frotter un bout de bois contre un autre bout de bois, pour obtenir du feu, demandait peut-être déjà au temps des hommes préhistoriques, l'ancêtre commun de tous nos contemporains qui ne trouvent jamais qu'il est bon de faire les choses comme on sait les faire, et qui voudraient toujours qu'on les fasse autrement. La manière de faire du feu importe-t-elle donc, pourvu qu'on parvienne à en faire ? Et ne devrait-on pas être heureux de connaitre déjà, au moins une manière de faire naitre une flamme ?


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16 réactions à cet article    


  • Robert GIL ROBERT GIL 24 octobre 2011 11:40

    c’est vrai que lorsque tout appartient a des fonds de pension etrangers, ou a des personnes privés fussent-elles francaises, la nation en tant que telle n’existe plus. Si le bien commun disparait, si tout est privatisé, si tout le monde n’a que pour seul but la defense de son interet personnel, il n’y a plus aucun projet commun et donc plus aucune sensation de faire parti d’un tout !


    • samuel_ 24 octobre 2011 11:49


       exact !


    • Francis, agnotologue JL1 24 octobre 2011 12:06

      Je crois que c’est le moment de rappeler : « Si nous nous obstinons à concevoir notre monde en termes utilitaires, des masses de gens en seront constamment réduites à devenir superflues. » (Hannah Arendt )


      Et aussi ça : « dans le contexte de la mondialisation libérale, la promesse d’un revenu garanti par les Etats moribonds est une promesse mort-née. »


    • Francis, agnotologue JL1 24 octobre 2011 12:08

      Désolé, le lien est corrompu.


    • LADY75 LADY75 24 octobre 2011 11:54

      Lady Panam’ s’interroge :

      Un plaidoyer pour le nationalisme ?

      La phrase de Jaurès serait peut-être à resituer dans son contexte. N’oublions pas qu’il était hostile à l’entrée de la France dans ce qui allait devenir la boucherie de 1914-1918.. qu’il opposait alors une vision deu monde où les classes sociales, par-delà les frontières ont plus d’intérêts communs qu’elles n’en n’ont avec les classes qui sont leurs antagonistes économiques.

      A mettre en parallèle avec :

      « Les travailleurs n’ont pas de patries »
      ou
      « Prolétaires de tous pays unissez-vous ! »

      Le nationalisme (à l’époque l’esprit de revanche sur l’Allemagne) touchait les classes populaires (et c’était heureux pour les marchands de canon !), la phrase de Jaurès pourrait tout aussi bien expliquer ce phénomène..

      Pour l’émotion devant les hymnes nationaux et leurs « beaux idéaux ».. Chez tout régime, fut-il la pire des dictatures, vous trouverez toujours un hymne émouvant.. Cela me rappelle un dessin de regretté Chaval, ainsi titré :

      « Crétin ému par un hymne national »

      Ce besoin de se sentir appartenir à un tout, de chanter à plein poumons un air qui vous rassemble et soit un symbole de votre identité commune n’est pas, en lui-même, une garantie de démocratie.. L’enthousiasme des participants aux congrès qui se tenaient à Nuremberg était sincère.. mais qu’en est-il advenu par la suite ?


      • samuel_ 24 octobre 2011 12:10

         Pour la mise en contexte de la phrase de jaurès, je suis d’accord, et c’est pour ça que j’ai limité le sens que lui voulait donner à cette phrase : j’ai fait comme si peut etre, il ne voyait la nation que comme une structure institutionnelle concrete equilibrant les rapports de force et organisant une solidarité concrete en termes de transferts de richesse materielle. Je ne lui ai pas fait dire que la nation avait une dimension affective.

         Avec du feu on peut incendier le parlement pour mettre en place une dictature, comme le firent les nazis. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faut regretter que les singes que nous etions soient devenus hommes en apprenant a faire du feu.

         Les regimes totalitaires ont utilisé pour attirer l’adhesion a eux, les instruments qui peuvent aussi etre utilises par de bon regimes. Ce n’est pas pour autant qu’il faut regretter qu’existent ces instruments. Le mauvais usage est dans la main et non dans l’outil.


      • LADY75 LADY75 24 octobre 2011 13:18

        Lady Panam’ approuve :

        « Le mauvais usage est dans la main et non dans l’outil.. » C’est exact !

        Mais certains outils sont plus dangereux que d’autres !

        Ainsi, si l’on reprend la définition : « une structure institutionnelle concrete equilibrant les rapports de force et organisant une solidarité concrete » cela convient aussi parfaitement à la « volksgemeinschaft » nazie ou à une société sociale démocrate... et cela ne suffit pas en soi comme garantie d’un régime respectueux des libertés..

        Le problème de la nation, c’est sa délimitation..

        La Troisième république, si vantée aujourd’hui, se voulait un régime respectueux de la devise « Liberté, Egalité, Fraternité ».. tout en opprimant son prolétariat (Pas de congés payés, journées de 12h., salaires de misère, etc) et en instituant sur de larges pans de son territoire des régimes d’apartheid.

        De même, la nationalité française une fois acquise, on pourrait croire l’individu inclus dans le corps de la nation.. Que nenni ! Certains aujourd’hui comme en 40, souhaiteraient revenir à des mesures de « dénaturalisation » et créer une ctégorie de « Français fraichement naturalisés en attente de confirmation », sous-statut en contradiction avec la devise nationale..


        • samuel_ 24 octobre 2011 13:27


           Samuel trépigne :

           D’accord avec vous aussi lady ! Oui c’est vrai que c’est pas facile du tout de concevoir la nation. Dangers en tous genre de mauvais usage. Maintenant si vous êtes d’accord que ça ne suffit pas a discrediter la nation, moi je suis d’accord avec vous pour dire que de multiples mauvais usages peuvent en être faits.

           Mais que voulez vous ? Je suis allé a la messe toute mon enfance et je garde en moi le souvenir de ces chants collectifs, de cette humilité et reverence collective, et j’en eprouve une immense nostalgie.
           
           Faisons passer le drapeau de main en main et embrassons le avec devotion comme les catholiques embrassent la croix, et tout ira mieux en France sur le plan des relations affectives et de l’interiorité des gens.

           Voila ma conviction dans toute sa naiveté !


        • samuel_ 24 octobre 2011 13:33


           Bref c’est un sentiment religieux moderne, depourvu de croyance en une affirmation sur le monde du genre « dieu existe », mais qui ne soit que pure affirmation de volonté de vivre ensemble et devotion pour la paix et l’amitié sociale : voila ce que pourrait etre la Nation. Nous avons besoin d’une forme de religiosité comme toutes les sociétés.

           Avez vous deja ete a une messe ?


        • LADY75 LADY75 24 octobre 2011 13:53

          Lady Panam’ navrée..

          .. de décevoir Samuel.

          Je suis très peu allée à la messe, d’une famille quelque peu indifférente (sauf ma mère, parfois bigote) à la religion. N’ai pas le souvenir non plus d’avoir cru un jour, même en mon enfance..

          Donc, pas d’hostilité envers la foi des autres (comment être hostile à quelque chose que l’on ne comprend pas ?) et, concernant la messe catholique, le souvenir d’enfance de cérérmonies ennuyeuses dont je peinais à comprendre le rythme (Entre les assis-debout, les moment où il faut écouter et ceux où il faut chanter..).

          Mais jamais je ne militerais pour la fermeture des églises, synagogues ou mosquées.. mais serais sans modération pour les sectes décervelantes et ruineuses comme certaine « Eglise » bien connue des tribunaux (quand ils ne perdent pas les dossiers d’instruction)..


        • samuel_ 24 octobre 2011 14:58


           Samuel respire :

           et salue l’ouverture d’esprit et la tolerance de lady


        • Vipère Vipère 24 octobre 2011 17:17

          Samuel,

          « Les pauvres, les sans propriétés n’ont que la patrie » !!! Ainsi parlait Jean JAURES aux démunis.
           
          Un concept abstrait supposé réconforter les pauvres ? 

          Une escroquerie intellectuelle facile, digne d’un député socialiste, un nanti, issu de la petite bourgeoisie que l’on qualifierait ajourd’hui de socialiste caviardisé, qui n’a jamais dû dormir de sa vie à la belle étoile, mais dans son lit douillet et sous un toît lui appartenant.

          Ce ne sont ni l’hymne national, ni le drapeau qui remplisse un ventre affamé et ou un corps qui a froid. De beaux idéaux qui ne vous remplisse pas l’estomac et ne vous réchauffe pas le coeur.


          • samuel_ 24 octobre 2011 18:51


             On peut aussi être malheureux en ayant le ventre plein : de solitude, de honte, de desespoir, de peur...

             Pourquoi vouloir opposer la dimension matérielle du bonheur (avoir a manger) à sa dimension affective (se sentir entouré de gens en lesquels on a confiance, pour lesquels on a de l’amitié) ?
             
             Ne sont-elles pas complementaires ?


          • ddacoudre ddacoudre 24 octobre 2011 21:44

            bonjour samuel

            intéressante analyse, naturellement il y a un attachement affectif à sa nation que ce soit pour aimer ou détester, nous ne pouvons pas exister sans attachement car ils sont des marqueurs et des repères, sans cela nous serions des être perdus.
            dans ce cadre la nation et le drapeau occupe une place, mais nous pourrions leur substituer tant d’autre chose car ils ne sont pas iréductibles.

            cordialement.


            • samuel_ 24 octobre 2011 23:50


               Merci dédé smiley

               Quelles choses pourrait-on substituer à la Nation ? Pourquoi ne pas se satisfaire de la Nation : pourvu qu’elle soit un moyen « de faire du feu » qui marche, pourquoi vouloir un autre moyen ? Etes vous bien sur que les autres choses marcheraient ? La Cité (grecque), la société religieuse (moyen age, renaissance, siecle classique, en France), la Nation (XIXeme et XXeme en France) sont des constructions historiques dont nous ne connaissons peut etre meme pas nous memes tous les ressorts et tous les secrets... Un peu comme les hommes prehistoriques qui faisaient du feu en frottant un baton sur l’autre, mais sans savoir comment cette methode marchait, puisqu’il n’avaient pas les connaissances d’aujourd’hui en physique chimie...


            • Iren-Nao 25 octobre 2011 09:59

              Vous etes un mec bien sympa Samuel.
              En plus vous etes plein de bon sens, denree helas devenue rare.
              Comme en plus vous savez que nous n’avons pas moins besoin de fraternite que de patates vous n’irez sans doute pas tres loin, mais ce sera au bon endroit.

              Bien cordialement

              Iren-Nao

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